Chauveau et Arloing, Traité d’anatomie comparée des animaux domestiques, 3e édition, Paris, 1879.

Chapitre III
Idées générales sur l'organisation du cheval

Si, disséquant l’un après l’autre les différents plans qui constituent l’ensemble de l’organisme, nous pénétrons à l’intérieur du corps du cheval, nous reconnaissons qu’il renferme des liquides et des solides organiques, auxquels s’adjoignent des gaz et quelques substances minérales.

I. — Liquides organiques.

Les liquides contenus dans l’économie représentent les 6/10 du poids du corps. Ils comprennent d’abord le sang ; puis les liquides qui se rendent au sang (chyle, lymphe, etc.), et enfin ceux qui en émanent (lait, bile, synovie, graisse, salive, sueur, sérosité, urine, sperme, etc.).

Leur importance est considérable ; car, sans eux, les solides organiques seraient frappés de mort ; un élément privé d’humidité est un élément privé de vie.

II. — Gaz et matières minérales.

Les gaz et les matières minérales constituent les substances inorganiques du corps.

Les gaz sont représentés par de l’air atmosphérique plus ou moins modifié (cavités nasales, oreilles, sinus, poumons, etc.), ou ils résultent de la fermentation des matières alimentaires dans le tube intestinal. Quelques-uns enfin sont en dissolution dans les liquides animaux.

Les matières minérales se présentent également en dissolution dans ces mêmes liquides, ou à l’état solide. Sous cette dernière forme, on p. 9les rencontre rarement dans les organes sains, mais assez fréquemment dans les organes malades (calculs).

III. — Solides organiques.
Éléments anatomiques, tissus, organes, appareils, fonctions.

1° Éléments anatomiques. — Les solides organiques sont constitués, en dernière analyse, par des éléments plus ou moins volumineux, invisibles à l’œil nu, désignés sous le nom d’éléments anatomiques (granulations, cellules, fibres).

2° Tissus et organes. — Le groupement particulier des éléments anatomiques forme les tissus1, de même que toute agglomération de tissus ayant une forme déterminée et une fonction à remplir prend le nom d’organe.

Les organes ont été divisés en organes pleins et en organes creux. Parmi les premiers, un certain nombre remplissent le rôle de supports ; tels sont les os. D’autres ont pour mission de produire les mouvements ; ce sont les muscles. Le système nerveux central, les nerfs périphériques, les glandes, appartiennent à ce groupe des organes pleins.

Les organes creux sont généralement tapissés par une membrane tégumentaire interne ou muqueuse ; exemple : le poumon, l’estomac. Les vaisseaux sanguins et lymphatiques, les membranes séreuses, qui revêtent l’intérieur des grandes cavités et la surface externe des organes que ces cavités renferment, font aussi partie des organes creux.

3° Appareils. — L’ensemble de tous les organes qui concourent au même but constitue un appareil. C’est ainsi que les organes immédiatement situés sous la peau, les muscles et les os, forment par leur réunion l’appareil de la locomotion, qui ne peut fonctionner lui-même qu’autant qu’il y est sollicité par un autre ensemble d’appareils dont le but est d’entretenir la vie, d’animer la machine animale (appareils de l’innervation, de la respiration, de la circulation, de la p. 10digestion, de la dépuration urinaire, des sens, et de la reproduction). Comme nous le verrons plus loin, ces appareils se trouvent logés dans des cavités de la tête et du corps, spécialement creusées pour les protéger.

4° Fonctions. On entend par fonction, l’action d’un organe ou d’un appareil organique. Les fonctions ont été divisées en deux grandes classes : 1° celles relatives à la conservation de l’individu ; 2° celles relatives à la conservation de l’espèce (fonction de génération). Les premières sont subdivisées en fonctions de relation ou de la vie animale (locomotion, innervation, sens), et en fonctions de nutrition ou de la vie organique (digestion, absorption, circulation, respiration, nutrition, sécrétions). Nous examinerons chacune des ces fonctions quand nous étudierons en particulier les organes à l’aide desquels elles s’exécutent.

A. — Appareils organiques dans leur ensemble.

Il nous reste maintenant à esquisser une vue d’ensemble des différents appareils qui concourent à l’exécution des fonctions, afin que le lecteur puisse embrasser, d’un seul coup d’œil, la disposition générale, le groupement particulier des organes composant chacun de ces appareils, et nous suivre sans peine dans nos descriptions ultérieures.

a. — Appareil de la locomotion.

L’appareil de la locomotion a pour but de déplacer le corps de l’animal en totalité (allures), ou de faire mouvoir ses diverses pièces les unes sur les autres (ruade, cabrer) ; il a pour agents les os, réunis par les articulations et les muscles. Nous allons dire un mot de chacun de ces agents.

1° Squelette (Pl. 1, et fig. 1 du texte). — Le squelette, ou charpente intérieure du corps du cheval, est formé par l’ensemble des os considérés dans leurs rapports naturels. Son but est de protéger les organes intérieurs, de supporter la machine animale et de contribuer à ses mouvements.

Chacune des pièces osseuses composant le squelette a reçu un p. 11nom particulier tiré de sa forme (péroné), de sa ressemblance avec des objets connus (tibia), de sa situation (côtes), etc.

D’après la position qu’ils occupent relativement au plan médian du corps, les os sont encore divisés en pairs et impairs.

Enfin, ils sont dits longs, allongés, courts et plats, suivant leur forme.

Les os longs appartiennent exclusivement aux membres et sont seuls creusés d’un canal dit médullaire, dans lequel se trouve une substance molle, graisseuse, appelée mœlle (fémur, humérus, etc.).

Les os allongés diffèrent des précédents en ce qu’ils n’ont pas de canal médullaire.

Les os larges ou plats se rencontrent dans la tête et la partie supérieure des membres (pariétal, omoplate).

Les os courts se trouvent partout où il faut des parties jouissant à la fois d’une grande solidité et d’une certaine mobilité (astragale, deuxième phalange).

La forme générale des os est modifiée par des éminences et des cavités.

