Chapitre premier
Tête
La tête représente une grosse pyramide quadrangulaire suspendue par sa base à l’extrémité antérieure ou supérieure du cou, dans une direction qui varie suivant les individus, suivant leurs attitudes, etc., mais que nous supposerons à peu près verticale, pour la commodité de nos descriptions.
Nous connaissons son importance, son rôle, les régions qu’elle comprend en extérieur ; il nous reste maintenant à en étudier la structure anatomique et les fonctions physiologiques.
p. 281Pour faciliter cette étude, on l’a divisée en deux parties : le crâne et la face.
Le crâne, ou partie supérieure de la tête, est creusé d’une cavité centrale, la boîte crânienne, logeant le cerveau, le cervelet, le bulbe, et communiquant, en arrière, avec le canal rachidien, dont elle n’est, du reste, qu’un renflement.
Beaucoup plus étendue que le crâne, chez le cheval et la plupart de nos animaux domestiques, la face occupe l’extrémité antéro-inférieure de la tête, et se compose des mâchoires inférieure et supérieure.
Par suite de sa configuration générale, on reconnaît encore à la tête quatre faces : une antérieure, une postérieure et deux latérales ; une base ou extrémité supérieure, et un sommet ou extrémité inférieure.
Ces divisions nous seront d’un utile secours pour la description des différents organes que nous rencontrerons dans la tête.
Cependant, comme il serait, malgré tout, absolument impossible de saisir certains détails de ce chapitre sans avoir sous les yeux une description détaillée des os de la tête ; comme, d’un autre côté, ces os ne pourraient être décrits dans une étude d’ensemble avec tous les développements que comporte leur importance, nous avons cru utile de terminer ce chapitre par un appendice relatif à l’ostéologie de la tête. Le lecteur devra s’y reporter de temps en temps s’il veut se faire une idée vraie de la situation, de la configuration, du fonctionnement des organes renfermés à l’intérieur ou groupés à la surface des os du crâne et de la face.
I. — Premier plan
1. — Appareil salivaire.
Glande parotide
Immédiatement au-dessous de la peau et du peaucier cervical, entre le bord postérieur du maxillaire inférieur et l’apophyse transverse de l’atlas, on trouve la glande parotide (I, 1), que sépare encore de la peau et du peaucier, dans sa partie moyenne, le muscle parotidoauriculaire (voy. même plan, Muscles de l’oreille).
C’est la plus importante des glandes salivaires, organes sécréteurs p. 282annexés à la cavité buccale, dont l’usage, comme nous le savons déjà, est de sécréter la salive.
Fig. 115. — Glandes maxillaire et sublinguale, avec les principaux vaisseaux et nerfs profonds de la tête.
Seule visible sur le premier plan, la glande parotide sera étudiée ici à l’exclusion des autres, dont nous nous réservons, d’ailleurs, de dire p. 283un mot au fur et à mesure que nous les rencontrerons dans les différents plans de la tête.
Allongée de haut en bas et aplatie d’un côté à l’autre, cette glande recouvre la poche gutturale, l’insertion mastoïdienne des muscles petit oblique et mastoïdo-huméral (Voy. IIIe partie, chap, II, § 1, Cou, et Pl. VIII), le muscle occipito-styloïdien (XI, 6), la tubérosité du bord postérieur de l’os styloïde (XI, 4), le digastrique (VIII, 2, 3), le tendon du sterno-maxillaire, comme le fait parfaitement voir le premier plan de la planche VII, au moyen d’une fenêtre pratiquée à la peau, la glande maxillaire (fig. 115 du texte, R), l’artère carotide externe (fig. 115 du texte, F, A) et le nerf facial ou de la cinquième paire encéphalique, p. 284que nous voyons se terminer, à sa sortie de dessous la parotide, par plusieurs branches qui, en s’anastomosant avec d’autres divisions nerveuses, forment le plexus sous-zygomatique (fig. 116 du texte, 1).
Fig. 116. — Glande parotide avec les principaux vaisseaux et nerfs superficiels de la tête.
L’extrémité supérieure de la parotide embrasse la base de la conque, tandis que l’extrémité inférieure se trouve comprise dans l’angle formé par la réunion des veines jugulaire et glosso-faciale (fig. 116 du texte, A, B).
Cette glande est parcourue par un grand nombre de vaisseaux sanguins et de nerfs.
Elle possède, en outre, un canal excréteur dit canal de Sténon qui, se détachant de l’extrémité inférieure de la parotide, entre dans l’auge, rampe sur le muscle masséter interne, au-dessous de la veine glosso-faciale, s’engage dans la scissure maxillaire avec la veine précitée et l’artère correspondante, en restant toujours en arrière de ces deux vaisseaux, et remonte jusqu’au niveau de la troisième dent molaire supérieure, où il traverse la joue (II, 3, et fig. 116 du texte, K, K).
Le canal de Sténon a pour but de transporter le liquide sécrété par la glande parotide dans la bouche.
Rôle de la parotide et des glandes salivaires en général.
(Insalivation)
Afin de ne pas nous répéter inutilement, et bien que les parotides ne composent pas à elles seules l’appareil salivaire du cheval, nous passerons succinctement en revue, dans ce paragraphe, les fonctions du système salivaire en général, tout en tenant compte, dans la mesure du possible, et de l’action particulière de chacun des organes de ce système, et des propriétés différentes que présentent les fluides salivaires suivant la glande qui les a fournis.
L’appareil salivaire comprend, chez le cheval : deux parotides que nous venons d’examiner ; deux maxillaires et deux sublinguales, qui sont parfaitement circonscrites (Voy. XIe plan) ; puis les glandes molaires, distinguées en inférieures et en supérieures, et enfin les glandules des lèvres, de la langue et du voile du palais (Voy. XIIe plan).
Ces différentes glandes ont pour but de préparer la salive et de la verser dans la cavité buccale où, mise en contact avec les substances alimentaires déjà divisées et broyées par les dents molaires, elle ramollitp. 285 ces substances, facilite leur action sur l’organe du goût, les prépare à être dégluties, et enfin leur fait éprouver quelques modifications préliminaires à celles qu’elles éprouveront plus tard dans le tube intestinal.
1° De la salivation en général. — Le système salivaire fonctionne pendant le repas, l’abstinence, et quand des substances excitantes sont mises en contact avec la muqueuse buccale, mais suivant des lois qui ne sont pas les mêmes pour ces différentes circonstances.
1° Pendant le repas, toutes les glandes fonctionnent activement. Toutefois, la salivation n’atteint son maximum d’activité que quand le repas dure depuis un quart d’heure ; puis elle se ralentit sur la fin du repas et toutes les fois que la mastication devient languissante. D’autre part, les glandes du côté où se fait la mastication sécrètent plus que celles du côté opposé. Enfin, la nature des aliments a aussi une très grande influence sur la quantité de salive sécrétée : « Les glandes d’un cheval qui mange du foin fournissent 5 à 6 kilog. de salive par heure ; elles produisent un tiers en sus lorsque l’animal mange de l’avoine, une moitié pendant qu’il mange de l’herbe verte, et le tiers seulement de cette somme si son repas est composé de racines, telles que la betterave ou les navets1 . »
2° Lors de l’abstinence, les parotides restent inactives et les maxillaires ne donnent que peu de liquide. Ce sont les glandes sublinguales et molaires, ainsi que les petites glandules sous-muqueuses qui fonctionnent à peu près exclusivement.
3° Lorsque des substances excitantes sont mises en contact avec la muqueuse buccale, les parotides ne sont pas sensiblement influencées ; mais les maxillaires, les sublinguales, les glandules à salive visqueuse, fonctionnent avec plus ou moins d’activité suivant l’excitant.
Maintenant, quelle est la quantité totale de salive fournie par le système salivaire dans une période de vingt-quatre heures ?
Si l’on tient compte, d’une part, que le foin absorbe, pour être dégluti, à peu près quatre fois son poids de salive, et, d’autre part, que le cheval avale, pendant l’abstinence, 100 à 150 grammes de fluide salivaire par heure, cette question est facile à résoudre : « Un cheval qui p. 286consomme 5,000 grammes de foin et 5,000 grammes de paille par jour, dit M. Colin, a besoin, pour transformer ces aliments en bols propres à être déglutis, de 40,000 grammes de salive, qu’il faut joindre à environ au moins 2,000 grammes du même fluide produit pendant les dix-sept à dix-huit heures d’abstinence, en tout 42,000 grammes2 . »
Quant à la proportion de salive sécrétée par chaque glande, s’il est difficile de la déterminer d’une façon exacte, on peut au moins s’assurer assez facilement que les parotides fournissent les trois quarts du liquide produit par tout le système dans un temps donné.
2° Propriétés et composition de la salive. — La salive présente des caractères particuliers suivant qu’on l’examine dans telle ou telle glande.
Celle des parotides est claire, presque aussi limpide que l’eau, et présente une réaction constamment alcaline.
La salive des maxillaires est épaisse, visqueuse, et moins alcaline que la précédente.
Enfin, celle des sublinguales, peu épaisse, peu visqueuse, est encore moins alcaline que la salive des maxillaires.
Quant à la salive mixte, résultant du mélange des divers fluides salivaires, elle est très épaisse, très visqueuse, et moins alcaline que la salive parotidienne.
En somme, le liquide salivaire est une dissolution de deux ordres d’éléments : les uns organiques, les autres minéraux.
Les matières organiques sont représentées par la ptyaline, matière analogue à l’albumine, et que certains auteurs ont appelée la diastase salivaire, par suite de son analogie avec la diastase qui se développe dans le grain d’orge, sous l’influence de la germination.
3° Rôle de la salive. — La salive agit sur les aliments par ses propriétés physiques et chimiques. Elle rend la gustation aussi parfaite que possible, favorise la mastication, et sert à la formation du bol alimentaire, ainsi qu’à son passage dans le pharynx et l’œsophage.
Outre ce rôle déjà si varié, les fluides salivaires ont encore celui de ramollir les aliments, de dissoudre leurs matières sucrées, mucilagineuses, et la plupart de leurs sels. Ils jouissent, enfin, de la propriété p. 287de transformer en sucre les principes amylacés que ces aliments renferment. Mis en contact avec la fécule, ils la transforment en dextrine, puis en glycose. Or, il est évident que c’est là une transformation extrêmement importante, puisque la fécule est insoluble et conséquemment impropre à la digestion ; tandis que la dextrine et le glycose sont solubles et jouissent de propriétés nutritives très grandes.
