L’Émir Abd-El-Kader au Mucem

Le Mucem à Marseille propose une exposition de près de 250 œuvres et documents sur l’émir Abd el-Kader (1808-1893) que les cavaliers connaissent aussi par le biais de la lecture de l’ouvrage le plus connu du général Daumas, Les chevaux du Sahara .
L’exposition présente les nombreuses vies de l’homme qui fut à la fois considéré comme le fondateur de l’État algérien, un guerrier, chantre de la résistance, humaniste, et, bien sûr, fin connaisseur de chevaux.
Un lien épistolaire fécond d’une quinzaine d’années a pu s’établir entre ces deux personnes, pourtant séparés par leurs intérêts nationaux, mais que leur culture équestre rapproche.
Les deux hommes se sont rencontrés lors que Daumas a été nommé consul de France à Mascara au-près de l’émir (1837-1839) et se reverront durant son exil en France : « Pour bien m’éclairer, je me suis souvent aussi adressé à l’émir Àbd-el-Kader, ce chef illustre qui, par sa haute position dans la société musulmane, sa science et ses habitudes de cavalier, pouvait le mieux lever les doutes qui me préoccupaient encore. »
Paru tout d’abord en 1851, Les chevaux du Sahara , sera augmenté et enrichi, au fur et à mesure des éditions, des commentaires de l’émir. Ainsi, les deux défendent les qualités du cheval barbe. C’est l’un des premiers ouvrages en français éclairant sur l’hippologie arabe avec le Nâcéri .

L’émir ouvre le propos liminaire d’une des éditions des Chevaux du Sahara (7e édition, Paris, Michel Lévy , 1874 ) par cette petite parabole: « Des savants musulmans ont écrit sur les chevaux un grand nombre de livres dans lesquels ils discourent d’une manière détaillée sur leurs qualités, leurs couleurs, sur tout ce qui est réputé bon ou fâcheux, sur leurs maladies et sur la manière de les traiter. Un d’eux, Abou-Obeïda, contemporain du fils d’Haroun-al-Raschid, a composé à lui seul cinquante volumes sur les chevaux.
Cet Abou-Obeïda eut une petite mésaventure qui prouve que ce n’est pas l’auteur des plus gros et des plus nombreux livres qui donne les meilleurs enseignements, et que la méthode de consulter les hommes n’est pas la plus mauvaise méthode.
« Combien de livres as-tu écrits sur les chevaux? demandait un jour le vizir de Mamoun, fils de Haroun-al-Raschid, à un célèbre poëte arabe. — Un seul. » Puis, se tournant vers Abou-Obeïda, il lui adressa la même question. « Cinquante, dit celui-ci. — Lève-toi alors, lui dit le vizir, approche-toi de ce cheval, et donne-moi les noms de toutes les parties de son corps, en ayant soin de me montrer la position de chacune. — Je ne suis pas vétérinaire, lui dit Abou-Obeïda. — Et toi? » dit le vizir au poëte. « Sur cela (c’est le poëte lui même qui raconte le fait), je me levai, et saisissant le cheval par le toupet, je commençai à nommer un membre après l’autre, en plaçant ma main sur chacun d’eux pour en indiquer la position, et je citai en même temps toutes les poésies qui s’y rapportaient, tous les dictons et les proverbes des Arabes. Lorsque j’eus terminé, le vizir me dit : « Prends le cheval. » Je le pris, et toutes les fois que je voulais vexer Abou-Obeïda, je montais ce cheval pour aller le voir. » À méditer ?

L’exposition est visible jusqu’au 22 août.

En savoir plus:

Photo en Une : [Louis Jean Delton, Portrait d’Abd el-Kader à cheval, 1865, photographie. Archives nationales d’outre-mer, Aix-en-Provence © FR ANOM. Aix-en-Provence (139 APOM/2) – Tous droits réservés — Mucem]

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