Première partie
Généralités
Chapitre premier
Caractères zoologiques, races, origine
1° Caractères zoologiques. — Compris en zoologie dans l’ordre des pachydermes (
Le cheval se distingue des autres pachydermes par la conformation de son pied, qui n’est pas divisé au bout et se termine par un doigt unique garni d’un seul sabot ; d’où les dénominations de solipèdes, d’onguiculés, de monodactyles, de sous lesquelles on comprend quelquefois encore les animaux du genre Equus.
Quant aux caractères qui différencient le cheval proprement dit des autres espèces du même genre, ils résident surtout dans la couleur plus uniforme de sa robe, dans sa queue garnie de poils dès sa base, dans sa taille plus grande, et enfin dans la beauté de ses formes.
2° Races. — Comme la plupart des espèces animales, l’Equus Caballus comprend un certain nombre de variétés ou de Races, dont nous dirons quelques mots plus loin (voy. IVe partie, pl. XV et XVI).
3° Origine. — Toutes les races chevalines étaient naguère encore p. 4considérées comme originaires de l’Arabie Heureuse ; mais on sait maintenant que certains peuples, les Aryas1 par exemple, possédaient déjà le cheval à l’état domestique depuis plus de 19,000 ans quand il fut définitivement introduit dans la péninsule Arabique.
D’un autre côté, la paléontologie prouve qu’il existait à peu près partout des représentants de l’Equus Caballus pendant la période quaternaire, c’est-à-dire à une époque remontant à environ 400,000 ans ; que certaines autres espèces du genre Equus, l’Equus fossilis, l’Equus plicidens, etc., etc., vivaient même aux époques tertiaire supérieure et tertiaire moyenne. D’où l’on a pu tirer cette conclusion que le prototype de l’Equus Caballus se rencontrera probablement dans les terrains tertiaires moyens.
Quoi qu’il en soit, on admet en général que, par le fait de certaines causes plus ou moins bien déterminées (phénomènes climatologiques et géologiques, migrations des peuples orientaux, etc.), les races chevalines actuelles de l’Orient et la plupart de celles du midi de l’Europe sont originaires de l’Asie centrale ; tandis que celles de l’Europe occidentale doivent être regardées comme résultant de la domestication sur place des vieilles races autochthones (races allemande, flamande, belge, percheronne, etc.).
Nous reviendrons sur cette question en parlant des races.
Chapitre II
Divisions du cheval
A. — Divisions principales.
Dans le but de simplifier la description du cheval, tant au point de vue de la structure et des fonctions qu’au point de vue de la conformation extérieure, on l’a divisé en un nombre de régions qui varie suivant les auteurs et surtout suivant le but que ceux-ci se proposent en les décrivant.
Les anatomistes reconnaissent deux divisions principales : le tronc p. 5et les membres. Bourgelat, l’illustre fondateur des Écoles Vétérinaires, et avec lui la plupart des hippologues qui se sont occupés de l’extérieur du cheval, ont divisé le corps en avant-main et arrière-main. La première division convient surtout aux descriptions anatomiques ; la seconde, à l’étude des régions extérieures du cheval de selle.
Il s’en suit que, si l’on envisage le cheval à un point de vue spécial, chacune de ces divisions a sa raison d’être et doit être préférée à toute autre. Mais, dans une étude générale du cheval, il est au moins logique d’adopter une division mixte, qui convienne à la fois aux descriptions anatomiques et à l’étude des régions extérieures, que l’on considère le cheval attelé ou monté.
C’est dans le but de satisfaire à toutes ces exigences que nous avons divisé le corps du cheval en tête, corps et membres.
1° Tête. — Située à la partie antérieure du tronc, la tête ne doit pas être seulement envisagée au point de vue de sa structure anatomique, de ses nombreuses et très importantes fonctions physiologiques, mais encore au point de vue de son rôle comme puissance agissant à l’extrémité du bras de levier représenté par l’encolure. Il ne faut pas oublier, d’un autre côté, que la tête comprend des régions excessivement importantes en extérieur et qu’elle est incontestablement la partie du corps qui reflète le mieux l’énergie, l’intelligence et les sensations du cheval.
2° Corps. — Le corps, ou tronc, comprend tout ce qui n’appartient pas aux membres et à la tête. C’est le siège des organes de la digestion, de la respiration, de la circulation, de la reproduction, etc. Aussi, peut-on le considérer comme la région du cheval la plus importante à étudier. Tête et corps sont limités en avant, en arrière, en haut, en bas et sur les côtés, par des plans constituant des faces supérieure, inférieure, latérales et deux extrémités : une antérieure, une postérieure.
Les faces latérales, dans le langage ordinaire, sont quelquefois désignées d’une manière particulière. C’est ainsi que les écuyers nomment souvent montoir le côté gauche, et hors montoir le côté droit.
Les charretiers emploient également des dénominations spéciales qu’il est bon de connaître. Pour eux, le côté gauche est le côté de l’homme, et le côté droit, le côté hors l’homme. Ces expressions ont leur p. 6raison d’être dans la plupart des localités ; mais, dans certaines contrées, en Bretagne, par exemple, elles sont inapplicables, les charretiers y conduisant généralement les chevaux à droite.
Relativement au plan médian, plan fictif, vertical, passant par le milieu du corps qu’il divise, d’avant en arrière, en deux parties égales, les organes compris dans chaque division sont dits impairs ou symétriques quand le plan médian les partage en deux moitiés latérales exactement semblables ; pairs ou asymétrique ?, quand ils sont disposés d’une manière régulière et en double sur les côtés de la ligne médiane, et que leur forme ou leur situation ne permettent pas de les séparer, dans aucun sens, en deux moitiés semblables. Il y a lieu de faire remarquer que la symétrie des organes s’altère à mesure qu’on pénètre à l’intérieur du corps. C’est ainsi que les organes thoraciques et abdominaux sont à la fois asymétriques par leur forme et leur position.
3° Membres. — Les membres, au nombre de quatre, deux antérieurs et deux postérieurs, sont les supports, les colonnes de soutien et les véritables moteurs du corps. Chacun d’eux représente une colonne brisée en plusieurs rayons s’articulant les uns avec les autres, en formant ordinairement des angles plus ou moins ouverts.
Par rapport au plan médian, ces appendices sont symétriquement placés deux à deux de chaque côté de ce plan.
Les membres antérieurs sont attachés à la partie antérieure des faces latérales de la poitrine et parfaitement séparés du tronc.
Les membres postérieurs, au contraire, se confondent insensiblement avec le corps et concourent même à compléter, en arrière, la grande cavité abdominale. Ce n’est qu’à l’aide du scalpel, en sectionnant les parties molles de la racine du membre, qu’on peut se rendre compte de leur indépendance anatomique vis-à-vis du corps.
L’attitude ordinaire du cheval étant la station horizontale, la station quadrupédale, il s’en suit que ses deux paires de membres concourent au soutien et à la progression. S’il peut, presque aussi facilement que l’homme, regarder en face et porter la tête haute, ce n’est donc plus grâce à la verticalité de l’axe de son corps, mais bien par suite de l’attache particulière de sa tête, de la longueur et de la flexibilité de son encolure.