Les éminences sont des saillies plus ou moins prononcées qu’on voit à la surface des os. On les a divisées en articulaires et non articulaires ; les premières concourent à former les articulations qui joignent les os entre eux ; les secondes donnent attaches aux tendons et aux ligaments.

Les cavités sont également articulaires ou non articulaires ; les premières répondent aux éminences de même nom dans les jointures osseuses ; les secondes servent au passage des tendons, des vaisseaux, des nerfs, etc.

Les os sont formés d’un tissu propre, entouré à l’extérieur par une membrane particulière, le périoste, et pénétré à l’intérieur par la mœlle, des vaisseaux et des nerfs.

Avant d’arriver à l’état où ils se présentent chez le cheval adulte, les os passent par diverses phases successives. D’abord mous, demi-transparents (état muqueux) dans l’embryon, ils s’imprègnent un peu plus tard de gélatine et deviennent plus résistants (état cartilagineux). Enfin, vers le deuxième mois de la vie intra-utérine, les os se chargent de sels calcaires et acquièrent insensiblement leurs caractères propres. Cette transformation osseuse ne devient toutefois complète que vers cinq ou six ans.

Chez les animaux âgés, les os éprouvent encore des changements importants : le canal médullaire des os longs s’agrandit et leurs parois p. 12p. 13p. 14s’amincissent ; de même, les os larges diminuent d’épaisseur.

Fig. 1. — Squelette du cheval. (Chauveau et Arloing)

I. Tête.1, crâne. Partie supérieure de la tête.2, face. Beaucoup plus étendue que le crâne ; chez le cheval, la face comprend les deux mâchoires. (voy. IIIe partie, tête.)II. — Corps ou tronc.3, tronc. Le tronc est représenté, sur la ligne médiane, par le rachis ou colonne vertébrale, longue tige flexueuse de chaque côté de laquelle se détachent dix-huit arcs osseux, ou côtes, qui viennent s’appuyer directement ou indirectement, par leur extrémité inférieure, sur un os unique appelé sternum. (Voy. IIIe partie, cou et tronc proprement dit.)III. — Membres.4, membre antérieur.5, membre postérieur. (Voy. IIIe partie, membres)A. — TÊTE.1° Os du crâne.6, Occipital.7, pariétal.8, apophyse zygomatique du temporal.9, hiatus auditif externe.10, frontal.11, cavité orbitaire.2° Os de la face.12, os unguis ou lacrymal.13, os malaire ou zygomatique.14, os sus-nasal.15, maxillaire supérieur.16, trou sous-orbitaire.17, dents molaires.18, dents incisives.19, os inter-maxillaire ou petit sus-maxillaire.20, maxillaire inférieur.21, trou mentonnier.B. — TRONC.1° Colonne vertébrale.22, région cervicale de la colonne vertébrale.23, atlas ou première vertèbre cervicale.24, axis ou seconde vertèbre cervicale.25, région dorsale de la colonne vertébrale.26, apophyse épineuse de la première vertèbre dorsale.27, région lombaire de la colonne vertébrale.28, sacrum ou vertèbres sacrées.29, coccyx ou vertèbres de la queue.2° Côtes et sternum.30, côtes (la huitième ou dernière côte sternale.31, appendice xiphoïde du sternum.C. — MEMBRES.1° Membre antérieur.32, omoplate.33, fosse sus-épineuse.34, fosse sous-épineuse.35, tubérosité de l’épine.36, apophyse coracoïde.37, bord de la cavité glénoïde.38, cartilage de prolongement.39, humérus.40, tête de l’humérus.41, trochiter ou grosse tubérosité de l'humérus.42, empreinte ou tuberosité deltoïdienne.43, trochlées de l’extrémité infér. de l’humérus.44, radius.45, cubitus.46, apophyse olécrâne.Pied.47, os du carpe.48, premier os de la rangée supérieure du carpe, ou os sus-carpien.49, métacarpien principal.50, métacarpien rudimentaire externe.Région digitée.51, grands sésamoïdes.52, première phalange.53, deuxième phalange.54, troisième phalange ou os du pied.2° Membres postérieurs.55, coxal (ilium, pubis, ischium).56, angle interne de l’ilium ou angle de la croupe.57, angle externe de l’ilium ou angle de la hanche.58, tubérosité ischiatique ou angle postérieur externe de l’ischium (pointe de la fesse).59, bord de la cavité glénoïde.60, crête sus-cotyloïdienne.61, fémur.62, crête sous-trochantérienne.63, fosse sus-condylienne.64, tête du fémur.65, grand trochantur.66, condyle ext. du fémur.67, trochlée.68, rotule.69, tibia.70, crête du tibia.71, péroné.Pied.72, os du tarse (astragale).73, calcanéum.74, rangée inférieure des os du tarse.75, métatarsien principal.76, métatarsien rudimentaire externe.Région digitée.77, grands sésamoïdes.78, première phalange.79, deuxième phalange.80, troisième phalange ou os du pied.

Toutes ces particularités expliquent parfaitement pourquoi les jeunes chevaux sont plus sujets que les adultes aux tares osseuses (voy. IIe partie, Tares des membres), pourquoi, d’un autre côté, les os deviennent si fragiles chez les vieux animaux. Elles donnent également la raison de certaines maladies du tissu osseux, telles que le rachitisme, l’ostéomalacie, etc. Caractérisé par un développement incomplet du squelette, le rachitisme est, en effet, dû à ce que la cartilagéine de la vie fœtale ne se transforme pas en osséine. L’ostéomalacie ne diffère du rachitisme qu’en ce que la cause agit chez l’adulte et détruit la solidité déjà établie ; tandis que, dans le rachitisme, le développement du squelette est empêché alors qu’il n’est pas encore terminé.

Le squelette a pour partie centrale, sur laquelle toutes les autres prennent directement ou indirectement leur appui, le rachis ou colonne vertébrale, dont la direction, verticale chez l’homme, est horizontale chez le cheval. Cette longue tige solide et flexible, articulée antérieurement avec la tête avec la (1, 2), se termine postérieurement par les os de la queue ou coccyx (29), et est formée d’une suite d’os courts appelés vertèbres.