Ces changements sont dus à la ptyaline plus ou moins modifiée qui agit comme ferment.
Quoi qu’il en soit, le rôle de la salive est d’une importance tellement grande qu’elle est indispensable dans les phénomènes digestifs. Si, en effet, par une cause quelconque, elle s’écoule hors de la bouche, la digestion s’effectue mal et les animaux deviennent promptement faibles et maigres.
2. — Appareil de l’audition.
Sur le même plan que la parotide, à son extrémité supérieure, on trouve l’orifice externe de l’appareil auditif, auquel nous allons consacrer une description spéciale.
Cet appareil a pour agents essentiels les nerfs auditifs, qui se ramifient dans les parois membraneuses d’une suite de cavités formant l’oreille externe, l’oreille moyenne, et l’oreille interne.
A. — Oreille externe
L’oreille externe, la seule à peu près visible en entier sur la pl. VII, est représentée par un évasement cartilagineux, en forme de cornet, connu sous le nom de conque ou de pavillon, et par le conduit auditif externe .
a. — Conque ou pavillon
Cet appendice est formé de trois pièces cartilagineuses qui sont : 1° le cartilage conchinien ; 2° le cartilage annulaire ; 3° le cartilage scutiforme.
1° Cartilage conchinien (3, 4). — Pièce principale du pavillon, ce cartilage présente la forme d’un cornet rigide, dressé et largement ouvert sur les côtés. Il est renflé en cul-de-sac à son fond, et se p. 288termine par un prolongement pointu qui le fixe à la surface de la poche gutturale (7), comme on le voit très exactement sur le 1er plan, en rabattant la partie supérieure de la glande parotide et du muscle parotido-auriculaire.
La peau qui recouvre le cartilage conchinien est pourvue, en dedans, de poils longs et abondants pour s’opposer à l’introduction des corps étrangers dans le canal auditif et tamiser le son ; en dehors, au contraire, elle est très fine et laisse voir un riche réseau vasculaire sous-jacent.
2° Cartilage annulaire (5). — Petite lame roulée en anneau, située sous la partie supérieure de la parotide, et servant d’intermédiaire entre le cartilage conchinien et le conduit auditif.
3° Cartilage scutiforme (6). — La moyenne des trois pièces de la conque, le cartilage scutiforme, est situé en avant de celle-ci, et se trouve relié à elle par quelques faisceaux charnus.
b. — Conduit auditif externe
Ce canal fait communiquer l’oreille externe avec l’oreille moyenne, comme il est facile de s’en rendre compte en soulevant le 1er plan en entier ; car, alors, on ne découvre pas seulement le 10e plan et l’orifice F du conduit auditif externe, mais encore on met en évidence la communication de ce conduit avec le cartilage annulaire, dont l’orifice inférieur est parfaitement visible sur le verso du 1er plan.
Le canal auditif externe, enfoncé dans la portion tubéreuse du temporal (Voy. Appendice, I, Os de la tête), est tapissé par une membrane tégumentaire renfermant un grand nombre de glandes chargées de sécréter le liquide onctueux désigné sous le nom de cérumen.
c. — Muscles de la région auriculaire
Ces muscles sont au nombre de dix, savoir :
1° Le zygomato-auriculaire (8), qui se dirige de l’apophyse zygomatique du temporal sur la base de la conque ; 2° le temporo-auriculaire externe (9), qui s’étend de la crête pariétale aux cartilages conchinien et scutiforme ; 3° le scuto-auriculaire externe (10), qui relie le cartilage scutiforme au cartilage conchinien ; 4° les trois cervico-auriculaires (11), p. 289étendus de la corde du ligament cervical au cartilage conchinien, et divisés en superficiel, moyen et profond ; 5° le parotido-auriculaire (12), mince bandelette rubanée prenant son origine sur le tissu parotidien et se dirigeant en avant et en haut sur la base de la conque, où elle se termine ; 6° le temporo-auriculaire interne, situé sous son homonyme superficiel, et invisible sur la pl. VII ; 7° le scuto-auriculaire interne, caché par le scuto-auriculaire externe, et également invisible, pour cette raison, sur la pl. VII ; 8° le tympano-auriculaire, reliant l’orifice du conduit auditif externe à la base de la conque, et invisible, comme les deux précédents, sur la pl. VII.
Tous ces muscles ont pour mission de faire mouvoir l’oreille externe et de diriger son ouverture en avant, en dehors, en arrière, etc.
L’inclinaison de l’oreille en dehors étant surtout produite par le parotido-auriculaire, on a quelquefois conseillé de sectionner ce muscle chez les chevaux à oreilles pendantes ; mais, outre que les résultats de cette opération ne sont pas certains, elle présente assez de danger, eu égard au voisinage de la glande parotide, pour qu’on la proscrive absolument.
B. — Oreille moyenne ou caisse du tympan
Bien que l’oreille moyenne et l’oreille interne ne fassent pas logiquement partie du premier plan, nous les décrirons ici, tant parce que la pl. VII ne les montre bien dans aucun de ses plans, que pour ne pas scinder en plusieurs parties la description de l’appareil auditif, ce qui, d’ailleurs, ne présenterait que des inconvénients.
L’oreille moyenne (fig. 117 du texte) est constituée par une cavité irrégulière déprimée d’un côté à l’autre, creusée dans la portion tubéreuse du temporal.
Sa paroi externe est en grande partie constituée par la membrane du tympan, fixée dans une direction oblique et sous un angle de 45° environ à un cercle osseux incomplet, du pourtour duquel s’échappent, en rayonnant, les cloisons des cellules mastoïdiennes.
Sa paroi interne, formée par le rocher, présente deux ouvertures : la fenêtre ovale et la fenêtre ronde, situées l’une au-devant de l’autre, et séparées par une petite éminence, le promontoire, éloignée de 4 à 5 millimètres de la membrane tympanique. En dessous se trouve le relief du limaçon.
p. 290Entre la membrane du tympan et la fenêtre ovale, à l’intérieur de l’oreille moyenne, s’étend une chaîne de petits osselets articulés : le marteau, l’enclume, le lenticulaire et l’étrier (fig. 117, 118 et 119 du texte), tirant leurs noms de leurs formes générales.
Courbé sur lui-même, le marteau est fixé par son manche à la membrane du tympan, et s’articule avec l’enclume par son extrémité renflée.
Fig. 117. — Caisse du tympan du côté droit, chez le cheval (coupe verticale et transverse, plan antérieur).
L’enclume se met en rapport avec le lenticulaire, petit disque reposant sur le sommet de l’étrier, dont la base, figurée par une plaque de même forme que la fenêtre ovale, s’engage dans cette ouverture.p. 291
Fig. 118. — Osselets de l’oreille moyenne du cheval, d’après une figure inédite de M. Lavocat.
Fig. 119. — Schéma de l’ensemble de l’appareil auditif de l’homme.
On voit, de droite à gauche, l’oreille externe, le conduit auditif, la caisse du tympan avec la chaîne des osselets et la trompe d’Eustache, le labyrinthe (Dalton, Physiologie et hygiène ).
p. 292Ces pièces sont mobiles les unes sur les autres, unies par des ligaments et mues par des muscles, sur le nombre et l’existence desquels on n’est pas encore absolument fixé.
La caisse du tympan est, en outre, tapissée à son intérieur par une fine membrane muqueuse, en communication avec le pharynx à l’aide d’un tube cartilagineux, dit trompe d’Eustache, long d’environ 1 décimètre, amenant l’air extérieur dans l’oreille moyenne. C’est ce conduit qui, fendu inférieurement, laisse sa muqueuse faire hernie pour constituer le grand sac particulier aux monodactyles, connu sous le nom de poche gutturale (XII, 14).
C. — Oreille interne ou labyrinthe
Sur un plan plus interne que la caisse du tympan, toujours dans la partie pétrée du temporal, on trouve plusieurs cavités en communication les unes avec les autres et constituant, par leur ensemble, le labyrinthe osseux, qui renferme lui-même des parties molles désignées sous le nom de labyrinthe membraneux, et des liquides.
a. — Labyrinthe osseux
Le labyrinthe osseux se compose de trois parties : le limaçon, le vestibule et les canaux semi-circulaires.
1° Limaçon ou trochlée (fig. 120 du texte, a). — Cavité spiroïde, conique, enroulée autour d’un axe central oblique, le limaçon a sa base située en haut, au niveau de la fenêtre ronde, et se trouve partagé, par la lame spirale, en deux sections ou rampes distinctes, l’une supérieure, l’autre inférieure, communiquant ensemble près de la pointe du limaçon.
2° Vestibule (fig. 117 du texte, I). — Placé en regard de la fenêtre ovale, le vestibule constitue une petite cavité en coquille, presque ovalaire, où toutes les autres parties du labyrinthe viennent aboutir.
3° Canaux demi-circulaires (fig. 117 du texte, J, K, L). — Au nombre de trois, ces canaux sont situés au-dessus du vestibule, « à la manière de trois arcades à plein cintre réunies en triangle par leur base »3 .
b. — Labyrinthe membraneux
Le labyrinthe membraneux comprend trois parties correspondant aux trois cavités du labyrinthe osseux, dans lesquelles elles sont contenues sans les remplir complètement.
L’espace laissé entre les parties molles et les parois internes du labyrinthe osseux, de même que les ampoules et les tubes qui constituent le vestibule et les canaux demi-circulaires membraneux, sont occupés par un fluide séreux, limpide.
Fig. 120. — Limaçon ouvert pour montrer la disposition des deux rampes et la distribution du nerf auditif.
L’oreille interne reçoit le nerf auditif, qui présente deux branches, l’une se distribuant dans le limaçon, l’autre dans le vestibule (fig. 120 du texte, b).
« L’appareil auditif est impressionné par les mouvements vibratoires produits dans les corps, puis propagés dans l’air et transmis aux parties profondes, où s’épanouissent les dernières divisions du nerf acoustique »4 .
Tous les corps, qu’ils soient solides, liquides ou gazeux, sont susceptibles de vibrer, mais à des degrés différents.
Les vibrations donnent naissance à la sensation particulière connue sous la dénomination de son. Elles résultent d’un déplacement oscillatoire des molécules d’un corps et ne deviennent sonores, c’est-à-dire perceptibles, qu’autant que leur nombre s’élève au moins à 35 et ne dépasse pas 77,000 par seconde.