Comme chez l’homme, la privation d’un et même des quatre membres est compatible avec la vie ; mais, pour des raisons économiques p. 7qu’aucune autre considération ne peut, en somme, contrebalancer, on ne conserve guère que dans les laboratoires les animaux ainsi mutilés.
B. — Divisions secondaires. — Régions.
Nous n’avons indiqué, jusqu’ici, que les grandes divisions du cheval. Chacune d’elles est encore subdivisée en régions secondaires dont la connaissance importe autant pour l’étude de la structure et des fonctions que pour celle de la conformation extérieure. Ces régions sont plus ou moins distinctes, difficiles parfois à séparer ; mais elles trouvent toujours leur raison d’être, soit dans la disposition, dans le groupement particulier des organes, soit dans le rôle spécial, l’importance différente que nous leur reconnaissons en extérieur. Chez le cheval, où la conformation extérieure joue un très grand rôle, il est facile de prévoir que ces divisions secondaires seront différentes suivant qu’on l’examinera sous le rapport de la structure ou sous celui de l’extérieur. C’est ainsi que, dans le premier cas, on comprendra dans le tronc, le thorax et l’abdomen, quoique cette séparation des deux régions ne soit légitimée que par un cloisonnement intérieur isolant les viscères thoraciques des viscères abdominaux, et que, dans cette même division principale, les traités d’extérieur distingueront les côtes, le dos, le garrot, le ventre, le poitrail, etc., etc., régions dont la conformation bonne ou mauvaise indique, chez le cheval, telle ou telle qualité, tel ou tel défaut.
Quoi qu’il en soit, nous rappellerons que la configuration même de la partie principale du corps nous permet d’envisager le cheval sous six faces différentes : 1° la face antérieure, qui se présente à l’homme placé vis-à-vis du cheval ; 2° la face postérieure, située dans le sens opposé ; 3° les faces latérales, intermédiaires aux précédentes ; 4° les faces supérieure et inférieure, placées en haut et en bas des faces latérales, qu’elles réunissent l’une à l’autre.
Si même, n’appréciant pas exclusivement la forme, nous voulons nous orienter par rapport à la direction des parties et des organes, nous distinguons l’avant, l’arrière, la droite, la gauche, le haut ou dessus, et le bas ou dessous.
De cette façon, nous pourrons reconnaître chaque région, non seulement par sa situation dans telle ou telle division principale du p. 8corps, mais encore par sa situation à l’une ou à l’autre des faces ci-dessus énumérées.
Nous apprécierons d’autant plus facilement, d’ailleurs, la situation des régions, que nous pourrons nous aider de la symétrie que présentent les deux moitiés du corps.
Chapitre III
Idées générales sur l'organisation du cheval
Si, disséquant l’un après l’autre les différents plans qui constituent l’ensemble de l’organisme, nous pénétrons à l’intérieur du corps du cheval, nous reconnaissons qu’il renferme des liquides et des solides organiques, auxquels s’adjoignent des gaz et quelques substances minérales.
I. — Liquides organiques.
Les liquides contenus dans l’économie représentent les 6/10 du poids du corps. Ils comprennent d’abord le sang ; puis les liquides qui se rendent au sang (chyle, lymphe, etc.), et enfin ceux qui en émanent (lait, bile, synovie, graisse, salive, sueur, sérosité, urine, sperme, etc.).
Leur importance est considérable ; car, sans eux, les solides organiques seraient frappés de mort ; un élément privé d’humidité est un élément privé de vie.
II. — Gaz et matières minérales.
Les gaz et les matières minérales constituent les substances inorganiques du corps.
Les gaz sont représentés par de l’air atmosphérique plus ou moins modifié (cavités nasales, oreilles, sinus, poumons, etc.), ou ils résultent de la fermentation des matières alimentaires dans le tube intestinal. Quelques-uns enfin sont en dissolution dans les liquides animaux.
Les matières minérales se présentent également en dissolution dans ces mêmes liquides, ou à l’état solide. Sous cette dernière forme, on p. 9les rencontre rarement dans les organes sains, mais assez fréquemment dans les organes malades (calculs).
III. — Solides organiques.
Éléments anatomiques, tissus, organes, appareils, fonctions.
1° Éléments anatomiques. — Les solides organiques sont constitués, en dernière analyse, par des éléments plus ou moins volumineux, invisibles à l’œil nu, désignés sous le nom d’éléments anatomiques (granulations, cellules, fibres).
2° Tissus et organes. — Le groupement particulier des éléments anatomiques forme les tissus2 , de même que toute agglomération de tissus ayant une forme déterminée et une fonction à remplir prend le nom d’organe.
Les organes ont été divisés en organes pleins et en organes creux. Parmi les premiers, un certain nombre remplissent le rôle de supports ; tels sont les os. D’autres ont pour mission de produire les mouvements ; ce sont les muscles. Le système nerveux central, les nerfs périphériques, les glandes, appartiennent à ce groupe des organes pleins.
Les organes creux sont généralement tapissés par une membrane tégumentaire interne ou muqueuse ; exemple : le poumon, l’estomac. Les vaisseaux sanguins et lymphatiques, les membranes séreuses, qui revêtent l’intérieur des grandes cavités et la surface externe des organes que ces cavités renferment, font aussi partie des organes creux.
3° Appareils. — L’ensemble de tous les organes qui concourent au même but constitue un appareil. C’est ainsi que les organes immédiatement situés sous la peau, les muscles et les os, forment par leur réunion l’appareil de la locomotion, qui ne peut fonctionner lui-même qu’autant qu’il y est sollicité par un autre ensemble d’appareils dont le but est d’entretenir la vie, d’animer la machine animale (appareils de l’innervation, de la respiration, de la circulation, de la p. 10digestion, de la dépuration urinaire, des sens, et de la reproduction). Comme nous le verrons plus loin, ces appareils se trouvent logés dans des cavités de la tête et du corps, spécialement creusées pour les protéger.
4° Fonctions. — On entend par fonction, l’action d’un organe ou d’un appareil organique. Les fonctions ont été divisées en deux grandes classes : 1° celles relatives à la conservation de l’individu ; 2° celles relatives à la conservation de l’espèce (fonction de génération). Les premières sont subdivisées en fonctions de relation ou de la vie animale (locomotion, innervation, sens), et en fonctions de nutrition ou de la vie organique (digestion, absorption, circulation, respiration, nutrition, sécrétions). Nous examinerons chacune des ces fonctions quand nous étudierons en particulier les organes à l’aide desquels elles s’exécutent.
A. — Appareils organiques dans leur ensemble.
Il nous reste maintenant à esquisser une vue d’ensemble des différents appareils qui concourent à l’exécution des fonctions, afin que le lecteur puisse embrasser, d’un seul coup d’œil, la disposition générale, le groupement particulier des organes composant chacun de ces appareils, et nous suivre sans peine dans nos descriptions ultérieures.
a. — Appareil de la locomotion.
L’appareil de la locomotion a pour but de déplacer le corps de l’animal en totalité (allures), ou de faire mouvoir ses diverses pièces les unes sur les autres (ruade, cabrer) ; il a pour agents les os, réunis par les articulations et les muscles. Nous allons dire un mot de chacun de ces agents.