Les différences de configuration que ces os présentent dans les divers points du rachis ont permis de diviser celui-ci en cinq régions qui sont, en procédant d’avant en arrière : 4° la région cervicale (7 vertèbres, 2, 2) ; 2° la région dorsale (18 vertèbres, 25) ; 3° la région lombaire (6 vertèbres, 27) ; 4° la région sacrée ou du sacrum (5 vertèbres soudées, 28) ; 5° la région coccygienne (vertèbres en nombre variable, 29).

Les vertèbres sont articulées ensemble, de manière à pouvoir jouer plus ou moins facilement les unes sur les autres ; celles de la région cervicale ou de l’encolure sont les plus mobiles.

Percées chacune d’un trou, d’avant en arrière, elles forment, par leur réunion, un long canal qui loge la mœlle épinière, partie très importante des centres nerveux.

Chaque vertèbre est munie de trois éminences appelées apophyses : deux latérales (apophyses transverses), une supérieure, verticale (apophyse épineuse), surtout marquée dans les régions dorsale et lombaire.

Ces os présentent, en outre, deux extrémités : l’une antérieure, portant une surface arrondie en forme de tête plus ou moins détachée ; l’autre postérieure, creusée d’une cavité destinée à recevoir la tête de la vertèbre suivante.

p. 15D’un côté et de l’autre de la tige rachidienne partent dix-huit grands arcs osseux appelés côtes (30), s’articulant supérieurement avec les vertèbres dorsales, inférieurement avec le sternum (31), et constituant une sorte de cage appelée thorax (3), ouverte en avant et en arrière.

Postérieurement, articulé avec le sacrum, se trouve un os pair, composé de plusieurs parties, le coxal (55), qui, accolé à celui du côté opposé, forme la cavité pelvienne ou du bassin.

Toutes ces pièces osseuses sont supportées par quatre colonnes appelées membres, dont deux antérieurs (4) et deux postérieurs (5), constitués chacun par un certain nombre d’os affectant généralement une direction oblique les uns par rapport aux autres.

p. 19Il est à remarquer que si cette disposition angulaire n’est pas aussi favorable à la solidité que la superposition verticale, elle a du moins l’avantage d’amortir les réactions du sol contre le corps. Il ne suffisait pas, en effet, que les colonnes des membres eussent la rigidité nécessaire pour supporter le poids de l’animal ; il fallait encore que les secousses imprimées au corps, aux articulations, lors des allures rapides surtout, ne produisissent pas des ébranlements trop considérables. Sans cette brisure des rayons osseux, non seulement le cheval se fût usé rapidement, mais il eût été impossible de le monter.

Nous savons tous, par expérience personnelle, que lorsque nous faisons un saut, nous devons retomber sur la pointe des pieds sous peine d’un ébranlement douloureux et même d’accidents graves. Si ce sont, en effet, les talons qui portent les premiers, la réaction du sol est transmise intégralement au tronc par la ligne verticale des os de la jambe et de la cuisse superposés, et nous ressentons une secousse des plus pénibles. Cet exemple donne à lui seul la démonstration de l’utilité, de la nécessité même, des angles formés par les rayons des membres.

Les réactions ne sont pas les mêmes, d’ailleurs, dans les membres antérieurs et dans les membres postérieurs. Par suite de la disposition particulière des premiers, dont les rayons supérieurs ou scapulaires, non articulés avec le tronc, mais simplement réunis à cette région par des attaches musculaires solides, forment une espèce de soupente pour la cage thoracique, les réactions, chez eux, sont plus faibles que dans les membres postérieurs, articulés directement sur la partie postérieure p. 16du rachis par l’intermédiaire des os coxaux, qui en constituent anatomiquement les premiers rayons.

Cette dernière disposition était nécessaire pour que les membres postérieurs pussent intégralement transmettre l’impulsion à la colonne vertébrale et, par suite, aux membres antérieurs.

Chez le cheval adulte, on compte 189 os.

2° Articulations. — Les différentes pièces osseuses qui constituent la charpente solide du cheval sont unies entre elles de manière à pouvoir jouer les unes sur les autres. De cette réunion résultent les articulations ou jointures articulaires.

Toute articulation est donc essentiellement formée de deux surfaces osseuses opposées, moulées l’une sur l’autre. Celles-ci sont plus ou moins contiguës, plus ou moins mobiles, et les articulations qui en résultent ont reçu, par ce fait même, différentes dénominations. C’est ainsi qu’on distingue trois genres différents de jointures articulaires : les diarthroses ou articulations mobiles (Ex. : articulation coxo-fémorale) ; les synarthroses ou articulations immobiles (Ex. : articulation des os de la tête) ; les amphiarthroses ou articulations mixtes (Ex. : articulation des vertèbres entre elles).

Dans la plupart des articulations, les extrémités articulaires sont réunies par un certain nombre de ligaments, les uns funiculaires, les autres membraniformes ou capsulaires ; ces derniers entourent souvent les articulations de toutes parts, à la manière d’un manchon. Leurs surfaces contiguës sont, en outre, revêtues de lames cartilagineuses dites cartilages d’encroûtement, dont la face libre se distingue par un brillant et un poli remarquables. La présence de ces cartilages dans les articulations mobiles est de la dernière nécessité ; ils favorisent, en effet, le jeu des pièces osseuses, s’opposent à leur usure, et amortissent les secousses violentes par leur élasticité.

Enfin, chaque articulation mobile est pourvue de capsules synoviales, membranes fort minces sécrétant la synovie, fluide visqueux dont le rôle, dans l’économie animale, est absolument identique à celui des corps gras employés pour graisser les rouages de nos machines.

Les mouvements dont les diarthroses peuvent être le siège sont : le glissement simple, la flexion, l’extension, l’adduction, l’abduction, la circumduction et la rotation.

Les articulations jouent un très grand rôle dans le fonctionnement p. 17général de la machine animale, surtout quand celle-ci est destinée au travail. Des jointures faibles ne permettraient ni l’étendue ni la puissance des mouvements qui déterminent l’effet utile chez le moteur en action. Aussi, le volume des articulations est-il toujours un indice de force.