Dès que les mouvements vibratoires se sont produits, ils forment des ondulations appelées ondes sonores, qui se propagent dans l’air avec une vitesse de 340 mètres par seconde.
L’oreille externe, ou le pavillon, grâce à sa forme, à sa situation, aux mouvements divers et rapides dont elle jouit, reçoit les ondes, les rassemble, et les transmet au conduit auditif. Aussi, dès que l’animal entend du bruit, porte-t-il l’ouverture des oreilles dans le sens d’où le bruit paraît lui arriver, afin d’en mieux reconnaître le point de départ et la direction.
Une fois rassemblés par le pavillon de l’oreille et parvenus au fond du conduit auditif, les sons frappent la membrane du tympan et la font vibrer.
Les vibrations produites dans la membrane de tympan se transmettent à la fois à la chaîne des osselets et à l’air qui remplit la cavité tympanique.
La trompe d’Eustache, qui concourt également aux phénomènes de l’audition, a pour fonction essentielle de maintenir l’air de la caisse en équilibre de pression avec l’air extérieur. Sans elle, lorsque la pression atmosphérique augmenterait, la membrane du tympan serait refoulée du côté de la caisse, puis poussée en sens inverse lorsque l’air du tympan viendrait à se raréfier.
p. 295« Dans les deux cas, l’audition serait difficile, ainsi qu’on peut s’en assurer soi-même, en faisant une inspiration ou une expiration profonde, après s’être fermé le nez et la bouche »5 .
Parvenues au liquide remplissant le labyrinthe, les vibrations le mettent en mouvement et provoquent ainsi l’ébranlement des divisions ultimes du nerf auditif, qui porte alors au cerveau les impressions qu’il a reçues.
« Bien qu’il ne nous soit pas possible d’analyser cette sensation chez les animaux, nous pouvons, jusqu’à un certain point, lui reconnaître la plupart des caractères qu’elle présente dans notre espèce.
« En effet, ils distinguent la direction du bruit, comme le prouvent les mouvements de leurs oreilles et le sens de leur fuite ; ils apprécient peut-être aussi la distance des lieux d’où les sons proviennent, puisque cette appréciation leur est utile pour calculer l’étendue du danger qui les menace et régler la rapidité de leur course ; ils ont le sentiment du timbre ; on les voit distinguer sûrement la voix de l’homme de tout autre bruit, et la voix des animaux de leur espèce de celle des espèces différentes »6 .
La finesse et l’intégrité de la sensation auditive sont, d’ailleurs, à prendre en très sérieuse considération, puisque cette sensation doit venir en aide à la vue, et même la remplacer lorsque celle-ci est mauvaise ou abolie. La mobilité des oreilles, l’attention soutenue du cheval aveugle montrent bien, en effet, qu’il cherche à suppléer au sens de la vue, qu’il n’a plus, par celui de l’ouïe.
II. — Deuxième plan
Muscles masséter et zygomato-labial. Plexus sous-zygomatique. Artère et veine glosso-faciales. Canal de sténon
Également situé sous le peaucier du cou, le deuxième plan est occupé par les muscles masséter et zygomato-labial, l’artère et la veine glosso-faciales, le plexus sous-zygomatique et le canal de Sténon.
Le muscle masséter (II, 1), de beaucoup le plus volumineux des deux, est aplati d’un côté à l’autre et appliqué contre la face externe de la branche du maxillaire inférieur. Il prend son insertion fixe sur la p. 296crête zygomatique et son insertion mobile sur la moitié supérieure de la branche du maxillaire inférieur. Son bord inférieur est longé par le canal de Sténon (3), l’artère et la veine glosso-faciales (Voy. fig. 115 et 116 du texte). À sa surface externe rampe le plexus zygomatique (Voy. fig. 115 du texte). Son plan profond répond, en avant, à l’articulation temporo-maxillaire et se confond avec le crotaphite.
Élévateur par excellence de la mâchoire inférieure, ce muscle joue un rôle très important dans la mastication. Il constitue, en extérieur, la base du plat de la joue.
Le muscle zygomato-labial (4), de forme rubanée, prend naissance à la surface du masséter et se termine sur l’alvéolo-labial.
Il tire en haut la commissure des lèvres.
III. — Troisième plan
Muscles des paupières et du chanfrein
Le troisième plan comprend un assez grand nombre de muscles.
Les trois premiers appartiennent à la région palpébrale ; ce sont :
L’orbiculaire des paupières (1), dont la contraction détermine l’occlusion de l’ouverture palpébrale ;
Le fronto-palpébral (2), muscle court et aplati qui part du frontal, se confond inférieurement avec le précédent, et se borne à froncer la peau du sourcil ;
Le releveur de la paupière supérieure, ou orbito-palpébral, mince bandelette charnue située à la face interne des paupières et invisible, pour cette raison, sur la planche VII.
Les autres muscles font partie de la région faciale ou du chanfrein et sont au nombre de treize, parfaitement visibles sur le troisième plan, à l’exception, toutefois, des mitoyens antérieur et postérieur plongés dans l’épaisseur du tissu des lèvres.
Ces muscles ont reçu les noms suivants : Lacrymo-labial ou lacrymal (2’), sus-naso-labial (3), sus-maxillo-labial (4), grand susmaxillo- nasal (5), petit sus-maxillo-nasal (7), naso-transversal ou transversal du nez (6), orbiculaire des lèvres (8), alvéolo-labial (9, 10), maxillo-labial (11), mento-labial ou muscle de la houppe du menton (12), zygomato-labial (précédemment décrit à propos du deuxième plan), mitoyens antérieur et postérieur.
p. 297Ils entrent dans la charpente des lèvres, des joues et des naseaux, et ont pour mission, soit de dilater l’ouverture externe des cavités nasales, soit d’écarter ou de rapprocher les lèvres l’une de l’autre, soit enfin de tirer en arrière la commissure de celles-ci.
Leur rôle est, par ce fait même, important dans la respiration et la digestion, puisqu’ils facilitent à la fois l’entrée de l’air dans les premières voies respiratoires et la préhension des aliments.
L’alvéolo-labial, toutefois, a une action un peu différente, en ce sens qu’il agit surtout dans la mastication en repoussant sous les dents molaires les parcelles alimentaires qui tendent à tomber en dehors des arcades dentaires. C’est ce muscle qui, formant la base de la poche de la joue, se trouve dilaté par les aliments, lorsque le cheval fait magasin (Voy. IIe partie, joues).
Quant à la situation des muscles de la région faciale, outre qu’il est très facile de s’en rendre compte par l’examen de la planche VII, elle se déduit parfaitement de leurs noms.
Notons, enfin, que la plupart de ces muscles, de même que les branches terminales et collatérales de l’artère maxillaire externe ou glossofaciale (voy. fig. 116 du texte) et les racines de la veine correspondante, sont apparentes sous la peau fine des chevaux de race distinguée, surtout pendant l’action, alors que le sang afflue dans le réseau sanguin sous-cutané, et que les naseaux sont largement ouverts par suite de la contraction de leurs muscles dilatateurs. C’est là une particularité que les peintres et les sculpteurs feront bien de noter s’ils veulent joindre le vrai au beau.
IV. — Quatrième plan
Arcades zygomatique et orbitaire
Le quatrième plan nous fait voir les arcades zygomatique et orbitaire, dont la section met à nu les muscles crotaphite et de l’œil, formant les cinquième et neuvième plans.
Nous renvoyons, pour plus de détails, à l’appendice qui termine ce chapitre (I, os de la tête : temporal, zygomatique et frontal).
V. — Cinquième plan
Muscle crotaphite ou temporal
Le muscle crotaphite ou temporal (V), mis à nu par la section des arcades zygomatique et orbitaire, constitue à lui seul le cinquième plan.
Situé dans la fosse temporale, ce muscle prend son origine dans cette fosse et se termine sur l’apophyse coronoïde et le bord antérieur de la branche du maxillaire inférieur.
Il rapproche la mâchoire inférieure de la supérieure.
VI. — Sixième plan
Os de la mâchoire inférieure ou maxillaire inférieur
Le sixième plan est occupé par le maxillaire inférieur (VI), qui constitue tout le squelette de la mâchoire inférieure.
Cet os comprend deux branches (B) aplaties d’un côté à l’autre, plus larges en haut qu’en bas, recourbées en avant dans leur partie postérieure pour s’articuler avec les temporaux, écartées supérieurement de façon à limiter l’espace intra-maxillaire (auge en extérieur), et réunies inférieurement pour former le corps (A). Le bord antérieur de chaque branche est creusé de six alvéoles pour recevoir les dents molaires inférieures (F). Le bord postérieur ou inférieur constitue la base de la ganache.
Le corps de l’os, enfin, reçoit les incisives et les crochets inférieurs (D, E).
Toutes ces particularités sont, d’ailleurs, parfaitement visibles sur le recto et le verso de la planche VII et signalées dans l’appendice du chapitre 1er (I, os de la tête), auquel nous renvoyons le lecteur pour plus de détails.
VII. — Septième plan
Muscles ptérygoïdiens interne et externe
En rabattant le sixième plan, on trouve immédiatement à sa face interne et en arrière, dans l’espace intra-maxillaire, deux muscles : le ptérygoïdien interne et le ptérygoïdien externe.
Le ptérygoïdien interne, encore appelé masséter interne (VII, 1), par p. 299suite de sa situation à l’opposé du masséter externe, s’étend de la base du crâne (crête palatine et apophyse sous-sphénoïdale) en dedans du maxillaire inférieur et répond, par sa face interne, aux muscles des VIIIe et XIe plans, ainsi qu’à l’artère, à la veine glosso-faciales, et au canal de Sténon qui, nous l’avons vu déjà, rampent en dedans de ce muscle avant de s’engager dans la scissure maxillaire (Voy. appendice, I, os de la tête) pour longer le bord antérieur du masséter externe.
Le ptérygoïdien externe (2), plus petit que le précédent, descend de la base du crâne sur l’extrémité supérieure de la branche du maxillaire inférieur.
Ces deux muscles élèvent la mâchoire inférieure et lui impriment un mouvement de latéralité très prononcé.
VIII. — Huitième plan
Muscles mylo-hyoïdien et digastrique
Le huitième plan comprend également deux muscles situés à la face interne du maxillaire inférieur, mais plus en avant que ceux du plan précédent.
Le premier, ou mylo-hyoïdien (VIII, 1) se dirige de la ligne myléenne (située en dedans du maxillaire, près du bord alvéolaire) sur le corps de l’hyoïde, sur son appendice antérieur, et sur un raphé fibreux qui s’étend depuis cet appendice jusqu’au sommet de l’angle rentrant formé par l’écartement des deux branches du maxillaire.