1° Squelette (Pl. 1, et fig. 1 du texte). — Le squelette, ou charpente intérieure du corps du cheval, est formé par l’ensemble des os considérés dans leurs rapports naturels. Son but est de protéger les organes intérieurs, de supporter la machine animale et de contribuer à ses mouvements.
Chacune des pièces osseuses composant le squelette a reçu un p. 11nom particulier tiré de sa forme (péroné), de sa ressemblance avec des objets connus (tibia), de sa situation (côtes), etc.
D’après la position qu’ils occupent relativement au plan médian du corps, les os sont encore divisés en pairs et impairs.
Enfin, ils sont dits longs, allongés, courts et plats, suivant leur forme.
Les os longs appartiennent exclusivement aux membres et sont seuls creusés d’un canal dit médullaire, dans lequel se trouve une substance molle, graisseuse, appelée mœlle (fémur, humérus, etc.).
Les os allongés diffèrent des précédents en ce qu’ils n’ont pas de canal médullaire.
Les os larges ou plats se rencontrent dans la tête et la partie supérieure des membres (pariétal, omoplate).
Les os courts se trouvent partout où il faut des parties jouissant à la fois d’une grande solidité et d’une certaine mobilité (astragale, deuxième phalange).
La forme générale des os est modifiée par des éminences et des cavités.
Les éminences sont des saillies plus ou moins prononcées qu’on voit à la surface des os. On les a divisées en articulaires et non articulaires ; les premières concourent à former les articulations qui joignent les os entre eux ; les secondes donnent attaches aux tendons et aux ligaments.
Les cavités sont également articulaires ou non articulaires ; les premières répondent aux éminences de même nom dans les jointures osseuses ; les secondes servent au passage des tendons, des vaisseaux, des nerfs, etc.
Les os sont formés d’un tissu propre, entouré à l’extérieur par une membrane particulière, le périoste, et pénétré à l’intérieur par la mœlle, des vaisseaux et des nerfs.
Avant d’arriver à l’état où ils se présentent chez le cheval adulte, les os passent par diverses phases successives. D’abord mous, demi-transparents (état muqueux) dans l’embryon, ils s’imprègnent un peu plus tard de gélatine et deviennent plus résistants (état cartilagineux). Enfin, vers le deuxième mois de la vie intra-utérine, les os se chargent de sels calcaires et acquièrent insensiblement leurs caractères propres. Cette transformation osseuse ne devient toutefois complète que vers cinq ou six ans.
Chez les animaux âgés, les os éprouvent encore des changements importants : le canal médullaire des os longs s’agrandit et leurs parois p. 12p. 13p. 14s’amincissent ; de même, les os larges diminuent d’épaisseur.
Fig. 1. — Squelette du cheval. (Chauveau et Arloing)
Toutes ces particularités expliquent parfaitement pourquoi les jeunes chevaux sont plus sujets que les adultes aux tares osseuses (voy. IIe partie, Tares des membres), pourquoi, d’un autre côté, les os deviennent si fragiles chez les vieux animaux. Elles donnent également la raison de certaines maladies du tissu osseux, telles que le rachitisme, l’ostéomalacie, etc. Caractérisé par un développement incomplet du squelette, le rachitisme est, en effet, dû à ce que la cartilagéine de la vie fœtale ne se transforme pas en osséine. L’ostéomalacie ne diffère du rachitisme qu’en ce que la cause agit chez l’adulte et détruit la solidité déjà établie ; tandis que, dans le rachitisme, le développement du squelette est empêché alors qu’il n’est pas encore terminé.
Le squelette a pour partie centrale, sur laquelle toutes les autres prennent directement ou indirectement leur appui, le rachis ou colonne vertébrale, dont la direction, verticale chez l’homme, est horizontale chez le cheval. Cette longue tige solide et flexible, articulée antérieurement avec la tête avec la (1, 2), se termine postérieurement par les os de la queue ou coccyx (29), et est formée d’une suite d’os courts appelés vertèbres.
Les différences de configuration que ces os présentent dans les divers points du rachis ont permis de diviser celui-ci en cinq régions qui sont, en procédant d’avant en arrière : 4° la région cervicale (7 vertèbres, 2, 2) ; 2° la région dorsale (18 vertèbres, 25) ; 3° la région lombaire (6 vertèbres, 27) ; 4° la région sacrée ou du sacrum (5 vertèbres soudées, 28) ; 5° la région coccygienne (vertèbres en nombre variable, 29).
Les vertèbres sont articulées ensemble, de manière à pouvoir jouer plus ou moins facilement les unes sur les autres ; celles de la région cervicale ou de l’encolure sont les plus mobiles.
Percées chacune d’un trou, d’avant en arrière, elles forment, par leur réunion, un long canal qui loge la mœlle épinière, partie très importante des centres nerveux.
Chaque vertèbre est munie de trois éminences appelées apophyses : deux latérales (apophyses transverses), une supérieure, verticale (apophyse épineuse), surtout marquée dans les régions dorsale et lombaire.
Ces os présentent, en outre, deux extrémités : l’une antérieure, portant une surface arrondie en forme de tête plus ou moins détachée ; l’autre postérieure, creusée d’une cavité destinée à recevoir la tête de la vertèbre suivante.
p. 15D’un côté et de l’autre de la tige rachidienne partent dix-huit grands arcs osseux appelés côtes (30), s’articulant supérieurement avec les vertèbres dorsales, inférieurement avec le sternum (31), et constituant une sorte de cage appelée thorax (3), ouverte en avant et en arrière.
Postérieurement, articulé avec le sacrum, se trouve un os pair, composé de plusieurs parties, le coxal (55), qui, accolé à celui du côté opposé, forme la cavité pelvienne ou du bassin.
Toutes ces pièces osseuses sont supportées par quatre colonnes appelées membres, dont deux antérieurs (4) et deux postérieurs (5), constitués chacun par un certain nombre d’os affectant généralement une direction oblique les uns par rapport aux autres.
p. 19Il est à remarquer que si cette disposition angulaire n’est pas aussi favorable à la solidité que la superposition verticale, elle a du moins l’avantage d’amortir les réactions du sol contre le corps. Il ne suffisait pas, en effet, que les colonnes des membres eussent la rigidité nécessaire pour supporter le poids de l’animal ; il fallait encore que les secousses imprimées au corps, aux articulations, lors des allures rapides surtout, ne produisissent pas des ébranlements trop considérables. Sans cette brisure des rayons osseux, non seulement le cheval se fût usé rapidement, mais il eût été impossible de le monter.
Nous savons tous, par expérience personnelle, que lorsque nous faisons un saut, nous devons retomber sur la pointe des pieds sous peine d’un ébranlement douloureux et même d’accidents graves. Si ce sont, en effet, les talons qui portent les premiers, la réaction du sol est transmise intégralement au tronc par la ligne verticale des os de la jambe et de la cuisse superposés, et nous ressentons une secousse des plus pénibles. Cet exemple donne à lui seul la démonstration de l’utilité, de la nécessité même, des angles formés par les rayons des membres.