L’inflammation des jointures articulaires, ou arthrite, est très grave. Elle peut être le résultat d’une irritation directe (coup de pied, chute, etc.) ou survenir comme complication d’une maladie viscérale grave (pneumonie, pleurésie, etc.). Enfin, on la voit souvent apparaître d’emblée chez les jeunes animaux.

3° Muscles. — Les muscles sont des organes fibreux jouissant de la propriété de se contracter sous l’action d’un stimulant. Chargés de mouvoir les leviers osseux et de faciliter la contraction des organes internes, ils donnent aussi au corps de l’animal sa forme générale, en remplissant les vides et en effaçant les parties trop saillantes du squelette. Enfin, établis dans certains cas en larges couches, ils forment aux cavités des parois actives (Ex. : muscle grand oblique ou oblique externe de l’abdomen).

On distingue des muscles lisses, intérieurs, ou muscles de la vie organique, et des muscles striés, extérieurs, ou muscles de la vie animale. Les premiers appartiennent aux organes de la vie végétative (plans musculaires de l’estomac, de l’intestin, etc.), et sont soustraits à l’influence de la volonté. Les seconds diffèrent des premiers en ce sens que leur pouvoir contractile — le tissu charnu du cœur excepté — est immédiatement placé sous l’influence de la volonté ; aussi, la section du nerf moteur qui se rend à un muscle strié, ou toute autre cause susceptible d’enrayer l’action de ce muscle, frappe-t-elle de paralysie la région musculaire ainsi soustraite à l’influence nerveuse.

Ce sont les muscles striés surtout qu’il importe pour nous de connaître, en ce sens qu’ils forment la plus grande partie de la masse du corps.

Muscles striés ou extérieurs (fig. 2 du texte). — Ces muscles, au nombre de 463 chez le cheval, d’après Rigot, ont reçu, comme les os, des noms particuliers rappelant, ou leurs usages, ou leur position, ou leur forme.

On les a, en outre, divisés en larges, longs et courts ; en droits, obliques, transverses et circulaires ; en pairs et impairs, suivant leur p. 18forme, leur direction et leur situation par rapport au plan médian du corps.

Fig. 2. — Vue générale des muscles superficiels.

2, parotido-auriculaire ou abaisseur de l’oreille.3, cervico-auriculaires.4, masséter.5, orbiculaire des paupières.11, muscles des lèvres et du nez.12, mastoïdo-huméral.13, trapèze cervical.14, trapèze dorsal.15, grand dorsal.18, petit pectoral.19, pectoral profond.20, sterno-maxillaire.23, omoplat-hyoïdien.24, sus-épineux.25, sous-épineux.30, court extenseur de l’avant-bras.31, gros extenseur de l’avant-bras.33, extenseur antérieur du métacarpe.34, court fléchisseur de l’avant-bras.35, extenseur antérieur des phalanges.36, fléchisseur oblique du métacarpe.37, fléchisseur interne du métacarpe.46, angulaire de l’omoplate.47, grand dentelé.48, rhomboïde ou releveur propre de l’épaule.49, petit dentelé postérieur.50, splénius.52, intercostaux externes.54, fascia-lata.55, long vaste.56, moyen fessier.61, demi-tendineux.62, droit antérieur de la cuisse.63, vaste externe.65, jumeaux de la jambe.68, fléchisseur profond des phalanges.69, extenseur latéral des phalanges.70, extenseur antérieur des phalanges.74, grand oblique de l’abdomen.

Chaque muscle a une attache fixe ou d’origine et une attache mobile  ; la première répond au point du muscle qui reste le plus habituellement fixe pendant les contractions ; la seconde, au levier déplacé par celles-ci.

Ces attaches ont généralement lieu par l’intermédiaire de tendons ou d’aponévroses.

Les tendons sont des cordons fibreux d’un blanc nacré, arrondis ou aplatis, très résistants, fixés sur les extrémités des muscles longs.

Les aponévroses, au contraire, appartiennent aux muscles larges et sont plus larges, moins épaisses que les tendons.

Il entre dans la structure des muscles du tissu musculaire proprement dit, du tissu conjonctif sous la forme de lamelles délicates, d’aponévroses ou de tendons ; enfin, des vaisseaux et des nerfs.

Contraction musculaire. — Les muscles, avons-nous dit, mettent en jeu la machine animale sous l’influence du système nerveux, qui les fait entrer en contraction. Il nous reste maintenant à analyser les phénomènes physiques qui accompagnent l’action musculaire.

Quand un muscle se contracte, il se raccourcit. Ses deux extrémités se rapprochent si elles sont libres, ou l’une d’elles seulement va à la rencontre de l’autre, si celle-ci est fixe ; mais, dans tous les cas, il y a production d’un mouvement.

La contraction musculaire ne peut s’exécuter en permanence. Un muscle doit forcément avoir des intermittences de repos, sous peine d’être bien vite hors d’état de remplir ses fonctions. C’est pourquoi, d’ailleurs, dans les régions où l’action des muscles est incessante, la nature a placé des ligaments élastiques qui leur viennent en aide (ligament cervical, tunique abdominale, ligament suspenseur du boulet).

Les muscles, en somme, jouissent tous de la faculté de se contracter ; mais la force et l’étendue de leurs contractions varient suivant qu’ils sont entièrement libres ou qu’ils ont une résistance à vaincre, suivant la longueur des fibres musculaires, etc. — « On fixe la limite moyenne de l’étendue du raccourcissement d’un muscle au quart environ de ses fibres musculaires, disent MM. Chauveau et Arloing2.

p. 20D’après cela, on conçoit que le mouvement engendré par la contraction d’un muscle sera d’autant plus grand que ses fibres seront plus longues. Du reste, dans cette appréciation, il faut tenir compte de la densité et de l’énergie de la fibre, ainsi que de l’intensité du stimulant de la contractilité. »

Fig. 3. — Vue générale des appareils de la digestion et de la sécrétion urinaire.