Il sert à la fois de support et d’élévateur à la langue.
Le second, ou digastrique (2, 3) a une forme bizarre : il comprend deux faisceaux musculaires, ou corps, réunis bout à bout par un tendon médian, et se dirige de l’apophyse styloïde de l’occipital sur le bord postérieur7 et la face interne du maxillaire inférieur.
le maxillaire en arrière et élève l’hyoïde.
IX. — Neuvième plan
Appareil de la vision
Le neuvième plan nous fait voir les parties principales de l’appareil de la vision.
p. 300Cet appareil, en partie visible seulement sur la planche VII, sert à l’homme et aux animaux pour distinguer les objets extérieurs, juger de leur couleur, de leur forme, de leur étendue et de leur distance.
Il se compose : 1° d’organes accessoires comprenant des organes de protection (orbite, gaine fibreuse, paupières, corps clignotant), des organes de lubrification (glande lacrymale, caroncule de même nom), enfin, des organes de locomotion (muscles) ; 2° d’un organe essentiel, le globe oculaire.
A. — Organes accessoires
a. — Organes de protection
1° Cavité orbitaire. — Située sur le côté de la tête, cette cavité est constituée, à son entrée, par un contour osseux à la formation duquel participent l’apophyse orbitaire, le frontal, le lacrymal, le zygomatique et une petite partie de l’apophyse de même nom du temporal (Voy. appendice, I, os de la tête).
Chez le cheval, un cornet fibreux, la gaine oculaire, complète la cavité orbitaire en arrière et en fait un compartiment spécial absolument distinct de la fosse temporale8 .
2° Paupières. — Les paupières représentent deux voiles membraneux et mobiles destinés à protéger le globe de l’œil en avant. Constituées par la peau en dehors, la muqueuse conjonctive en dedans, et des muscles entre ces deux membranes tégumentaires, les paupières sont divisées en supérieure et inférieure. Elles portent à leur bord libre une rangée de poils dressés constituant les cils, et un petit cartilage appelé tarse, qui prévient leur plissement transversal et soutient une série de petites glandes dites glandes de Méibomius. Les paupières offrent, en outre, deux commissures, une temporale ou externe et une nasale ou interne.
3° Corps clignotant. — Situé dans le grand angle de l’œil, ce corps, appelé encore troisième paupière, est une production muqueuse pourvue à sa base d’un cartilage irrégulier et d’un coussinet graisseux. Il a pour usage d’entretenir la netteté de la surface de l’œil en enlevant les corpuscules que les paupières ont pu laisser arriver jusqu’à p. 301lui. Aussi est-il peu développé chez l’homme, le singe et tous les onguiculés en général, qui ont la facilité de se frotter l’œil avec le membre antérieur, tandis qu’il prend beaucoup d’extension chez le cheval, dont le membre thoracique ne peut servir à cet usage.
Le corps clignotant est à peine visible normalement ; mais « si l’œil vient à être retiré en arrière par la contraction de ses muscles droits, le globe comprimant le peloton graisseux qui fait suite au cartilage, ce coussinet tend à s’échapper au dehors et pousse devant lui le corps clignotant, qui cache entièrement la vitre de l’œil et l’essuie dans toute son étendue »9 .
Dans le tétanos, le corps clignotant recouvre en partie le globe de l’œil par suite de la contraction permanente des muscles droits.
b. — Organes de lubrification
Appareil lacrymal. — Cet appareil comprend une glande et une série de canaux qui transportent le superflu du liquide sécrété par la glande à l’orifice externe des cavités nasales.
La glande lacrymale, située entre l’apophyse orbitaire et la partie supérieure du globe de l’œil, verse les larmes à la face interne de la paupière supérieure par les conduits hygrophthalmiques, qui les répandent sur toute la surface de la cornée. Arrivées à l’angle nasal, elles s’engagent dans de petites ouvertures, les points lacrymaux, situées une à chaque paupière ; puis, à l’aide des conduits de même nom, elles passent dans le sac lacrymal, petit réservoir logé dans l’infundibulum qui précède le trou lacrymal, et dont le rôle est de réunir les larmes pour les faire passer ensuite dans le canal lacrymal. Celui-ci, enfin, après avoir suivi le conduit osseux de l’os lacrymal, se place sous la muqueuse nasale, vient passer à la face interne de l’aile externe du nez et se termine par un orifice, quelquefois double, qui semble percé à l’emporte-pièce, vers la commissure inférieure.
Un petit corps arrondi, la caroncule lacrymale, situé dans l’angle nasal de l’œil, et destiné, croit-on, à diriger les larmes vers les points lacrymaux, complète l’appareil lacrymal.
c. — Organes de locomotion
Les organes de la locomotion sont représentés par sept muscles (2) : cinq désignés sous le nom de muscles droits, et distingués en postérieur, supérieur, inférieur, externe et interne ; deux appelés muscles obliques, l’un grand, l’autre petit.
Les muscles droits produisent, par leur action combinée, la rétraction du globe oculaire au fond de l’orbite.
Les muscles obliques, antagonistes l’un de l’autre, déterminent la rotation de ce même globe oculaire.
B. — Organe essentiel de la vision ou globe de l'œil
Le globe oculaire (IX, 1) représente un corps sphéroïdal sensiblement aplati dans le sens antéro-postérieur.
La région antérieure, cornée ou vitre de l’œil, est plus bombée que les autres points de l’organe et peut-être considérée comme le segment d’une petite sphère ajouté au segment d’une sphère plus grande.
La région postérieure porte un cordon nerveux très développé et cylindrique, le nerf optique, qui met l’organe en rapport avec le cerveau.
Les parois du globe de l’œil sont constituées par plusieurs membranes renfermant des parties liquides appelées milieux de l’œil.
a. — Membranes
Les membranes de l’œil sont au nombre de cinq : la sclérotique, la cornée transparente, la choroïde, l’iris et la rétine.
1° Sclérotique (fig. 121 du texte, b). La sclérotique constitue la plus grande partie de la coque extérieure du globe de l’œil. C’est une membrane blanche, fibreuse, opaque, très solide, dont la face externe est en rapport avec les muscles de l’œil, tandis que la face interne s’unit à la choroïde.
La sclérotique présente, en avant, une ouverture ellipsoïde, dont le bord, taillé en biseau du côté interne, s’unit intimement à la cornée transparente. Postérieurement, elle livre passage au nerf optique.
p. 3032° Cornée transparente (fig. 121 du texte, e). Cette membrane forme la partie antérieure ou la vitre de l’œil, à l’intérieur duquel elle laisse pénétrer les rayons lumineux. Elle complète la coque extérieure du globe oculaire en fermant l’ouverture antérieure de la sclérotique. Sa face externe est recouverte par un feuillet de la conjonctive. Sa face interne forme la paroi externe de la chambre antérieure de l’œil.
Fig. 121. — Coupe théorique de l’œil.
3° Choroïde (fig. 121 du texte, c). La choroïde est une membrane mince, opaque, de couleur foncée, qui fait de l’intérieur de l’œil, avec l’iris, une véritable chambre noire. Sa face externe est étalée sur la face interne de la sclérotique, dont elle répète la conformation générale.p. 304 Sa face interne, tapissée par la rétine, est de couleur noire dans presque toute son étendue, excepté chez les albinos ; de plus, elle offre vers le fond de l’œil, du côté opposé à la terminaison du nerf optique, une tache brillante plus ou moins étendue, à reflets métalliques. Cette tache, sur laquelle viennent se peindre les images placées dans la direction de l’œil, est désignée sous le nom de tapis ou tapetum ; la couleur, d’après Cuvier10 , est vert doré chez le bœuf, bleu argenté chez le cheval, la chèvre, les cerfs, jaune doré pâle chez le lion et le chat, et « toujours d’autant plus vive que l’animal était plus vigoureux »11 .
C’est le tapis qui, en réfléchissant fortement la lumière dans l’obscurité, donne aux yeux de certains animaux un éclat quelquefois si vif.
La choroïde présente, en avant, un bord circulaire correspondant à la forme ellipsoïde de la cornée et adhérant au cercle ciliaire.
Fig. 122. — Coupe transversale du globe de l’œil, face interne du segment antérieur.
Cercle et corps ciliaires (fig. 121, g, h, et fig. 122, P, du texte). — Situés en avant du bord circulaire choroïdien, le cercle et le corps ciliaires sont considérés généralement comme dépendant de la choroïde.
Le cercle ou ligament ciliaire est un petit cordon contractile entourant comme un anneau toute la face interne du bord antérieur de la sclérotique et servant à réunir cette membrane avec la choroïde, l’iris et les procès ciliaires.
p. 305Le corps ciliaire, plus large et plus profond que le cercle ciliaire, qu’il dépasse en avant et en arrière, s’étend de la face interne de la choroïde sur la face postérieure de l’iris. Il forme des plis radiés appelés procès ciliaires, soutenant et enchatonnant le cristallin.
4° Iris (fig. 121 du texte, f).— L’iris figure à l’intérieur de l’œil un véritable diaphragme percé d’une ouverture centrale elliptique, ou pupille, dont la forme et le diamètre varient à chaque instant, suivant la quantité des rayons lumineux.
C’est la paralysie de cette membrane, consécutive à celle de la rétine, qui détermine l’amaurose ou goutte sereine.
L’iris partage l’espace compris entre la cornée et la face antérieure du cristallin en deux parties ou chambres d’inégale grandeur, et présente deux faces et deux circonférences.
La face antérieure, chez le cheval, reflète presque toujours une teinte brune plus ou moins jaunâtre ; on la trouve parfois presque blanche, ou tout au moins gris très clair, et l’on dit alors que les yeux sont vairons.
La face postérieure, en rapport avec le cristallin et les procès ciliaires, est enduite d’une couche épaisse de pigment noir qui a reçu le nom d’uvée. « Très souvent une portion de cet enduit, supportée par un petit pédoncule, traverse la pupille et vient se montrer à son bord dans la chambre antérieure. Ce petit peloton noirâtre, que l’on désigne sous le nom de fongus ou grain de suie, ne rend pas l’œil meilleur, comme le pensent quelques personnes ; mais il ne nuit en rien à sa bonté12 . »
La grande circonférence adhère dans toute son étendue au cercle ciliaire.
La petite circonférence circonscrit l’ouverture pupillaire.