Les réactions ne sont pas les mêmes, d’ailleurs, dans les membres antérieurs et dans les membres postérieurs. Par suite de la disposition particulière des premiers, dont les rayons supérieurs ou scapulaires, non articulés avec le tronc, mais simplement réunis à cette région par des attaches musculaires solides, forment une espèce de soupente pour la cage thoracique, les réactions, chez eux, sont plus faibles que dans les membres postérieurs, articulés directement sur la partie postérieure p. 16du rachis par l’intermédiaire des os coxaux, qui en constituent anatomiquement les premiers rayons.
Cette dernière disposition était nécessaire pour que les membres postérieurs pussent intégralement transmettre l’impulsion à la colonne vertébrale et, par suite, aux membres antérieurs.
Chez le cheval adulte, on compte 189 os.
2° Articulations. — Les différentes pièces osseuses qui constituent la charpente solide du cheval sont unies entre elles de manière à pouvoir jouer les unes sur les autres. De cette réunion résultent les articulations ou jointures articulaires.
Toute articulation est donc essentiellement formée de deux surfaces osseuses opposées, moulées l’une sur l’autre. Celles-ci sont plus ou moins contiguës, plus ou moins mobiles, et les articulations qui en résultent ont reçu, par ce fait même, différentes dénominations. C’est ainsi qu’on distingue trois genres différents de jointures articulaires : les diarthroses ou articulations mobiles (Ex. : articulation coxo-fémorale) ; les synarthroses ou articulations immobiles (Ex. : articulation des os de la tête) ; les amphiarthroses ou articulations mixtes (Ex. : articulation des vertèbres entre elles).
Dans la plupart des articulations, les extrémités articulaires sont réunies par un certain nombre de ligaments, les uns funiculaires, les autres membraniformes ou capsulaires ; ces derniers entourent souvent les articulations de toutes parts, à la manière d’un manchon. Leurs surfaces contiguës sont, en outre, revêtues de lames cartilagineuses dites cartilages d’encroûtement, dont la face libre se distingue par un brillant et un poli remarquables. La présence de ces cartilages dans les articulations mobiles est de la dernière nécessité ; ils favorisent, en effet, le jeu des pièces osseuses, s’opposent à leur usure, et amortissent les secousses violentes par leur élasticité.
Enfin, chaque articulation mobile est pourvue de capsules synoviales, membranes fort minces sécrétant la synovie, fluide visqueux dont le rôle, dans l’économie animale, est absolument identique à celui des corps gras employés pour graisser les rouages de nos machines.
Les mouvements dont les diarthroses peuvent être le siège sont : le glissement simple, la flexion, l’extension, l’adduction, l’abduction, la circumduction et la rotation.
Les articulations jouent un très grand rôle dans le fonctionnement p. 17général de la machine animale, surtout quand celle-ci est destinée au travail. Des jointures faibles ne permettraient ni l’étendue ni la puissance des mouvements qui déterminent l’effet utile chez le moteur en action. Aussi, le volume des articulations est-il toujours un indice de force.
L’inflammation des jointures articulaires, ou arthrite, est très grave. Elle peut être le résultat d’une irritation directe (coup de pied, chute, etc.) ou survenir comme complication d’une maladie viscérale grave (pneumonie, pleurésie, etc.). Enfin, on la voit souvent apparaître d’emblée chez les jeunes animaux.
3° Muscles. — Les muscles sont des organes fibreux jouissant de la propriété de se contracter sous l’action d’un stimulant. Chargés de mouvoir les leviers osseux et de faciliter la contraction des organes internes, ils donnent aussi au corps de l’animal sa forme générale, en remplissant les vides et en effaçant les parties trop saillantes du squelette. Enfin, établis dans certains cas en larges couches, ils forment aux cavités des parois actives (Ex. : muscle grand oblique ou oblique externe de l’abdomen).
On distingue des muscles lisses, intérieurs, ou muscles de la vie organique, et des muscles striés, extérieurs, ou muscles de la vie animale. Les premiers appartiennent aux organes de la vie végétative (plans musculaires de l’estomac, de l’intestin, etc.), et sont soustraits à l’influence de la volonté. Les seconds diffèrent des premiers en ce sens que leur pouvoir contractile — le tissu charnu du cœur excepté — est immédiatement placé sous l’influence de la volonté ; aussi, la section du nerf moteur qui se rend à un muscle strié, ou toute autre cause susceptible d’enrayer l’action de ce muscle, frappe-t-elle de paralysie la région musculaire ainsi soustraite à l’influence nerveuse.
Ce sont les muscles striés surtout qu’il importe pour nous de connaître, en ce sens qu’ils forment la plus grande partie de la masse du corps.
Muscles striés ou extérieurs (fig. 2 du texte). — Ces muscles, au nombre de 463 chez le cheval, d’après Rigot, ont reçu, comme les os, des noms particuliers rappelant, ou leurs usages, ou leur position, ou leur forme.
On les a, en outre, divisés en larges, longs et courts ; en droits, obliques, transverses et circulaires ; en pairs et impairs, suivant leur p. 18forme, leur direction et leur situation par rapport au plan médian du corps.
Fig. 2. — Vue générale des muscles superficiels.
Chaque muscle a une attache fixe ou d’origine et une attache mobile ; la première répond au point du muscle qui reste le plus habituellement fixe pendant les contractions ; la seconde, au levier déplacé par celles-ci.
Ces attaches ont généralement lieu par l’intermédiaire de tendons ou d’aponévroses.
Les tendons sont des cordons fibreux d’un blanc nacré, arrondis ou aplatis, très résistants, fixés sur les extrémités des muscles longs.
Les aponévroses, au contraire, appartiennent aux muscles larges et sont plus larges, moins épaisses que les tendons.
Il entre dans la structure des muscles du tissu musculaire proprement dit, du tissu conjonctif sous la forme de lamelles délicates, d’aponévroses ou de tendons ; enfin, des vaisseaux et des nerfs.
Contraction musculaire. — Les muscles, avons-nous dit, mettent en jeu la machine animale sous l’influence du système nerveux, qui les fait entrer en contraction. Il nous reste maintenant à analyser les phénomènes physiques qui accompagnent l’action musculaire.
Quand un muscle se contracte, il se raccourcit. Ses deux extrémités se rapprochent si elles sont libres, ou l’une d’elles seulement va à la rencontre de l’autre, si celle-ci est fixe ; mais, dans tous les cas, il y a production d’un mouvement.
La contraction musculaire ne peut s’exécuter en permanence. Un muscle doit forcément avoir des intermittences de repos, sous peine d’être bien vite hors d’état de remplir ses fonctions. C’est pourquoi, d’ailleurs, dans les régions où l’action des muscles est incessante, la nature a placé des ligaments élastiques qui leur viennent en aide (ligament cervical, tunique abdominale, ligament suspenseur du boulet).