1, bouche.2, pharynx ou arrière-bouche.3, œsophage.4, diaphragme.5, rate.6, estomac (sac gauche).7, duodénum (première portion de l’intestin grêle).8, foie (extrémité supérieure).9, gros côlon ou côlon replié (gros intestin).10, cœcum (gros intestin).11, circonvolutions de l’intestin grêle.12, petit côlon ou côlon flottant.13, rectum (dernière portion du gros intestin).14, anus.15, rein gauche et son uretère.16, vessie.17, urèthre.
p. 21
b. — Appareil de la digestion.

La digestion est la fonction à l’aide de laquelle les animaux extraient des aliments et des boissons introduits dans l’économie, les principes dont ils ont besoin pour l’entretien et la réparation de leurs organes.

L’appareil dans lequel s’opère ce travail de préparation et d’absorption des produits organisables est l’appareil digestif, long tube composé d’une suite de cavités renflées ou tubuliformes, qui se succèdent d’avant en arrière dans l’ordre suivant : la bouche, l’arrière-bouche, l’œsophage, l’estomac, et l’intestin (intestin grêle et gros intestin).

Chacune de ces divisions du tube digestif est pourvue, sur son trajet, d’organes annexes qui sont : les glandes salivaires, le foie, le pancréas et la rate.

La bouche, l’arrière-bouche et les glandes salivaires sont logées sous la mâchoire supérieure et la base du crâne ; l’œsophage, sous la portion cervico-thoracique de la colonne vertébrale ; l’estomac, l’intestin, le foie, le pancréas et la rate, dans la grande cavité abdominale (fig. 3 du texte).

(Voy. IIIe partie, Tronc et cavité abdominale.)

c. — Appareil de la respiration.

La respiration est la fonction par laquelle l’air introduit dans les voies respiratoires abandonne une partie de son oxygène au sang veineux, et en sort chargé d’un excès d’acide carbonique.

Cette absorption spéciale, qui a pour effet de transformer le sang veineux en sang artériel, s’effectue dans le poumon, organe spongieux creusé d’une foule de petites cavités dites vésicules pulmonaires, dont les minces parois, traversées par une multitude de vaisseaux capillaires, permettent à l’air atmosphérique de céder son oxygène au sang qui circule dans ces capillaires, et au fluide sanguin de se débarrasser de son excès d’acide carbonique.

Le poumon se trouve logé dans la cavité thoracique, dont il suit les mouvements alternatifs de dilatation et de resserrement, c’est-à-dire d’inspiration et d’expiration.

p. 22Il est en communication avec l’air extérieur par deux séries de canaux se faisant suite :

1° Un tube impair comprenant le larynx, qui le commence, la trachée, qui en forme le corps ou la partie moyenne, et les bronches, qui le terminent.

Fig. 4. — Vue générale de l’appareil de la respiration.

1, cavité crânienne.2, poche gutturale.3, cavités nasales.4, langue.5, cavité pharyngienne.6, cavité du larynx.7, épiglotte.8, trachée.9, œsophage.10, bronche gauche coupée.11, bronche droite se ramifiant dans le tissu pulmonaire.12, poumon droit.13, poumon gauche vu en dessus.14, sternum.15, côtes.15’, section des côtes gauches.16, cœur.17, aorte postérieure.18, aorte antérieure.

2° Les cavités nasales, fosses paires qui aboutissent dans le pharynx, p. 23ou arrière-bouche, et commencent par deux orifices, les naseaux, percés à l’extrémité antérieure de la tête.

À chaque mouvement d’inspiration, la poitrine s’agrandit, le vide se fait dans le poumon, et une certaine quantité d’air s’y introduit ; immédiatement après, les côtes soulevées s’abaissent, compriment le poumon, et l’air en est expulsé (expiration).

Pendant ce temps, les phénomènes chimiques qui constituent l’essence même de la respiration, et dont nous avons dit un mot au début, ont eu le temps de s’accomplir (fig. 4 du texte).

(Voy. IIIe partie. Tronc et cavité thoracique.)

d. — Appareil de la circulation.

L’économie animale est incessamment parcourue par des fluides, au nombre de deux : le sang et la lymphe. Ces fluides circulent dans des vaisseaux formés par des membranes élastiques et contractiles disposées en canaux. On distingue des vaisseaux veineux ou veines, des vaisseaux artériels ou artères, et des vaisseaux lymphatiques.

Les vaisseaux veineux et artériels charrient du sang noir ou rouge ; les vaisseaux lymphatiques charrient de la lymphe ou sang blanc, qu’ils puisent au sein de la plupart des organes.

Dans les veines, le sang est noir et coule de la périphérie vers un organe central, le cœur ; dans les artères, au contraire, le sang est rouge et coule du centre vers la périphérie.

Quand on sectionne un vaisseau sanguin, on reconnaît si l’on a affaire à une veine ou à une artère, non seulement par la couleur et la direction différentes du liquide sanguin ; mais encore à cette particularité que le sang veineux coule lentement du vaisseau sectionné, tandis que le sang artériel s’en échappe avec force, formant un jet plus ou moins vigoureux.

Les artères se terminent dans l’épaisseur des tissus par des ramuscules fort ténus et très nombreux s’anastomosant entre eux pour se reconstituer de proche en proche en rameaux de plus en plus considérables et donner naissance aux veines. L’ensemble de ces vaisseaux microscopiques, intermédiaires aux veines et aux artères, constitue le système capillaire.

« L’appareil de la circulation comprend donc : 1° le cœur, organe p. 24central préposé à l’impulsion du sang ; 2° un système de vaisseaux centrifuges, les artères, qui, du cœur, portent le sang dans les p. 25organes ; 3° un système de vaisseaux centripètes, les veines, qui ramènent au cœur le fluide nourricier ; 4° les lymphatiques, système centripète accessoire, chargé d’apporter la lymphe dans le cercle vasculaire sanguin3 (fig. 5 du texte). » (Voy. IIIe partie. Tronc et cavité thoracique.)

Fig. 5. — Vue générale de l’appareil de la circulation.