5° Rétine (fig. 121 du texte, d). — Située à la face interne de la choroïde, dont il est très facile de la séparer, la rétine est une membrane à peu près transparente, résultant de l’épanouissement de la pulpe du nerf optique, et destinée à recevoir l’impression de la lumière.
Arrivée sur le corps et les procès ciliaires, elle adhère à ces parties et se prolonge jusqu’à la circonférence du cristallin, où elle semble se confondre avec la membrane d’enveloppe de cette lentille.
b. — Milieux de l'œil
1° Humeur aqueuse (fig. 121 du texte, m, n), — C’est un liquide renfermé dans la partie de l’œil située en avant du cristallin, c’est-à-dire dans la chambre antérieure et la chambre postérieure du globe de l’œil. Il est sécrété par une membrane particulière, amorphe, qui l’enveloppe (membrane de Descemet).
2° Humeur vitrée (fig. 121 du texte, l). — Encore appelée corps vitré ou hyaloïde, l’humeur aqueuse occupe toute l’étendue de la cavité de l’œil située en arrière du cristallin. Elle est beaucoup plus fluide que l’humeur aqueuse et se trouve contenue dans les mailles d’une membrane fine, transparente, la membrane hyaloïde.
3° Cristallin (fig. 121 du texte, j). — C’est le plus dense des milieux de l’œil. Il a la forme d’une lentille biconvexe, dont la moitié postérieure est plus bombée que l’antérieure.
Formé de fibres disposées en couches concentriques, le cristallin a une densité qui augmente de la surface vers le centre.
Comme les milieux précédents, il est enveloppé d’une membrane dite capsule cristalline.
Son rôle est de concentrer les rayons lumineux à la manière des lentilles dans les instruments d’optique.
L’opacité complète ou partielle du cristallin a reçu le nom de cataracte.
Mécanisme de la vision.
La vision étant le résultat de l’impression produite sur l’œil par les rayons de lumière qui s’échappent d’un corps lumineux par lui-même ou simplement éclairé, il nous reste à examiner par quel mécanisme se produit cette impression.
Lorsqu’un rayon lumineux rencontre perpendiculairement la surface d’un milieu transparent, il le traverse sans changer de direction. Mais, s’il y arrive obliquement, il éprouve une déviation connue sous le nom de réfraction.
Cette déviation le rapproche de la perpendiculaire s’il passe d’un milieu moins dense dans un milieu plus dense ; elle l’en écarte dans le cas contraire.
p. 307On peut se rendre compte de ce fait par l’examen de la figure 123 du texte représentant un cube de cristal traversé par les rayons lumineux AB et CB. Le rayon AB, perpendiculaire, le traverse sans éprouver de déviation ; seul, le rayon oblique CB éprouve une réfraction qui le rapproche de la perpendiculaire, dont il s’éloigne, d’ailleurs, pour passer dans l’air, milieu moins dense que le cristal.
Fig. 123. — Réfraction des rayons lumineux dans un cube de cristal.
Nous trouvons, d’une façon très évidente, la démonstration de ce fait dans la brisure apparente que présente à l’œil un bâton plongé obliquement dans l’eau.
Les choses se passent ainsi toutes les fois que le milieu traversé par les rayons lumineux présente des surfaces planes et parallèles ; mais, si les surfaces du corps dense se trouvent dans des directions différentes, les rayons suivent eux-mêmes une marche autre que celle indiquée précédemment.
Prenons pour exemple une lentille biconvexe : les courbes de celle-ci pouvant être considérées comme une succession de surfaces planeslorsque les rayons lumineux parallèles viendront à la traverser, ils seront réfractés comme le montre la figure 124 du texte. Le rayon CD arrivant perpendiculairement n’éprouvera pas de déviation. Par contre, le rayon AB arrivant obliquement se rapprochera de la perpendiculaire HB au point d’incidence, tandis qu’il s’en éloignera au point d’émergence, en sortant de la lentille. De même pour le rayon EF.
Fig. 124. — Réfraction des rayons lumineux dans une lentille biconvexe.
p. 308Les rayons lumineux parlant d’un même point arrivent en divergeant à la surface de la lentille ; mais ils sont réfractés comme s’ils étaient parallèles.
Si les rayons partent d’un corps ayant une certaine étendue, celui-ci envoie de sa surface un grand nombre de rayons divergents formant des cônes dont la base est figurée par l’une des faces de la lentille. Les images qui se forment alors sont renversées, comme nous allons essayer de le démontrer en ce qui concerne l’œil, où les choses se passent absolument comme ci-dessus.
Le globe oculaire, relativement à la vision, pouvant, en effet, être considéré comme une lentille biconvexe formée par la cornée, l’humeur aqueuse, le cristallin, le corps vitré et, conséquemment, composée de milieux de densités différentes, si l’on suppose une flèche AB (fig. 125 du texte) située à une certaine distance de l’œil, elle enverra par chacun de ses points des cônes lumineux dont la base sera représentée par la face antérieure de la cornée. De sa partie supérieure partira le cône A, qui viendra réunir ses rayons en C, de même que ceux du cône B se réuniront en D. Il s’en suit que l’image de la flèche peinte sur la rétine sera renversée.
Fig. 125. — Réfraction, dans l’œil, des rayons lumineux partant d’un corps ayant une certaine étendue.
Il y a lieu de faire remarquer que les rayons les plus rapprochés de l’axe forment seuls une image nette. Ceux de la périphérie, par suite de ce qu’on appelle l’aberration de sphéricité, rendent cette image diffuse. Néanmoins, grâce à la présence du diaphragme figuré par l’iris, la netteté des images est sensiblement uniforme pour les objets qui ne sont ni trop éloignés, ni trop rapproché.
p. 309L’enduit noir de la choroïde et l’uvée absorbent, d’ailleurs, les rayons qui, après avoir été réfléchis, seraient venus une seconde fois impressionner la rétine, produire l’éblouissement, et rendre ainsi l’image confuse.
Cette particularité explique bien pourquoi les animaux qui ont la choroïde privée de matière colorante, comme les albinos, ne peuvent supporter la vue d’objets fortement éclairés et voir distinctement au grand jour.
Les images perdent de leur netteté à de grandes et à de très petites distances, par suite de la réunion des divers rayons de chaque cône lumineux, soit en avant, soit en arrière de la rétine. Cependant, par suite de la faculté que possède l’animal d’adapter sa vue aux différentes distances, ce qui se passerait dans un appareil de physique n’a pas lieu dans un œil normal : « Quelle que soit (dans de certaines limites) la distance du point lumineux, nous pouvons toujours faire en sorte que le sommet du cône oculaire vienne tomber précisément sur la rétine : nous pouvons regarder alternativement et voir presque avec une égale netteté une étoile et le bout de notre nez13 . » ,
Sous ce rapport, l’œil présente, toutefois, de grandes différences individuelles. Il est des animaux qui voient de très près (myopie), d’autres de très loin (presbytie) ; certains, enfin, ne voient bien ni de très loin ni de très près (hypermétropie).
La myopie est une aberration visuelle dans laquelle le foyer des rayons lumineux se trouve en avant de la rétine, s’ils viennent d’objets éloignés ; aussi, donnent-ils des images confuses. Elle résulte d’une trop forte courbure du cristallin, de la cornée, d’un allongement antéropostérieur de l’œil qui éloigne la rétine du cristallin, ou, le plus souvent, d’une trop grande réfringence des milieux. La myopie se corrige par les verres biconcaves.
Dans l’hypermétropie, le foyer des rayons lumineux se trouve toujours en arrière de la rétine. Cet état résulte d’un raccourcissement du diamètre antéro-postérieur de l’œil ou d’un défaut du pouvoir convergent des milieux.
Quant à la presbytie, qu’il ne faut pas confondre avec l’hypermétropie, elle est due à un affaiblissement du pouvoir d’adaptation. Ces deux derniers étals se corrigent par les verres convexes.
p. 310L’impression qui donne lieu à la sensation de la forme, de la couleur et des autres propriétés optiques des corps, est due à un état particulier de la rétine dont la nature est tout à fait inconnue. Le seul point parfaitement démontré, c’est qu’une fois produite, l’impression est transmise au cerveau par l’intermédiaire du nerf optique, qui présente cette double particularité d’être absolument insensible et de communiquer les impressions à la partie de l’encéphale qui lui est opposée.
Les expériences ont effectivement mis hors de doute que la destruction des tubercules bigéminés d’un côté entraîne la perte de vue de l’autre.
L’image des objets qui se peint sur la rétine, bien qu’elle se trouve dans l’œil, fait cependant voir ces objets en dehors de l’organe. On a considéré ce fait comme le résultat de l’expérience, de l’habitude, et on a cité à l’appui de cette hypothèse l’exemple de l’aveugle de Cheselden qui voyait, après l’opération, les objets touchant ses yeux. Mais il est facile de démontrer que c’est là une erreur, puisque les jeunes animaux, tels que les veaux, les poulains, sont à peine sortis du sein de leur mère, qu’ils s’approchent de celle-ci et vont prendre sa mamelle au lieu de la chercher en eux-mêmes.
D’un autre côté, les deux images produites, une dans chaque œil, ne donnent pas la sensation de deux objets, mais elles déterminent une impression unique, comme si l’un des deux seulement recevait l’image, et cela, d’après M. Colin14 , très probablement parce que les deux impressions identiques sont converties par le cerveau en une seule sensation.
Nous avons vu, enfin, que les images des objets projetés sur la rétine sont renversées, mais que ces objets sont quand même vus droits et tels qu’ils sont réellement. Bien qu’on n’ait pu encore expliquer clairement cette singulière particularité, il suffit de réfléchir un peu pour concevoir que la direction de l’image importe peu, en définitive, pour la sensation ; car, dit M. Colin15 , si un homme est suspendu par les pieds, l’image des objets est peinte en sens inverse de l’image habituelle.
Les quelques détails dans lesquels nous venons d’entrer relativement p. 311à l’organisation et aux usages de l’œil étaient indispensables pour bien faire comprendre l’importance de cet organe, la nécessité de son intégrité, l’effet et la gravité de la plupart de ses maladies ou de ses défectuosités.
C’est pourquoi, d’ailleurs, après notre étude de l’œil extérieur, nous avons renvoyé le lecteur aux descriptions ci-dessus, persuadé qu’il y trouverait l’explication de certains faits qui, autrement, eussent pu rester à jamais vagues dans son esprit.