Les muscles, en somme, jouissent tous de la faculté de se contracter ; mais la force et l’étendue de leurs contractions varient suivant qu’ils sont entièrement libres ou qu’ils ont une résistance à vaincre, suivant la longueur des fibres musculaires, etc. — « On fixe la limite moyenne de l’étendue du raccourcissement d’un muscle au quart environ de ses fibres musculaires, disent MM. Chauveau et Arloing3 . ,
p. 20D’après cela, on conçoit que le mouvement engendré par la contraction d’un muscle sera d’autant plus grand que ses fibres seront plus longues. Du reste, dans cette appréciation, il faut tenir compte de la densité et de l’énergie de la fibre, ainsi que de l’intensité du stimulant de la contractilité. »
Fig. 3. — Vue générale des appareils de la digestion et de la sécrétion urinaire.
b. — Appareil de la digestion.
La digestion est la fonction à l’aide de laquelle les animaux extraient des aliments et des boissons introduits dans l’économie, les principes dont ils ont besoin pour l’entretien et la réparation de leurs organes.
L’appareil dans lequel s’opère ce travail de préparation et d’absorption des produits organisables est l’appareil digestif, long tube composé d’une suite de cavités renflées ou tubuliformes, qui se succèdent d’avant en arrière dans l’ordre suivant : la bouche, l’arrière-bouche, l’œsophage, l’estomac, et l’intestin (intestin grêle et gros intestin).
Chacune de ces divisions du tube digestif est pourvue, sur son trajet, d’organes annexes qui sont : les glandes salivaires, le foie, le pancréas et la rate.
La bouche, l’arrière-bouche et les glandes salivaires sont logées sous la mâchoire supérieure et la base du crâne ; l’œsophage, sous la portion cervico-thoracique de la colonne vertébrale ; l’estomac, l’intestin, le foie, le pancréas et la rate, dans la grande cavité abdominale (fig. 3 du texte).
c. — Appareil de la respiration.
La respiration est la fonction par laquelle l’air introduit dans les voies respiratoires abandonne une partie de son oxygène au sang veineux, et en sort chargé d’un excès d’acide carbonique.
Cette absorption spéciale, qui a pour effet de transformer le sang veineux en sang artériel, s’effectue dans le poumon, organe spongieux creusé d’une foule de petites cavités dites vésicules pulmonaires, dont les minces parois, traversées par une multitude de vaisseaux capillaires, permettent à l’air atmosphérique de céder son oxygène au sang qui circule dans ces capillaires, et au fluide sanguin de se débarrasser de son excès d’acide carbonique.
Le poumon se trouve logé dans la cavité thoracique, dont il suit les mouvements alternatifs de dilatation et de resserrement, c’est-à-dire d’inspiration et d’expiration.
p. 22Il est en communication avec l’air extérieur par deux séries de canaux se faisant suite :
1° Un tube impair comprenant le larynx, qui le commence, la trachée, qui en forme le corps ou la partie moyenne, et les bronches, qui le terminent.
Fig. 4. — Vue générale de l’appareil de la respiration.
2° Les cavités nasales, fosses paires qui aboutissent dans le pharynx, p. 23ou arrière-bouche, et commencent par deux orifices, les naseaux, percés à l’extrémité antérieure de la tête.
À chaque mouvement d’inspiration, la poitrine s’agrandit, le vide se fait dans le poumon, et une certaine quantité d’air s’y introduit ; immédiatement après, les côtes soulevées s’abaissent, compriment le poumon, et l’air en est expulsé (expiration).
Pendant ce temps, les phénomènes chimiques qui constituent l’essence même de la respiration, et dont nous avons dit un mot au début, ont eu le temps de s’accomplir (fig. 4 du texte).
d. — Appareil de la circulation.
L’économie animale est incessamment parcourue par des fluides, au nombre de deux : le sang et la lymphe. Ces fluides circulent dans des vaisseaux formés par des membranes élastiques et contractiles disposées en canaux. On distingue des vaisseaux veineux ou veines, des vaisseaux artériels ou artères, et des vaisseaux lymphatiques.
Les vaisseaux veineux et artériels charrient du sang noir ou rouge ; les vaisseaux lymphatiques charrient de la lymphe ou sang blanc, qu’ils puisent au sein de la plupart des organes.
Dans les veines, le sang est noir et coule de la périphérie vers un organe central, le cœur ; dans les artères, au contraire, le sang est rouge et coule du centre vers la périphérie.
Quand on sectionne un vaisseau sanguin, on reconnaît si l’on a affaire à une veine ou à une artère, non seulement par la couleur et la direction différentes du liquide sanguin ; mais encore à cette particularité que le sang veineux coule lentement du vaisseau sectionné, tandis que le sang artériel s’en échappe avec force, formant un jet plus ou moins vigoureux.
Les artères se terminent dans l’épaisseur des tissus par des ramuscules fort ténus et très nombreux s’anastomosant entre eux pour se reconstituer de proche en proche en rameaux de plus en plus considérables et donner naissance aux veines. L’ensemble de ces vaisseaux microscopiques, intermédiaires aux veines et aux artères, constitue le système capillaire.
« L’appareil de la circulation comprend donc : 1° le cœur, organe p. 24central préposé à l’impulsion du sang ; 2° un système de vaisseaux centrifuges, les artères, qui, du cœur, portent le sang dans les p. 25organes ; 3° un système de vaisseaux centripètes, les veines, qui ramènent au cœur le fluide nourricier ; 4° les lymphatiques, système centripète accessoire, chargé d’apporter la lymphe dans le cercle vasculaire sanguin4 (fig. 5 du texte). » (Voy. IIIe partie. Tronc et cavité thoracique.)
Fig. 5. — Vue générale de l’appareil de la circulation.
e. — Appareil de l'innervation.
L’appareil de l’innervation comprend une partie centrale logée dans le canal rachidien (axe encéphalo-rachidien, constitué par l’encéphale et la mœlle épinière), et une partie périphérique représentée par une double série de branches qui s’échappent latéralement de la tige centrale et vont se distribuer dans toutes les parties du corps. Ces branches constituent les nerfs.
Ce sont des cordons conducteurs qui, fonctionnant un peu à la manière des fils télégraphiques, transmettent des parties aux centres (racines supérieures, à conductibilité centripète) les sensations perçues, et du centre aux organes du mouvement (racines inférieures, à conductibilité centrifuge) les ordres d’agir. C’est ainsi que, dans la digestion, par exemple, l’excitation exercée par les aliments sur les fibres nerveuses du tube intestinal, à conductibilité centripète, est transmise par ces fibres à l’axe médullaire, puis réfléchie sur les fibres à conductibilité centrifuge, et ramenée par elles dans l’estomac, dont elle met en jeu les propriétés spéciales.
En résumé, tous les nerfs prennent leur origine sur l’axe encéphalorachidien par deux catégories de radicules : les unes, supérieures, constituent les racines sensitives ; les autres, inférieures, constituent les racines motrices. Quelques nerfs seulement ne comprennent qu’une seule espèce de fibres, et ces nerfs appartiennent tous à l’encéphale.