1, cœur (ventricule droit).2, cœur (ventricule gauche).3, cœur (oreillette gauche).4, artère pulmonaire.5, veines pulmonaires.6, aorte antérieure.7, artère carotide primitive.8, artère maxillaire externe.9, artère axillaire gauche.10, artère dorsale.11, artère cervicale.12, artère vertébrale.13, artère humérale.14, artère radiale.15, artère collatérale du canon.16, cercle ou rameau coronaire.17, aorte postérieure.18, tronc cœliaque se distribuant à l’estomac.19, artère grande mésentérique.20, artères rénales.21, artères spermatiques ou grandes testiculaires.22, veine cave postérieure.23, veine porte.24, artères iliaques externes.25, artères iliaques internes.26, artère sous-sacrée.27, artère fémorale.28, artère tibiale postérieure.29, artères digitales.30, réseau veineux du pied.31, veine saphène.32, veine de l’ars.33, veine jugulaire.
e. — Appareil de l'innervation.

L’appareil de l’innervation comprend une partie centrale logée dans le canal rachidien (axe encéphalo-rachidien, constitué par l’encéphale et la mœlle épinière), et une partie périphérique représentée par une double série de branches qui s’échappent latéralement de la tige centrale et vont se distribuer dans toutes les parties du corps. Ces branches constituent les nerfs.

Ce sont des cordons conducteurs qui, fonctionnant un peu à la manière des fils télégraphiques, transmettent des parties aux centres (racines supérieures, à conductibilité centripète) les sensations perçues, et du centre aux organes du mouvement (racines inférieures, à conductibilité centrifuge) les ordres d’agir. C’est ainsi que, dans la digestion, par exemple, l’excitation exercée par les aliments sur les fibres nerveuses du tube intestinal, à conductibilité centripète, est transmise par ces fibres à l’axe médullaire, puis réfléchie sur les fibres à conductibilité centrifuge, et ramenée par elles dans l’estomac, dont elle met en jeu les propriétés spéciales.

En résumé, tous les nerfs prennent leur origine sur l’axe encéphalorachidien par deux catégories de radicules : les unes, supérieures, constituent les racines sensitives ; les autres, inférieures, constituent les racines motrices. Quelques nerfs seulement ne comprennent qu’une seule espèce de fibres, et ces nerfs appartiennent tous à l’encéphale.

À leur sortie du conduit osseux qui leur livre passage, les racines supérieures et les racines inférieures se réunissent généralement en à un gros tronc commun qui conserve ses propriétés tant qu’il est en communication avec les centres ; mais, si on le coupe dans un point de sa longueur, le bout communiquant avec l’axe spinal reste seul avec ses caractères ; la partie périphérique dégénère et devient p. 26impropre à conduire les impressions sensitives ou à transmettre les excitations motrices volontaires. C’est sur cette particularité qu’est basée la névrotomie plantaire, opération consistant dans la section du cordon nerveux qui se rend au point douloureux du pied et cause sa p. 27sensibilité. Par suite de cette opération la douleur disparaît et le cheval cesse de boiter.

Fig. 6. Vue générale de l’appareil de l’innervation.

1, encéphale.2, nerf optique.3, maxillaire supérieur.4, maxillaire inférieur.5, nerf vague ou pneumogastrique.6, mœlle épinière.7, plexus brachial droit.8, nerf pré-huméral.9, huméral antérieur.10, huméral moyen.11, huméral postérieur.12, pneumogastrique.13, portion gastrique du plexus solaire.14, ganglion semi-lunaire, centre du plexus solaire.15, plexus lombo-sacré gauche.16, nerf fémoral antérieur et nerf saphène.17, tronc sciatique.18, nerf petit fémoro-poplité ou sciatique poplité externe.19, nerf grand fémoro-poplité ou grand sciatique.20, nerf tibial postérieur.21, nerf plantaire.22, nerf cubito-plantaire ou médian.23, nerf plantaire.24, 24, branches terminales du nerf plantaire.

Il y a lieu de faire remarquer que le système nerveux n’agit pas directement dans les actes de la nutrition, bien qu’il ait une action importante sur les organes de la vie végétative. L’anéantissement des nerfs d’une région, par suite de la paralysie des vaisseaux qui en est la conséquence, réduit le mouvement nutritif, mais ne le supprime pas.

Les nerfs sont formés d’une série de tubes contenant une matière pulpeuse et placés les uns à côté des autres. Ces tubes sont, enveloppés dans une gaîne appelée névrilème.

Au point de réunion des racines sensitives et des racines motrices se trouve un renflement grisâtre appartenant exclusivement aux fibres supérieures, appelé ganglion, à peu près de même nature que les nerfs.

Il existe également un grand nombre de ganglions sur tout le trajet des rameaux nerveux destinés aux organes de la vie de nutrition (poumon, estomac, intestin, etc.) ; d’où le nom de nerfs ganglionnaires, nerfs de la vie organique, donné à ces rameaux, pour les distinguer des autres, qui sont dits nerfs de la vie animale ou de relation (fig. 6 du texte).

L’harmonie la plus parfaite doit exister entre le système nerveux, qui commande, et les muscles, qui obéissent. Sans cette condition essentielle, il n’est pas de bon cheval, eût-il du sang d’Eclipse dans les veines.

Nous examinerons ultérieurement les propriétés de l’encéphale et de la mœlle épinière.

(Voy. IIIe partie, Tête.)

f. — Appareils des sécrétions.

Les sécrétions ont pour but d’éliminer du sang certains liquides qui jouent dans l’économie des rôles divers (lait, bile, urine, sperme, etc.).

Les glandes, où se forment ces produits variés, présentent des caractères très différents : les unes ont la forme de sacs clos de toutes parts (vésicules qui contiennent la graisse, ovaires, rate, membranes synoviales) ; d’autres sont en tubes (glandes de l’estomac et de l’intestin, glandes sébacées et sudoripares, reins, etc.). Enfin, il en est qui p. 28participent de la forme des deux variétés précédentes, en ce sens qu’elles sont constituées par des tubes annexés à des vésicules (glandes salivaires, foie, mamelles).

