Rencontre avec Vincent Haegele
Vincent Haegele est le directeur des bibliothèques de Versailles. À ce titre, il organisa une belle première consacrée au cheval cette année (6 avril-7 juillet) au siège de la Bibliothèque Centrale, à deux pas du château : l’exposition, intitulée Le Cheval Art et Pouvoir avec le soutien de la Collection Émile Hermès. Un projet nourri de longue date par les prédécesseurs du conservateur des bibliothèques de Versailles, archiviste paléographe diplômé de l’École des Chartes. Spécialiste du Premier Empire, Vincent Haegele est également l’auteur de plusieurs ouvrages de référence sur le sujet : Napoléon et les siens (Perrin) et plus récemment, chez le même éditeur, une biographie de Murat sous titrée La solitude du cavalier …
Vincent, comment évaluez-vous le fonds cheval de la Bibliothèque de Versailles, intra-muros mais aussi comparé à ceux que vous connaissez ?
V.H. Il s’agit d’un fonds qui n’en est pas un, à savoir qu’il n’est pas regroupé en une seule et même entité. C’était d’ailleurs tout l’intérêt de travailler sur le projet de l’exposition avec la Maison Hermès, car cela nous a aidés à mieux discerner la richesse de nos collections sur le sujet « cheval » et la multiplicité des supports.
Comment le qualifierez-vous ?
V.H. Je le qualifierais de « incomplètement royal », dans le sens où beaucoup de volumes proviennent des bibliothèques du roi ou des princes, mais il manque quelques références, fort heureusement contrebalancées par les apports de collections entrées ultérieurement. Ainsi, l’un des deux Pluvinel que nous présentions, ou le Newcastle a pu entrer grâce au don de Jean et Henriette Lebaudy, réalisé dans les années 1960.
À quand remontait la dernière exposition de la Bibliothèque de Versailles, ayant pour thème le Cheval ?
V.H. À ma connaissance, il n’y en avait pas eu auparavant, du moins pas dans les dix dernières années. C’est un projet qui a été poursuivi par les trois derniers conservateurs qui se sont succédé. Marie-Françoise Rose en avait parlé à Sophie Danis, mon prédécesseur, qui m’en avait elle-même parlé. J’ai donc réalisé un vieux rêve.
Pourquoi l’aviez-vous envisagée ?
V.H. Bien que non-cavalier (j’ai très peu pratiqué, pas suffisamment pour me prétendre comme tel), j’ai beaucoup étudié l’art de l’équitation et ses enjeux à travers la littérature classique et historique. J’ai réalisé il y a trois ans une grosse biographie de Murat, sous-titrée « la solitude du cavalier », tant le personnage est identifié au cheval. Proposer cette exposition me permettait d’approfondir cette quête et, de plus, le contact a été excellent avec les personnes en charge des collections patrimoniales de la maison d’Hermès. Je n’ai jamais travaillé de façon aussi agréable sur un projet commun, tant avec Hermès qu’avec le scénographe.
Qu’impliqua-t-elle comme travail particulier ?
V.H. Un choix drastique de ce que nous voulions présenter. La collection Hermès couvre des milliers d’objets. Il a fallu resserrer le cadre petit à petit, jusqu’à opter pour « Art et pouvoir », ce qui permettait de présenter 30 pièces exceptionnelles ayant appartenu à des appareils d’État ou à des familles de souverains.
En quoi fût-elle différente d’autres opérations que vous menez avec la Bibliothèque de Versailles ?
V.H. La bibliothèque de Versailles est en fait assez éclectique dans ses choix d’exposition en raison de la variété de ses collections. L’opération a surtout eu une belle résonance en raison du partenariat noué et de l’annonce faite quelques semaines plus tôt de la tenue des épreuves d’équitation à Versailles, lors des JO de Paris.
Pourquoi le partenariat avec la collection Hermès ?
V.H. L’idée est de Marie-Françoise Rose, qui connait fort bien Philippe Dumas et qui avait imaginé quelque chose autour du cheval dès les années 2000. J’ai été très heureux de pouvoir poursuivre cette idée et j’espère avoir l’occasion de continuer à travailler avec le pôle patrimoine de la maison Hermès pour d’autres projets.
Quelles ont été les retombées ? Presse, public ?
V.H. Nous avons eu à peu près 3 000 visiteurs, ce qui est peu et beaucoup à la fois, mais l’événement est resté très circonscrit à Versailles. Le public qui s’est déplacé était surtout très motivé car souvent en lien avec le monde du cheval. Quant à la presse c’est surtout la presse spécialisée qui s’est intéressée à l’événement.
En étiez-vous satisfait ?
V.H. Sachant que c’était ma première exposition à Versailles, oui !
Quel lien entretenez-vous personnellement avec le cheval ? Cavalier ? Historien ?
V.H. J’ai déjà donné quelques morceaux de réponses plus haut. Un rapport d’admiration, je pense, mais aussi d’intérêt historique.
Vous évoquez 2024 et les JO dans votre dossier de presse… Qu’ambitionnez-vous pour l’occasion ?
V.H. À cette heure, il est encore trop tôt pour penser à ce que nous pourrons faire en 2024, mais il y aura sans doute quelque chose en rapport avec l’événement.
Autres projets ? Soucis ?
V.H. Les bibliothèques auront bientôt de nouveaux outils, informatiques et numériques notamment, pour continuer à toucher davantage de publics. Nous espérons pouvoir proposer à nouveau les textes et les illustrations de l’exposition, mais en ligne. Cela dédommagera de l’absence de catalogue.
Que pensez-vous du projet de la Bibliothèque Mondiale du Cheval ? Qu’en attendez-vous ?
V.H. Un excellent projet auquel je souhaite longue vie et plein succès. Si cette bibliothèque permet à terme aux personnes qui, comme moi, cherchent à ne rater aucune référence pour la préparation d’une exposition, d’un mémoire, d’une conférence, alors elle aura déjà atteint son premier objectif.
Propos recueillis par Xavier Libbrecht
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