À leur sortie du conduit osseux qui leur livre passage, les racines supérieures et les racines inférieures se réunissent généralement en à un gros tronc commun qui conserve ses propriétés tant qu’il est en communication avec les centres ; mais, si on le coupe dans un point de sa longueur, le bout communiquant avec l’axe spinal reste seul avec ses caractères ; la partie périphérique dégénère et devient p. 26impropre à conduire les impressions sensitives ou à transmettre les excitations motrices volontaires. C’est sur cette particularité qu’est basée la névrotomie plantaire, opération consistant dans la section du cordon nerveux qui se rend au point douloureux du pied et cause sa p. 27sensibilité. Par suite de cette opération la douleur disparaît et le cheval cesse de boiter.
Fig. 6. —Vue générale de l’appareil de l’innervation.
Il y a lieu de faire remarquer que le système nerveux n’agit pas directement dans les actes de la nutrition, bien qu’il ait une action importante sur les organes de la vie végétative. L’anéantissement des nerfs d’une région, par suite de la paralysie des vaisseaux qui en est la conséquence, réduit le mouvement nutritif, mais ne le supprime pas.
Les nerfs sont formés d’une série de tubes contenant une matière pulpeuse et placés les uns à côté des autres. Ces tubes sont, enveloppés dans une gaîne appelée névrilème.
Au point de réunion des racines sensitives et des racines motrices se trouve un renflement grisâtre appartenant exclusivement aux fibres supérieures, appelé ganglion, à peu près de même nature que les nerfs.
Il existe également un grand nombre de ganglions sur tout le trajet des rameaux nerveux destinés aux organes de la vie de nutrition (poumon, estomac, intestin, etc.) ; d’où le nom de nerfs ganglionnaires, nerfs de la vie organique, donné à ces rameaux, pour les distinguer des autres, qui sont dits nerfs de la vie animale ou de relation (fig. 6 du texte).
L’harmonie la plus parfaite doit exister entre le système nerveux, qui commande, et les muscles, qui obéissent. Sans cette condition essentielle, il n’est pas de bon cheval, eût-il du sang d’Eclipse dans les veines.
Nous examinerons ultérieurement les propriétés de l’encéphale et de la mœlle épinière.
f. — Appareils des sécrétions.
Les sécrétions ont pour but d’éliminer du sang certains liquides qui jouent dans l’économie des rôles divers (lait, bile, urine, sperme, etc.).
Les glandes, où se forment ces produits variés, présentent des caractères très différents : les unes ont la forme de sacs clos de toutes parts (vésicules qui contiennent la graisse, ovaires, rate, membranes synoviales) ; d’autres sont en tubes (glandes de l’estomac et de l’intestin, glandes sébacées et sudoripares, reins, etc.). Enfin, il en est qui p. 28participent de la forme des deux variétés précédentes, en ce sens qu’elles sont constituées par des tubes annexés à des vésicules (glandes salivaires, foie, mamelles).
On les divise en glandes fermées (ovaire) et en glandes à conduit excréteur (rein, foie, glandes salivaires, etc.).
Bien que chacune de ces glandes tire du sang des produits ayant une action propre, déterminée, la plupart d’entre elles ne remplissent pas, à proprement parler, de fonctions physiologiques spéciales, indépendantes, en ce sens qu’elles concourent le plus souvent, de concert avec un certain nombre d’autres organes, à l’accomplissement des grandes fonctions de digestion (glandes salivaires, de l’estomac et de l’intestin, foie, rate), de génération (testicules, ovaires, mamelles), de locomotion (membranes synoviales), etc. Aussi, afin de ne pas nous répéter inutilement, passerons-nous exclusivement en revue ici ceux des organes glandulaires non compris dans l’un ou dans l’autre des différents appareils qui composent l’organisme ; encore ne parlerons-nous même pas des glandes thyroïdes, du thymus et des capsules surrénales, dont le rôle est à la fois peu important et mal connu.
1° Sécrétion urinaire. — La sécrétion ou la dépuration urinaire, la plus importante de toutes les sécrétions, a pour objet d’éliminer du sang, avec l’eau excédante et d’autres substances accessoires, les résidus azotés qui proviennent du mouvement vital.
L’appareil à l’aide duquel s’exécute cette fonction comprend : 1° les reins, organes glanduleux situés à droite et à gauche de la région sous-lombaire qui, par une sorte de filtration du liquide sanguin, retiennent les éléments de l’urine ; 2° les uretères, chargés de transporter ce dernier liquide dans la vessie, au fur et à mesure de sa formation ; 3° la vessie, réservoir spécial logé à l’entrée de la cavité pelvienne, où l’urine s’accumule en plus ou moins grande quantité ; 4° le canal de urèthre, par lequel l’urine est expulsée au dehors à des intervalles inégaux (fig. 3 du texte).
(Voy. IIIe partie, Tronc et cavité abdominale.)
2° Sécrétion cutanée. — En outre d’autres propriétés importantes, la peau, grâce à la présence, dans son épaisseur, d’une multitude de glandes (glandes sudoripares et sébacées), jouit de la faculté de produire, soit une vapeur invisible (transpiration insensible), soit p. 29un liquide (transpiration sensible), soit enfin un corps gras, onctueux, la matière sébacée.
La sécrétion cutanée joue un grand rôle dans l’économie, en ce sens qu’elle en expulse certains produits nuisibles. Sa suppression et même sa diminution occasionnent des maladies graves.
3° Sécrétion de la graisse. — La graisse est sécrétée par de petites cellules arrondies, microscopiques, complètement closes, logées dans les mailles du tissu cellulaire (tissu adipeux). Les conditions qui en favorisent la formation dépendent, les unes du sujet, les autres des circonstances hygiéniques dans lesquelles il se trouve placé.
4° Sécrétion ou exhalation de la sérosité cellulaire. — Cette sécrétion a lieu au sein des lamelles et des fibrilles du tissu cellulaire5 . Son rôle est de faciliter le déplacement des parties que ce tissu réunit.
L’exhalation de la sérosité cellulaire est surtout manifeste à la face interne de la peau, dans les enveloppes de l’axe encéphalo-rachidien, etc., et d’autant plus abondante que les chevaux sont plus mous, plus lymphatiques. C’est ainsi qu’on voit souvent la partie inférieure des membres s’engorger chez les animaux des pays humides, chez ceux mêmes qui séjournent longtemps dans l’écurie sans prendre d’exercice.
g. — Appareil des sens.
En parlant des nerfs sensibles, nous avons dit qu’ils avaient pour usage principal de transmettre à l’encéphale les excitations provenant de l’extérieur.
Il s’en suit que ces nerfs représentent les instruments essentiels des sensations, et les organes dans lesquels ils se rendent constituent les appareils des sens. Ceux-ci sont au nombre de cinq, savoir : l’appareil du toucher (peau, poils, sabots) ; l’appareil du goût (langue), l’appareil de l’odorat (cavités nasales), l’appareil de l’ouïe (oreilles), et l’appareil de la vue (yeux).
Il nous suffit pour le moment de les énumérer.
h. — Appareil de la génération.
La génération est la fonction par laquelle les animaux se reproduisent et propagent les espèces.