On les divise en glandes fermées (ovaire) et en glandes à conduit excréteur (rein, foie, glandes salivaires, etc.).

Bien que chacune de ces glandes tire du sang des produits ayant une action propre, déterminée, la plupart d’entre elles ne remplissent pas, à proprement parler, de fonctions physiologiques spéciales, indépendantes, en ce sens qu’elles concourent le plus souvent, de concert avec un certain nombre d’autres organes, à l’accomplissement des grandes fonctions de digestion (glandes salivaires, de l’estomac et de l’intestin, foie, rate), de génération (testicules, ovaires, mamelles), de locomotion (membranes synoviales), etc. Aussi, afin de ne pas nous répéter inutilement, passerons-nous exclusivement en revue ici ceux des organes glandulaires non compris dans l’un ou dans l’autre des différents appareils qui composent l’organisme ; encore ne parlerons-nous même pas des glandes thyroïdes, du thymus et des capsules surrénales, dont le rôle est à la fois peu important et mal connu.

1° Sécrétion urinaire. — La sécrétion ou la dépuration urinaire, la plus importante de toutes les sécrétions, a pour objet d’éliminer du sang, avec l’eau excédante et d’autres substances accessoires, les résidus azotés qui proviennent du mouvement vital.

L’appareil à l’aide duquel s’exécute cette fonction comprend : 1° les reins, organes glanduleux situés à droite et à gauche de la région sous-lombaire qui, par une sorte de filtration du liquide sanguin, retiennent les éléments de l’urine ; 2° les uretères, chargés de transporter ce dernier liquide dans la vessie, au fur et à mesure de sa formation ; 3° la vessie, réservoir spécial logé à l’entrée de la cavité pelvienne, où l’urine s’accumule en plus ou moins grande quantité ; 4° le canal de urèthre, par lequel l’urine est expulsée au dehors à des intervalles inégaux (fig. 3 du texte).

(Voy. IIIe partie, Tronc et cavité abdominale.)

2° Sécrétion cutanée. — En outre d’autres propriétés importantes, la peau, grâce à la présence, dans son épaisseur, d’une multitude de glandes (glandes sudoripares et sébacées), jouit de la faculté de produire, soit une vapeur invisible (transpiration insensible), soit p. 29un liquide (transpiration sensible), soit enfin un corps gras, onctueux, la matière sébacée.

La sécrétion cutanée joue un grand rôle dans l’économie, en ce sens qu’elle en expulse certains produits nuisibles. Sa suppression et même sa diminution occasionnent des maladies graves.

3° Sécrétion de la graisse. — La graisse est sécrétée par de petites cellules arrondies, microscopiques, complètement closes, logées dans les mailles du tissu cellulaire (tissu adipeux). Les conditions qui en favorisent la formation dépendent, les unes du sujet, les autres des circonstances hygiéniques dans lesquelles il se trouve placé.

4° Sécrétion ou exhalation de la sérosité cellulaire. — Cette sécrétion a lieu au sein des lamelles et des fibrilles du tissu cellulaire4. Son rôle est de faciliter le déplacement des parties que ce tissu réunit.

L’exhalation de la sérosité cellulaire est surtout manifeste à la face interne de la peau, dans les enveloppes de l’axe encéphalo-rachidien, etc., et d’autant plus abondante que les chevaux sont plus mous, plus lymphatiques. C’est ainsi qu’on voit souvent la partie inférieure des membres s’engorger chez les animaux des pays humides, chez ceux mêmes qui séjournent longtemps dans l’écurie sans prendre d’exercice.

g. — Appareil des sens.

En parlant des nerfs sensibles, nous avons dit qu’ils avaient pour usage principal de transmettre à l’encéphale les excitations provenant de l’extérieur.

Il s’en suit que ces nerfs représentent les instruments essentiels des sensations, et les organes dans lesquels ils se rendent constituent les appareils des sens. Ceux-ci sont au nombre de cinq, savoir : l’appareil du toucher (peau, poils, sabots) ; l’appareil du goût (langue), l’appareil de l’odorat (cavités nasales), l’appareil de l’ouïe (oreilles), et l’appareil de la vue (yeux).

Il nous suffit pour le moment de les énumérer.

p. 30
h. — Appareil de la génération.

La génération est la fonction par laquelle les animaux se reproduisent et propagent les espèces.

« Les individus, dans le règne organique, disent MM. Chauveau et Arloing5, possèdent la faculté de se reproduire et de propager ainsi l’espèce à laquelle ils appartiennent. Dans les animaux mammifères, la génération d’un nouvel être exige le concours de deux individus, l’un mâle et l’autre femelle, qui s’accouplent dans certaines circonstances déterminées. Celle-ci fournit un germe, l’ovule, et le premier une liqueur fécondante, le sperme, qui anime le germe et le rend apte à se développer. »

L’appareil de la génération comprend, en somme, les organes génitaux ou générateurs du mâle et les organes génitaux de la femelle, que nous étudierons plus tard.

(Voir IIIe partie, Tronc et cavité abdominale.)

B. — Membranes limitantes ou tégumentaires (Peau et Muqueuses)

Tous les organes des animaux sont déposés entre deux membranes nommées membranes limitantes ou tégumentaires. Ce sont la peau et les muqueuses, à la description générale desquelles nous allons consacrer ce paragraphe.

1° Peau. — La peau, comme un voile protecteur, enveloppe tout le corps de l’animal et se continue au pourtour des ouvertures naturelles avec le tégument interne ou les membranes muqueuses tapissant les différents organes situés à l’intérieur du corps (on a des exemples de cette continuité de tissus aux ouvertures nasales et à l’anus).

Elle se moule sur les diverses parties du corps et en accuse plus ou moins les saillies et les dépressions.