X. — Dixième plan
A. — Principaux os du crâne et de la face
Le dixième plan nous montre à nu les principaux os du crâne et de la face, à l’exception, toutefois, du maxillaire inférieur, que nous avons étudié dans le quatrième plan.
Nous nous contenterons de dire un mot ici de ces os et de leurs particularités, renvoyant pour tous les détails à l’appendice qui termine ce chapitre (I. Os de la tête).
À la partie postérieure du crâne se trouvent tout d’abord l’occipital (A), avec sa surface articulaire pour répondre à la première vertèbre cervicale (le condyle (B) et l’apophyse styloïde (C) du côté droit) et son apophyse basilaire (L), prolongement étroit que forme l’os en allant à la rencontre du sphénoïde.
Plus en avant, on voit le pariétal (D), que limitent, en bas, le frontal (N), en haut, l’occipital, et, de chaque côté, les temporaux.
De ces deux derniers os, le droit seul est visible sur la Pl. VII (E). Il présente, entre autres particularités, l’orifice externe du conduit auditif externe (F), qui fait communiquer l’oreille externe avec l’oreille moyenne, ainsi que nous l’avons vu déjà ; l’apophyse mastoïde (G) et sa base ; enfin, la surface articulaire qui répond au maxillaire inférieur : l’éminence sus-condylienne (J), la cavité glénoïde (K) et le condyle (J’).
L’occipital, le pariétal, le frontal et les temporaux constituent en grande partie les parois de la boîte crânienne.
Sur la limite latérale du crâne et de la face se trouve la cavité orbitaire (N’), mise à découvert par la section des arcades zygomatique et orbitaire qui la complètent en avant (voy. IVe plan).
p. 312Plus bas que cette cavité, qu’ils concourent, d’ailleurs, à former, on rencontre deux os : le lacrymal (O) et le zygomatique (P), dont le bord postérieur porte une apophyse dite zygomatique, qui se soude avec celle correspondante du temporal (voy. IVe plan).
Toujours en se rapprochant de l’extrémité antéro-inférieure de la tête, on trouve encore l’os propre du nez ou sus-nasal (Q), formant la voûte des cavités nasales ; puis le maxillaire supérieur (R), dont la face externe présente une crête verticale, dite épine maxillaire (T), qui se continue en haut avec le zygomatique et qu’on voit très bien se dessiner à l’extérieur, sous la peau. Cet os, par sa face interne, concourt à former les parois externes et le plancher des cavités nasales, et présente à son bord inférieur six grandes cavités, dites alvéoles, dans lesquelles sont implantées les dents molaires (S).
Enfin, tout à fait à l’extrémité inférieure de la tête, on rencontre l’intermaxillaire ou os incisif (U), qui loge les incisives (X) et les crochets (V).
Nous allons maintenant passer en revue les cavités nasales, également visibles sur la Pl. VII (recto et verso).
B. — Cavités nasales
Ces cavités, au nombre de deux chez le cheval : l’une droite, l’autre gauche, comprennent les naseaux, les fosses nasales proprement dites, et les diverticules désignés sous le nom de sinus.
Elles jouent un rôle important dans la respiration et l’olfaction.
1° Naseaux. — Les naseaux ou narines figurent deux ouvertures latérales par lesquelles l’air s’introduit dans les cavités nasales. Chacun d’eux présente deux lèvres ou ailes, l’une externe, l’autre interne, réunies par deux commissures.
En arrière et en haut de la commissure supérieure existe un cul-de-sac conique, la fausse narine (3), n’ayant aucune communication avec la cavité nasale et n’existant, parmi les animaux domestiques, que chez les solipèdes (cheval, âne, etc.).
La lèvre ou l’aile interne de chaque naseau, aplatie, amincie à son bord libre, a sa base constituée par un fibro-cartilage recourbé comme une virgule, dont la partie élargie forme, en s’adossant à celle du côté opposé, la plaque cartilagineuse du nez (2) recouverte par le p. 313muscle naso-transversal (voy. IIIe plan). Ce fibro-cartilage se prolonge en bas et en dehors par une pointe effilée qui s’enfonce dans l’aile externe.
La peau qui revêt extérieurement les ailes du nez se replie pour tapisser leur face interne et se continuer dans la fosse nasale avec la membrane pituitaire. Elle est mince, fine, chargée de pigment, et souvent marbrée par des taches de ladre (voy. IIe partie, Naseaux).
Ouvertures externes des cavités nasales et de tout l’appareil respiratoire, les naseaux sont très dilatables et présentent, par cela même, la faculté de n’admettre que la quantité d’air nécessaire au besoin de la respiration.
2° Fosses nasales proprement dites. — Les cavités nasales, qui continuent les naseaux, sont creusées dans l’épaisseur de la tête et se trouvent séparées l’une de l’autre par une cloison cartilagineuse (X, 1 et XII, G) s’appuyant sur le vomer.
Elles présentent deux parois latérales, un plafond ou voûte, un plancher et deux extrémités.
La paroi latérale interne est formée par la cloison nasale.
La paroi latérale externe, constituée en grande partie par le susmaxillaire, est très anfractueuse, partagée qu’elle est en trois méats (verso, M, N, O), par les cornets, formés chacun d’une lame osseuse roulée sur elle-même se continuant inférieurement par une charpente fibro-cartilagineuse qui prolonge leur section nasale jusqu’à l’orifice externe du nez, et distingués en cornet ethmoïdal et cornet maxillaire (verso, H, J).
Le plafond, confondu avec le méat supérieur, est constitué par les sus-nasaux.
Le plancher repose sur la voûte palatine, dont la planche VII nous montre une coupe (verso, K).
L’extrémité antéro-inférieure est constituée par la narine.
L’extrémité postéro-supérieure forme un arrière-fond occupé par les volutes ethmoïdales (voy. Appendice, I, Os de la tête) et communique avec la cavité pharyngienne par une ouverture ovalaire largement béante, dite ouverture gutturale de la fosse nasale, située en bas et en arrière de la masse latérale de l’ethmoïde.
3° Sinus. — Les sinus sont des diverticules des fosses nasales plus ou moins anfractueux, creusés dans l’épaisseur des os de la tête, autour p. 314des masses ethmoïdales. On en compte cinq de chaque côté, qui sont : les sinus frontal, maxillaire supérieure, sphénoïdal, ethmoïdal et maxillaire inférieur. Les quatre premiers communiquent ensemble ; seul, le dernier est isolé.
Le sinus frontal (verso, E) est situé au côté interne de l’orbite dans des anfractuosités du frontal, de l’os nasal, du lacrymal et de l’ethmoïde. Il communique avec le sinus maxillaire supérieur.
Le sinus maxillaire supérieur, le plus vaste de tous, est creusé au dessous de l’orbite, entre le grand sus-maxillaire, le zygomatique, l’ethmoïde et le lacrymal. Il communique avec le sinus ethmoïdal.
Le sinus sphénoïdal (verso, F), creusé entre les lames du palatin et dans le corps du sphénoïde, est adossé contre le sinus du côté opposé, avec lequel il communique.
Le sinus ethmoïdal est constitué par la cavité intérieure de la grande volute ethmoïdale (voy. Appendice, I, os de la tête, ethmoïde). Il communique avec le sinus maxillaire supérieur.
Le sinus maxillaire inférieur, creusé dans l’os grand sus-maxillaire au-dessous du sinus supérieur, n’a aucune communication avec les autres.
Tous les sinus d’un même côté s’ouvrent dans la fosse nasale correspondante par une fente courbe située au fond du méat moyen.
Les sinus ne paraissent pas jouer un rôle appréciable dans la respiration ou dans l’olfaction. « Ils semblent avoir pour usage exclusif de donner plus de volume à la tête sans augmenter son poids, et de fournir ainsi de larges surfaces d’insertion aux muscles fixés sur cette région osseuse16 . »
Pituitaire. — C’est la membrane muqueuse qui tapisse les cavités nasales et les sinus. Elle se continue avec le tégument cutané de la face interne des ailes du nez et possède un grand nombre de vaisseaux sanguins et de nerfs. Parmi ceux-ci, les nerfs olfactifs ou de la première paire paraissent être exclusivement impressionnés par les particules odorantes ; or, comme leurs ramifications ne descendent pas au-dessous du tiers supérieur des cavités nasales, il en résulte que la partie seule de la pituitaire qui tapisse les volutes ethmoïdales, le haut des cornets,p. 315 de la cloison médiane, et le fond des méats, est la véritable muqueuse olfactive.
Mince, déliée, d’un rose tirant sur le jaune, celle-ci est continuellement humectée par un liquide propre à fixer et à dissoudre les particules odorantes.
Rôle des cavités nasales dans la respiration.
L’entrée des cavités nasales, connue sous le nom de naseaux, constamment béante, se dilate toujours très sensiblement lors de l’inspiration, mais plus ou moins suivant que celle-ci est profonde ou ordinaire. Il en est de même de la fausse narine.
La dilatation des naseaux est isochrone avec celle du thorax17 , et ne semble point la précéder, comme on pourrait le croire. Cette dilatation n’apporte aucun changement dans le diamètre des cavités nasales, celles-ci ayant leurs parois osseuses et par suite inextensibles. L’inspiration met tout simplement en mouvement l’air qui remplit les cavités nasales et renouvelle dans de faibles proportions celui qui se trouve emprisonné dans les circonvolutions des cornets, des nombreuses volutes ethmoïdales et dans les cavités des sinus.
Lors de l’expiration, la colonne d’air, après avoir traversé le pharynx, s’engage dans les cavités nasales et s’échappe par les naseaux revenus sur eux-mêmes, si le voile du palais est abaissé et la bouche fermée.
Si la bouche est béante et le voile du palais relevé, une partie de la colonne d’air s’échappe par cette cavité.
De l’olfaction.
(Mécanisme suivant lequel les matières odorantes agissent sur la pituitaire)
En dehors de leur rôle dans la respiration, les cavités nasales sont encore les organes du sens de l’odorat. Le mécanisme suivant lequel les matières odorantes agissent sur la pituitaire est simple : « Les particules portées par l’air viennent se mettre en rapport avec les papilles de la pituitaire, elles se dissolvent dans la liqueur qui les p. 316humecte, et peuvent ainsi agir par contact sur les divisions nerveuses18 . »
Ces effluves odorants, pour impressionner la pituitaire, doivent pénétrer en notable proportion dans le nez. Celles qui y arrivent sans le secours de l’inspiration ne peuvent ordinairement suffire. Aussi, d’après M. Colin, si on lie la trachée d’un cheval après l’avoir sectionnée dans un point inférieur à la ligature, l’animal ayant les yeux ouverts ne s’aperçoit point de la présence du foin, de l’avoine, déposés sous ses lèvres.