« Les individus, dans le règne organique, disent MM. Chauveau et Arloing6 , possèdent la faculté de se reproduire et de propager ainsi l’espèce à laquelle ils appartiennent. Dans les animaux mammifères, la génération d’un nouvel être exige le concours de deux individus, l’un mâle et l’autre femelle, qui s’accouplent dans certaines circonstances déterminées. Celle-ci fournit un germe, l’ovule, et le premier une liqueur fécondante, le sperme, qui anime le germe et le rend apte à se développer. »
L’appareil de la génération comprend, en somme, les organes génitaux ou générateurs du mâle et les organes génitaux de la femelle, que nous étudierons plus tard.
B. — Membranes limitantes ou tégumentaires (Peau et Muqueuses)
Tous les organes des animaux sont déposés entre deux membranes nommées membranes limitantes ou tégumentaires. Ce sont la peau et les muqueuses, à la description générale desquelles nous allons consacrer ce paragraphe.
1° Peau. — La peau, comme un voile protecteur, enveloppe tout le corps de l’animal et se continue au pourtour des ouvertures naturelles avec le tégument interne ou les membranes muqueuses tapissant les différents organes situés à l’intérieur du corps (on a des exemples de cette continuité de tissus aux ouvertures nasales et à l’anus).
Elle se moule sur les diverses parties du corps et en accuse plus ou moins les saillies et les dépressions.
Chez les chevaux énergiques, à tempérament sanguin ou nerveux, la peau fine laisse parfaitement voir les muscles et les vaisseaux ; sous la moindre tension musculaire, les reliefs s’accentuent, les dépressions se creusent ; de sorte qu’il est presque possible de faire p. 31l’anatomie des régions superficielles du cheval sans recourir au dépècement. Au contraire, chez les chevaux mous, lymphatiques, la peau, plus ou moins épaisse, comble en grande partie les dépressions superficielles, et il est impossible de reconnaître extérieurement la séparation des muscles et des régions.
Il en résulte que la texture, l’aspect général du tégument externe, offrent des renseignements précieux qu’il ne faut point négliger, soit pour s’orienter à la surface du corps et le diviser en régions, soit pour figurer sur la toile les reliefs des muscles ou les plis imprimés à l’enveloppe externe du corps par la répétition constante des mêmes mouvements, soit enfin pour juger de la valeur, de l’énergie du cheval.
La peau se compose du derme et de l’épiderme.
Le derme, partie profonde et principale de la peau, contient dans son épaisseur des vaisseaux, des nerfs, et une multitude de glandes (glandes sudoripares et sébacées) dont nous connaissons les usages. Il adhère au corps d’autant plus intimement qu’on se rapproche plus de la ligne médiane.
Son épaisseur elle-même varie suivant les régions où on l’examine ; le derme est beaucoup plus mince dans les points qui se trouvent naturellement protégés contre les violences extérieures, comme la face interne et le côté de la flexion des membres, l’entre-deux des cuisses, le dessous du ventre, les régions, périnéale, inguinale et axillaire, les bourses, etc. Il est aussi fort peu épais au pourtour des ouvertures naturelles, pour établir une transition insensible entre le tégument interne et le tégument externe. Par contre, il présente son maximum d’épaisseur à la nuque, sur le dos et les lombes, à la face externe des membres et du côté de l’extension. Restent les faces latérales du tronc et les parties inférieures de la tête, dont le revêtement cutané offre une épaisseur moyenne.
Jointes à la connaissance exacte de la situation des parties sous-jacentes (voy. IIIe partie, Structure et fonctions), ces données, nous le répétons, seront d’un utile secours, non seulement pour les chirurgiens, mais encore pour les peintres et les sculpteurs, auxquels elles permettront de reproduire fidèlement les reliefs et les dépressions de la surface du corps.
L’épiderme recouvre le derme à la façon d’un vernis protecteur ; à p. 32sa face interne, on trouve le pigment, matière colorante dont l’absence constitue, à la peau, le ladre, et à l’iris, l’œil vairon.
La peau est recouverte sur toute sa surface, excepté aux ouvertures naturelles, de filaments plus ou moins longs, de nature cornée, appelés poils ; leur finesse indique l’énergie du cheval ; leur brillant et leur solide implantation, tous les signes d’une bonne santé.
Il y a lieu de distinguer, chez le cheval, les crins des poils proprement dits. Ceux-ci sont généralement fins, courts et répandus en une couche continue constituant la robe (voy. IIe partie, Robes). Ceux-là, longs et flottants, n’occupent que certaines parties déterminées de la surface du corps, telles que le sommet de la tête, le bord supérieur de l’encolure, l’appendice caudal, où ils forment le toupet, la crinière et la queue. D’autres poils, enfin, constituent les organes spéciaux connus sous les noms de cils et de tentacules des lèvres.
Chaque poil présente une partie libre ou tige, et une racine renfermée dans une cavité du derme dite follicule pileux ; cette dernière est renflée à sa base et embrasse un petit prolongement conique, la papille ou germe du poil, qui apporte à celui-ci les éléments de son accroissement et de son entretien.
En arrivant à l’extrémité du doigt, l’enveloppe cutanée se modifie : son derme constitue l’enveloppe intérieure du pied (bourrelet, tissus feuilleté et velouté), et son épiderme forme l’enveloppe cornée connue sous le nom de sabot (voy. IIe partie, Pied).
La surface tégumentaire tout entière représente l’organe du toucher, ainsi que nous l’avons dit déjà ; mais cette surface offre, comme chez l’homme, certaines régions privilégiées qui jouent un rôle beaucoup plus actif que les autres dans l’exercice de ce sens : ce sont les quatre extrémités et les lèvres.
La peau joue, en outre, le rôle de surface absorbante. Elle peut absorber les gaz, les solutions salines, diverses matières organiques solubles, même les corps gras. L’absorption de l’oxygène, par exemple, est manifeste, quoiqu’elle ait lieu à un degré très restreint. Sa suppression peut, en effet, causer l’asphyxie, comme on le démontre en goudronnant des chevaux sur toute la surface du corps ; car cette opération entraîne infailliblement la mort. C’est donc un adjuvant de l’appareil pulmonaire.
2° Muqueuses. — Les membranes muqueuses, ou tégument interne, p. 33ont une structure analogue à celle de la peau. Elles présentent des papilles, des villosités, des glandes, des vaisseaux, des nerfs, etc., et résultent de la superposition de deux couches : le derme et l’épithélium ou épiderme.
L’absorption y est très active, au moins dans la plupart des cas, ainsi que nous le verrons en étudiant les fonctions des organes tapissés par les muqueuses.
Chapitre IV
Conformations anormales
Maintenant que nous connaissons l’organisation générale du cheval construit d’après le type spécifique ou normal, il nous reste à dire un mot des quelques cas de conformations anormales qu’on rencontre exceptionnellement chez certains sujets.
Nous entendons par conformation anormale toute dérogation aux conditions ordinaires de la structure du corps. Aussi, examinerons-nous sous ce titre les anomalies, les vices de conformation, les monstruosités, les mauvaises conformations, les déformations et les hermaphrodismes.
1° Anomalies. — Bien que, scientifiquement, le mot anomalie soit pris comme synonyme de vice de conformation, de monstruosité, on le réserve d’ordinaire pour désigner tout ce qui s’éloigne de la règle, qui est contraire à l’ordre naturel, sans toutefois modifier sensiblement la forme extérieure du corps, sans même apporter aucun trouble dans ses fonctions.