Chez les chevaux énergiques, à tempérament sanguin ou nerveux, la peau fine laisse parfaitement voir les muscles et les vaisseaux ; sous la moindre tension musculaire, les reliefs s’accentuent, les dépressions se creusent ; de sorte qu’il est presque possible de faire p. 31l’anatomie des régions superficielles du cheval sans recourir au dépècement. Au contraire, chez les chevaux mous, lymphatiques, la peau, plus ou moins épaisse, comble en grande partie les dépressions superficielles, et il est impossible de reconnaître extérieurement la séparation des muscles et des régions.

Il en résulte que la texture, l’aspect général du tégument externe, offrent des renseignements précieux qu’il ne faut point négliger, soit pour s’orienter à la surface du corps et le diviser en régions, soit pour figurer sur la toile les reliefs des muscles ou les plis imprimés à l’enveloppe externe du corps par la répétition constante des mêmes mouvements, soit enfin pour juger de la valeur, de l’énergie du cheval.

La peau se compose du derme et de l’épiderme.

Le derme, partie profonde et principale de la peau, contient dans son épaisseur des vaisseaux, des nerfs, et une multitude de glandes (glandes sudoripares et sébacées) dont nous connaissons les usages. Il adhère au corps d’autant plus intimement qu’on se rapproche plus de la ligne médiane.

Son épaisseur elle-même varie suivant les régions où on l’examine ; le derme est beaucoup plus mince dans les points qui se trouvent naturellement protégés contre les violences extérieures, comme la face interne et le côté de la flexion des membres, l’entre-deux des cuisses, le dessous du ventre, les régions, périnéale, inguinale et axillaire, les bourses, etc. Il est aussi fort peu épais au pourtour des ouvertures naturelles, pour établir une transition insensible entre le tégument interne et le tégument externe. Par contre, il présente son maximum d’épaisseur à la nuque, sur le dos et les lombes, à la face externe des membres et du côté de l’extension. Restent les faces latérales du tronc et les parties inférieures de la tête, dont le revêtement cutané offre une épaisseur moyenne.

Jointes à la connaissance exacte de la situation des parties sous-jacentes (voy. IIIe partie, Structure et fonctions), ces données, nous le répétons, seront d’un utile secours, non seulement pour les chirurgiens, mais encore pour les peintres et les sculpteurs, auxquels elles permettront de reproduire fidèlement les reliefs et les dépressions de la surface du corps.

L’épiderme recouvre le derme à la façon d’un vernis protecteur ; à p. 32sa face interne, on trouve le pigment, matière colorante dont l’absence constitue, à la peau, le ladre, et à l’iris, l’œil vairon.

La peau est recouverte sur toute sa surface, excepté aux ouvertures naturelles, de filaments plus ou moins longs, de nature cornée, appelés poils ; leur finesse indique l’énergie du cheval ; leur brillant et leur solide implantation, tous les signes d’une bonne santé.

Il y a lieu de distinguer, chez le cheval, les crins des poils proprement dits. Ceux-ci sont généralement fins, courts et répandus en une couche continue constituant la robe (voy. IIe partie, Robes). Ceux-là, longs et flottants, n’occupent que certaines parties déterminées de la surface du corps, telles que le sommet de la tête, le bord supérieur de l’encolure, l’appendice caudal, où ils forment le toupet, la crinière et la queue. D’autres poils, enfin, constituent les organes spéciaux connus sous les noms de cils et de tentacules des lèvres.

Chaque poil présente une partie libre ou tige, et une racine renfermée dans une cavité du derme dite follicule pileux ; cette dernière est renflée à sa base et embrasse un petit prolongement conique, la papille ou germe du poil, qui apporte à celui-ci les éléments de son accroissement et de son entretien.

En arrivant à l’extrémité du doigt, l’enveloppe cutanée se modifie : son derme constitue l’enveloppe intérieure du pied (bourrelet, tissus feuilleté et velouté), et son épiderme forme l’enveloppe cornée connue sous le nom de sabot (voy. IIe partie, Pied).

La surface tégumentaire tout entière représente l’organe du toucher, ainsi que nous l’avons dit déjà ; mais cette surface offre, comme chez l’homme, certaines régions privilégiées qui jouent un rôle beaucoup plus actif que les autres dans l’exercice de ce sens : ce sont les quatre extrémités et les lèvres.

La peau joue, en outre, le rôle de surface absorbante. Elle peut absorber les gaz, les solutions salines, diverses matières organiques solubles, même les corps gras. L’absorption de l’oxygène, par exemple, est manifeste, quoiqu’elle ait lieu à un degré très restreint. Sa suppression peut, en effet, causer l’asphyxie, comme on le démontre en goudronnant des chevaux sur toute la surface du corps ; car cette opération entraîne infailliblement la mort. C’est donc un adjuvant de l’appareil pulmonaire.

2° Muqueuses. Les membranes muqueuses, ou tégument interne, p. 33ont une structure analogue à celle de la peau. Elles présentent des papilles, des villosités, des glandes, des vaisseaux, des nerfs, etc., et résultent de la superposition de deux couches : le derme et l’épithélium ou épiderme.

L’absorption y est très active, au moins dans la plupart des cas, ainsi que nous le verrons en étudiant les fonctions des organes tapissés par les muqueuses.

1

On ne distingue que quatre types simples de tissus fondamentaux :
1° Les tissus de substance conjonctive : tissus gélatineux, conjonctif, élastique, osseux.
2° Les tissus de cellules : tissu épithélial proprement dit, et tissu glandulaire.
3° Le tissu musculaire.
4° Le tissu nerveux.

2

Chauveau et Arloing, Traité d’anatomie comparée des animaux domestiques, 3e édition, Paris, 1879, p. 196.  

3

A. Chauveau et S. Arloing, Traité d’anatomie comparée des animaux domestiques, 3e édition, Paris, 1879, p. 564  .

4

On sait que le tissu cellulaire est plus ou moins lâche et formé de filaments entre-croisés circonscrivant des mailles qui contiennent des capillaires et des vésicules adipeuses. Il constitue à chaque organe une enveloppe générale, pénètre dans son intérieur, et détermine la forme de toutes les parties du corps, qu’il sépare ou réunit.

5

Chauveau et Arloing, loc. cit., 3e édition, Paris, 1879, p. 930  .