Le sens de l’olfaction est beaucoup plus délicat chez les animaux que chez l’homme. « Leur odorat est si parfait, dit Buffon, qu’ils sentent de beaucoup plus loin qu’ils ne voient ; non seulement ils sentent de très loin les corps présents et actuels, mais ils en sentent les émanations et les traces longtemps après qu’ils sont absents et passés. »
Il se lie au sens du goût pour faire connaître les aliments qui conviennent à chaque espèce.
Enfin, il sert à faire découvrir aux mâles les femelles très éloignées en rut et leur apprend à les distinguer, sans les voir, des femelles pleines ou appartenant à d’autres espèces.
Le verso du Xe plan nous montre encore, en haut, la cavité crânienne, divisée par la protubérance occipitale interne (C) en un compartiment cérébral (A) et un compartiment cérébelleux (B), et présentant, dans le plan médian et en avant, l’apophyse crista-galli (D).
Nous examinerons ces parties avec tous les détails que comporte leur importance, à propos du XIIe plan.
XI. — Onzième plan
Muscles de l'hyoïde, du pharynx, du larynx, de la langue et du voile
Du palais. Glandes maxillaire et sublinguale
Sur le plan médian, au-dessous et en arrière de la mâchoire supérieure et du crâne, en dedans des deux branches du maxillaire inférieur, on trouve un certain nombre de muscles groupés autour de l’os p. 317hyoïde, du pharynx, du larynx, de la langue et du voile du palais, qu’ils sont chargés de mettre en mouvement. Nous allons tout d’abord dire un mot de ces muscles et de deux glandes salivaires importantes, les glandes maxillaire et sublinguale, que comprend également le XIe plan, réservant la description du pharynx, du larynx, de la langue et du voile du palais pour le plan suivant.
Quant à l’hyoïde, nous renvoyons pour les détails qui concernent cet os à l’appendice du chapitre premier (I, Os de la tête). Pour le moment, nous nous contenterons de savoir qu’il résulte de la réunion de plusieurs pièces distinctes disposées en trois séries : le corps, qui se plonge dans la langue, lui servant ainsi de support de même qu’au larynx et au pharynx ; les branches, composées elles-mêmes de deux parties, quelquefois trois, dont l’une, la petite corne ou la petite branche, répond au corps, tandis que l’autre, l’os kératoïde19 ou la grande branche (4), remonte, en arrière et en haut, jusqu’au temporal, avec lequel elle s’unit.
1° Muscles de l’hyoïde. — Les muscles plus spécialement chargés de mouvoir l’hyoïde sont : le mylo-hyoïdien, précédemment étudié (voy. VIIIe plan) ; le stylo-hyoïdien (6), occupant l’espace compris entre l’apophyse styloïde de l’occipital et la partie supérieure du bord postérieur de l’os kératoïde ; le grand kérato-hyoïdien (7), situé sur le côté de l’appareil laryngo-pharyngien, dans la même direction que la grande branche de l’hyoïde dont il réunit l’extrémité supérieure au corps ; le petit kérato-hyoïdien, très petit faisceau invisible sur la planche VII et situé entre la corne styloïdienne et l’extrémité inférieure de l’os styloïde ou kératoïde ; le génio-hyoïdien (18), étalé de la surface génienne du maxillaire inférieur au corps de l’hyoïde ; le transversal de l’hyoïde, court ruban musculaire, réunissant supérieurement les deux petites cornes.
2° Muscles du pharynx. — Les muscles pairs constituant la couche charnue du vestibule membraneux commun aux voies digestives et aux voies aériennes, ou pharynx, sont : Le ptérygo-pharyngien (14), se dirigeant de l’apophyse ptérygoïde du sphénoïde (voy. Appendice, I, Os de la tête) sur les faces latérales du pharynx ; l’hyo, le thyro, le crico-pharyngien (8, 9, 10), se p. 318terminant au-dessous du pharynx et procédant, le premier, de l’hyoïde, le second, du cartilage thyroïde, le troisième, du cartilage cricoïde du larynx ; le kérato-pharyngien, étroite bandelette invisible sur la planche VII, descendant de la grande branche de l’hyoïde sur les côtés du pharynx.
Les quatre premiers muscles sont des constricteurs du pharynx ; seul, le dernier agit comme léger dilatateur de la poche pharyngienne.
3° Muscles du larynx. — Outre qu’il suit tous les mouvements de l’hyoïde, le larynx est aussi mû par des muscles propres qui ont pour but de lui imprimer des mouvements de totalité, ou qui font jouer les unes sur les autres les différentes pièces de sa charpente cartilagineuse. Ces muscles sont :
Le sterno-thyroïdien (13), qui sera décrit plus loin, en parlant du cou ; l’hyo-thyroïdien (11) situé à la face externe du larynx ; l’hyo-épiglottique, non visible sur la planche VII et placé en avant de l’épiglotte ; le crico-thyroidien (12), appliqué sur le côté et en arrière du larynx ; les crico-aryténoïdiens postérieur et latéral, situés profondément, le premier en arrière et en haut, le second sur les côtés du larynx ; le thyro-aryténoïdien, logé à la face interne du thyroïde ; enfin, l’aryténoïdien, placé sous la muqueuse pharyngienne, au-dessus des cartilages aryténoïdes.
La direction et les attaches de tous ces muscles se déduisent facilement de leurs noms.
4° Muscles de la langue. — Les muscles de la langue, chez le cheval, sont au nombre de cinq paires et situés en avant des précédents sur le XIe plan. Ce sont :
Le kérato-glosse (15), longue bandelette rubanée se dirigeant de la grande branche de l’hyoïde vers l’extrémité libre de la langue ; le basio-glosse ou grand hyo-glosse (16), le plus volumineux de tous, s’étendant du corps de l’hyoïde sur la langue, dont il occupe toute la face latérale, immédiatement sous la muqueuse buccale ; le génio-glosse (17), dont les fibres, disposées en éventail dans le plan vertical et médian de la langue, se dirigent de la surface génienne du maxillaire inférieur sur toute la face supérieure de la langue (19) ; enfin, le petit hyo-glosse et le pharyngo-glosse, très petits faisceaux invisibles sur la pl. VII, situés à la base de la langue.
p. 319En se contractant, ces muscles portent la langue en avant, en arrière, ou de côté.
5° Muscles du voile du palais. — Les muscles du voile du palais sont tous pairs et au nombre de quatre :
Le pharyngo-staphylin et le palato-staphylin, situés dans l’épaisseur même du voile du palais, et non figurés, pour cette raison, sur la pl. VII ; enfin, les péristaphylins externe et interne (5), s’étendant de l’apophyse styloïde de l’occipital jusqu’à la charpente fibreuse du voile.
Ces muscles tendent le voile du palais et rapprochent son bord libre de l’infundibulum œsophagien pendant la déglution pharyngienne.
6° Glandes maxillaire et sublinguale. — La glande maxillaire, la plus importante des deux, est située sur le plan latéral du larynx, en dedans de la parotide (voy. fig. 115 du texte) et se termine par un canal excréteur, dit canal de Warton, qui vient s’ouvrir, près du frein de la langue, sur un tubercule nommé barbillon.
Quant à la glande sublinguale (voy. fig. 115 du texte), placée immédiatement à la face interne du muscle mylo-hyoïdien, elle se termine par quinze ou vingt petits canaux qui, partant de son bord supérieur, s’ouvrent directement dans la bouche.
XII. — Douzième plan
La coupe verticale de la tête à droite de la ligne médiane, que figure le XIIe plan, nous fait pénétrer à l’intérieur de cavités très importantes, dont nous allons avoir à nous occuper : la bouche, le pharynx, les poches gutturales, le larynx et la boîte crânienne.
En respectant la cloison médiane du nez (G), cette section de la tête laisse de côté les cavités nasales, qui ont d’ailleurs été étudiées à dessein à propos du plan X.
A. — Bouche
Premier vestibule du tube digestif, la bouche est située entre les deux mâchoires, allongée suivant le grand axe de la tête, et percée de deux ouvertures : l’une antérieure, circonscrite par les lèvres ; l’autre, postérieure, séparée du pharynx par le voile du palais.
Six régions principales sont à étudier dans la bouche : les lèvres, les p. 320joues, le palais ou voûte palatine, le voile du palais, les dents, et la langue.
a. — Lèvres
Les lèvres (27) sont au nombre de deux : une supérieure et une inférieure, réunies de chaque côté par une commissure.
Elles sont recouvertes, extérieurement, par la peau qui est fine et tapissée de poils soyeux et courts, parmi lesquels on remarque de longs crins raides servant d’organes de tact ; intérieurement, par la muqueuse buccale. Entre ces deux membranes existent des vaisseaux (artères palato-labiales et coronaires), des nerfs (facial et cinquième paire encéphalique), des glandules salivaires et des muscles. Ceux-ci ont été précédemment étudiés à propos du IIIe plan.
b. — Joues
Les joues closent latéralement la cavité buccale et comprennent dans leur structure : une couche externe, cutanée ; une couche moyenne, glandulaire et musculaire (voy. IIIe plan) ; une couche interne, muqueuse ; des vaisseaux et des nerfs.
c. — Palais
Le palais, ou voûte palatine (J), constitue la paroi supérieure de la bouche. Il se trouve circonscrit par les dents molaires, les incisives supérieures et le voile du palais.
La muqueuse qui tapisse cette région est plus épaisse que sur les autres points de la bouche et présente un sillon médian qui la partage en deux moitiés égales. Chacune de celles-ci est elle-même divisée en un certain nombre de sillons transversaux (vingt environ), à concavité tournée en arrière.
Le palais renferme des nerfs et deux artères volumineuses dites palato-labiales. Celles-ci marchent parallèlement l’une à l’autre sur les côtés de la région, jusqu’au trou incisif (Voy. Appendice, I, Os de la tête, petit sus-maxillaire), dans lequel elles s’engagent après s’être réunies en un tronc unique.
d. — Voile du palais
Le voile du palais (J’) représente une espèce de soupape musculomembraneuse située entre la bouche et le pharynx, qu’elle sépare. Son bord antérieur, continu avec le palais, est attaché sur l’arcade palatine. Son bord postérieur, seul libre, embrasse étroitement la base de l’épiglotte, le plus généralement renversée sur la face postérieure du voile ; il est continué à ses extrémités par deux prolongements amincis, les piliers postérieurs, qui gagnent les parois latérales du pharynx.