En physiologie, il y a anomalie quand les phénomènes ne suivent pas les lois connues. La digestion de la viande par le cheval, animal herbivore, constitue un exemple, non absolument rare, d’anomalie physiologique.
En anatomie, on donne le nom d’anomalie à tout ce qui s’éloigne du type commun à l’âge, à l’espèce, au sexe. Elle consiste généralement alors en un changement dans le nombre ou la position de certains organes. Telle l’augmentation ou la diminution du nombre des vertèbres et des côtes ; la présence d’un muscle dans une région où p. 34on ne le rencontre pas d’ordinaire ; la persistance de la cavité dentaire extérieure sur la surface de frottement, à une époque où elle aurait dû disparaître (voy. IIe partie, Âge, Cheval bégu) ; la présence de cornes rudimentaires chez certains chevaux, etc., etc.
2° Vices de conformation. — L’anomalie prend plus particulièrement le nom de vice de conformation quand l’organisation est affectée d’une manière profonde. Nous signalerons comme exemples de vices de conformation : l’atrophie de la vessie ; la non-perforation de l’anus, de la vulve ; l’adhérence de la langue à la face interne de la joue, comme nous avons eu l’occasion d’en observer un cas tout récemment à l’autopsie d’un poulain de pur sang anglais qui, n’ayant pu téter sa mère par suite de ce vice de conformation, dont on n’avait pas soupçonné l’existence durant sa vie, était mort de faim peu de temps après sa naissance.
3° Monstruosités. — Nous appliquerons spécialement le mot monstruosité aux déformations les plus considérables qu’apporte l’animal en naissant, et qui lui donnent un aspect hideux ou bizarre (monstre).
Dans l’antiquité, l’apparition d’un monstre était regardée comme un signe de la colère des dieux, et les populations s’en affligeaient comme d’une calamité. À Athènes et à Rome, on faisait des prières publiques lorsqu’il naissait des enfants difformes. Il y a peu de temps encore, chez nous, la naissance d’un monstre était considérée comme un mauvais présage et attribuée à l’influence des astres, des sorciers, du démon, etc.
La plupart des médecins et des naturalistes ne voyaient eux-mêmes dans les monstres que des jeux de la nature, des êtres affranchis de toute règle et de toute loi. Ce n’est que vers la fin du dix-huitième siècle et au commencement de celui-ci que la vérité s’est fait jour sur la nature de ces êtres, qui sont généralement regardés aujourd’hui comme résultant d’un arrêt de développement, d’une altération quelconque que le nouvel animal éprouve dans le sein de sa mère par suite de chute, de coup, d’impression morale violente, de l’influence de la vue d’objets qui frappent l’imagination, de l’hérédité, de la grande différence de taille des reproducteurs, etc., etc.
Comme on constate, d’un autre côté, que les monstres n’échappent pas aux lois générales de l’organisation, que la plupart représentent, p. 35d’une manière plus ou moins parfaite, l’état normal des animaux des classes inférieures, les naturalistes, entre autres Buffon, Meckel, Martin Saint-Ange, Etienne Geoffroy Saint-Hilaire et plus tard son fils Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, etc., en ont fait une classification à part.
C’est ainsi qu’Isidore Geoffroy Saint-Hilaire divise les monstres en deux classes : les monstres simples ou unitaires, et les monstres composés, doubles ou triples.
Chaque classe comprend plusieurs ordres renfermant un certain nombre de familles.
Comme exemples de monstres simples, nous citerons ceux chez lesquels il y a avortement plus ou moins complet des membres (ectromêliens), réunion des membres (syméliens), etc.
Parmi les monstres doubles, on peut signaler les bicéphaliens, qui présentent deux têtes sur un ou sur deux corps ; les monocéphaliens, dont les corps, tantôt séparés, tantôt réunis, sont surmontés d’une tête unique et simple ; les polyméliens, où il y a tête et corps uniques avec membres surnuméraires : tel ce cheval didactyle sauvage que l’on faisait voir à Paris, il y a quelques années, et qui présentait, à chaque membre, un doigt supplémentaire parfaitement développé.
Certaines monstruosités, enfin, peuvent être dues à des maladies du fœtus (rachitisme, ankylose, hydrocéphalie, etc.).
Quoique l’on ne conserve généralement pas les chevaux présentant une des anomalies précédentes, il y a lieu de supposer que les monstruosités sont héréditaires chez ces animaux, comme elles le sont chez l’homme, le chien, etc.
La plupart du temps, surtout en vétérinaire, où il ne suffit pas de conserver la vie à l’individu, mais où il faut le rendre propre à un service, on n’a pas de bons résultats à espérer de l’opération, et il vaut mieux immédiatement faire le sacrifice du sujet.
4° Mauvaises conformations. — On doit entendre par mauvaise conformation, chez le cheval, toute conformation indiquant un manque de force, de vigueur, d’énergie (voy. IIe partie, Notions préliminaires, défectuosités).
5° Déformations. — La déformation est l’état d’une ou de plusieurs parties du corps dont la forme naturelle, primitive, a été altérée.
p. 35Les déformations sont toujours artificielles et reconnaissent pour causes, chez le cheval, le travail, la nourriture, le dressage, etc. C’est ainsi que les animaux de selle et de bât présentent souvent une déformation de la région dorsale (dos ensellé), et que les chevaux exclusivement nourris de foin et de paille ont le ventre tombant (ventre de vache).
6° Hermaphrodismes. — L’hermaphrodisme est un vice de conformation particulier consistant en la réunion, chez un même individu, des sexes ou de quelques-uns de leurs caractères.
L’hermaphrodisme vrai, avec présence des testicules et des ovaires bien développés sur le même sujet, n’existe que chez certains animaux inférieurs. On ne l’observe jamais chez les mammifères supérieurs, où l’hermaphrodisme, quand il existe par hasard, consiste tout simplement en la présence, sur le même individu, de quelques vestiges des attributs des deux sexes.
Si incomplets que soient les détails dans lesquels nous venons d’entrer relativement aux conformations anormales, ils permettront néanmoins au lecteur de se faire de celles-ci une idée suffisamment exacte pour les distinguer de la conformation ordinaire, en saisir les inconvénients, et souvent même les causes.
1 | Ancêtres des Hindous, des Perses ou Iraniens, de la plupart des anciennes populations de l’Asie-Mineure, et de l’immense majorité des peuples de l’Europe actuelle. |
2 | On ne distingue que quatre types simples de tissus fondamentaux : |
3 | Traité d’anatomie comparée des animaux domestiques, 3e édition, Paris, 1879, p. 196. , |
4 | Traité d’anatomie comparée des animaux domestiques, 3e édition, Paris, 1879, p. 564 , . |
5 | On sait que le tissu cellulaire est plus ou moins lâche et formé de filaments entre-croisés circonscrivant des mailles qui contiennent des capillaires et des vésicules adipeuses. Il constitue à chaque organe une enveloppe générale, pénètre dans son intérieur, et détermine la forme de toutes les parties du corps, qu’il sépare ou réunit. |
6 |