En raison du grand développement du voile du palais chez les solipèdes, son bord postérieur ferme complètement, dans les intervalles de la déglutition, l’ouverture par laquelle la bouche communique avec le pharynx, c’est-à-dire l’isthme du gosier : d’où l’impossibilité à peu près absolue, pour le cheval, de respirer par la bouche.
Le voile palatin comprend dans sa structure : une membrane fibreuse, une membrane muqueuse, des glandules salivaires, des vaisseaux, des nerfs, et des muscles. Ceux-ci ayant été précédemment étudiés (XIe plan), nous n’y reviendrons pas ici.
e. — Langue
La langue (24) s’étend depuis le fond de la bouche jusqu’aux dents incisives, entre les deux branches du maxillaire inférieur, où elle repose sur l’espèce de sangle que forment, en se réunissant, les deux muscles mylo-hyoïdiens.
On peut y reconnaître trois faces, trois bords, et deux extrémités.
La face supérieure ou dorsale est hérissée de nombreux prolongements ou papilles qui lui donnent un aspect tomenteux. « Deux de ces papilles, remarquables par leur énorme volume, leur apparence lobulée et la situation qu’elles occupent au fond de deux excavations placées côte à côte, près de la base de l’organe, sont nommées lacunes de la langue, ou trous borgnes de Morgagni20 . »
Les faces latérales présentent des orifices de quelques glandules linguales.
p. 322L’extrémité postérieure, ou base, offre deux replis la réunissant, de chaque côté, au voile du palais ; ce sont les piliers postérieurs de la langue, comprenant dans leur intérieur un volumineux amas de glandules salivaires.
L’extrémité antérieure est tout à fait indépendante à partir du milieu de l’espace interdentaire et prend, pour cette cause, le nom de partie libre, par opposition à la base, qui reçoit la dénomination de partie fixe.
Aplatie de dessus en dessous, la partie libre de la langue est réunie au corps du maxillaire inférieur par un repli muqueux appelé pilier antérieur ou frein de la langue, sur les côtés et à la base duquel on trouve deux petits mamelons fibro-cartilagineux nommés barbillons, où viennent déboucher les canaux excréteurs des glandes maxillaires.
f. — Dents
Les dents ayant été décrites avec tous les détails nécessaires à propos de l’âge, dans la IIe partie de notre livre, nous n’y reviendrons pas ici.
Muqueuse buccale. — L’intérieur de la cavité buccale est tapissé par une membrane tégumentaire qui se continue extérieurement avec la peau des lèvres. Cette membrane revêt la face interne des lèvres et des joues ; puis elle s’étend sur la langue, la voûte palatine, le fond du canal, la base des dents, où elle constitue les gencives, et se continue enfin, au niveau de l’isthme du gosier, avec la muqueuse pharyngienne.
La muqueuse buccale est recouverte d’un épithélium très épais dans les points qui sont plus spécialement exposés au contact des substances alimentaires, afin de ne pas être blessée par ces substances, ce qui fût certainement souvent arrivé sans la disposition spéciale que nous venons de signaler.
Cette membrane, enfin, présente dans sa partie linguale les petits organes préposés à la gustation (Voy. Langue et Gustation).
Rôle des parties constituantes de la bouche dans la digestion.
Avant de subir les modifications qui constituent les phénomènes essentiels de la digestion, et que nous examinerons plus loin (Voy. p. 323 IIIe partie, § 3, Cavité abdominale, Digestion), les aliments sont soumis à l’action des organes précédents, qui les introduisent dans la bouche, les broient, et facilitent leur passage dans l’estomac et l’intestin, où ils sont finalement absorbés.
Nous allons dire un mot de la manière dont s’opèrent les actes de préhension, de mastication et de déglutition des aliments21 .
1° Préhension des aliments. — Chez le cheval, la préhension des aliments solides s’opère à l’aide des lèvres et des dents incisives.
La lèvre supérieure, très mobile et d’une exquise sensibilité, les rassemble et les attire ; puis, les dents incisives les saisissent et les détachent ; enfin, la langue les fait parvenir dans le fond de la bouche, sous les dents molaires.
On peut, à l’aide d’une expérience simple et facile, mettre en évidence le rôle spécial des lèvres, des dents et de la langue. « En effet, dit M. Colin22 , si, au moyen d’un fil assez fort traversant la lèvre supérieure, on renverse celle-ci sur le nez, en la maintenant attachée au licol, et si l’on renverse également l’inférieure sous la houppe du menton, on voit que l’animal engage l’extrémité de ses mâchoires entre les barreaux du râtelier et en tire le foin par pincées assez considérables ; mais, dès qu’il vient à desserrer les dents, le fourrage n’étant plus soutenu par les lèvres, ne peut parvenir dans la bouche et tombe... »
La préhension des liquides se fait d’après deux modes distincts : 1° Par succion, chez le poulain à la mamelle ; 2° par pompement, chez l’animal adulte ; les lèvres sont alors immergées dans le liquide, et le vide se fait dans la bouche par les mouvements de la langue.
2° Mastication. — Une fois introduits dans la bouche, les aliments y sont broyés, réduits en pâte, de manière à être attaqués plus facilement par les liquides digestifs.
Cette opération complexe a pour agents les mâchoires munies de leurs dents et mises en mouvement par des muscles spéciaux.
Les dents incisives servent tout simplement à pincer le fourrage dans le râtelier et à couper l’herbe.
Les canines n’ont pas d’usages très caractérisés.
Seules, les molaires ont une action bien manifeste dans la mastication.p. 324 Elles présentent, en effet, de larges surfaces de frottement sur lesquelles les rubans d’émail dessinent des reliefs plus ou moins irréguliers faisant de ces organes « des meules qui se repiquent d’elles-mêmes », suivant l’expression de Cuvier (voy. IIe partie, Âge).
Les tables des molaires offrent encore ceci de remarquable qu’elles sont inclinées de dehors en dedans à la mâchoire supérieure, et de dedans en dehors à la mâchoire inférieure.
Grâce à cette disposition particulière des dents et aux mouvements d’abaissement, de rapprochement, de latéralité, d’avant en arrière et d’arrière en avant, que la mâchoire inférieure, seule mobile chez le cheval, peut exécuter lorsque ses muscles spéciaux entrent en action, la mastication des matières alimentaires est parfaite dans les conditions ordinaires.
Toutefois, cet acte exige encore le concours des lèvres, des joues et de la langue.
Outre qu’elles servent à la préhension des aliments solides et liquides, les lèvres retiennent aussi les aliments dans la bouche et s’opposent à l’écoulement de la salive au dehors.
Les joues agissent également dans l’acte qui nous occupe en empêchant les matières alimentaires de fuir en dehors des arcades molaires et en les ramenant, sous ces dernières à mesure qu’elles échappent à leur action.
La langue agit à la fois dans la préhension des aliments, la mastication, la déglutition et la gustation. Dans la mastication, elle joue le rôle d’une main qui attire les aliments à l’intérieur de la bouche, les pousse sous les dents, les y ramène à chaque instant, et, finalement, les rassemble pour les diriger vers le pharynx, lors de la déglutition.
La mastication est un des phénomènes les plus importants de la digestion.
Elle devient de plus en plus lente et imparfaite à mesure que l’animal avance en âge, grâce surtout à l’usure et à l’irrégularité des dents qui accompagnent ordinairement la vieillesse. Alors, la division des aliments est tout à fait incomplète ; ceux-ci conservent dans leur trame une notable proportion de leurs matières solubles ; les fourrages se tassent dans les renflements de l’intestin ; l’avoine conserve une partie de ses grains à peu près intacte ; l’animal, enfin, se nourrit mal et contracte de fréquentes et graves indigestions.
p. 3253° Déglutition. — Lorsque les aliments ont été suffisamment divisés par les dents et humectés par la salive, ils sont réunis en petites masses ou bols à la face supérieure de la langue ; puis, celle-ci se contracte de son extrémité libre vers sa base, amène le bol à la face inférieure du voile du palais qui, soulevé par sa poussée, le laisse pénétrer dans le pharynx, du pharynx dans l’œsophage, et de là dans l’estomac. Ce passage des aliments et des liquides de la bouche dans l’estomac a reçu le nom de déglutition, et s’accomplit, comme nous venons de le voir, en trois temps.
De la gustation.
En dehors de son rôle dans la digestion, la bouche sert encore à la gustation. C’est pendant leur séjour dans la cavité buccale, que les aliments provoquent cette sensation particulière qui permet à l’animal de reconnaître leurs qualités.
Mais, toutes les régions de la bouche ne jouissent pas de la propriété d’être impressionnées par les substances sapides. La face supérieure de la langue est beaucoup plus sensible à l’action de ces substances que les lèvres, les joues et le palais.
D’un autre côté, pour impressionner l’organe du goût, les substances alimentaires ou autres doivent être solubles dans la salive, si elles ne sont déjà liquides ou gazeuses.
Le sens du goût est beaucoup plus sûr chez les animaux que chez l’homme. Les herbivores, en effet, ne s’empoisonnent pas dans les conditions ordinaires avec les plantes vénéneuses, et, s’ils sont surtout guidés dans cette sélection par l’odorat, il n’est pas moins manifeste que souvent, trompés par l’odeur, ils prennent des aliments qu’ils rejettent ensuite parce que le goût leur déplaît.
Le cheval, en particulier, a le sens du goût très développé : fréquemment il préfère s’abstenir plutôt que de prendre une nourriture qui lui répugne.
Chez les animaux sauvages le sens du goût est plus délicat que chez les animaux domestiques, qui ont moins souvent l’occasion de l’exercer. De même, les sujets vivant toujours dans les pâturages l’ont sensiblement plus perfectionné que ceux nourris sans cesse au râtelier.
« Le cheval, dit Vallon, est très friand des substances sucrées, et p. 326on peut tirer de cette préférence un parti avantageux pour son dressage. En lui donnant un aliment qu’il aime, on lui fait comprendre qu’on sait lui être agréable chaque fois qu’il fait bien ; par contre, en l’en privant, on le punit quand il est désobéissant.
« La sensibilité gustative n’est pas la même chez tous les chevaux. Les sujets de race noble, à tempérament nerveux, ont le sens du goût bien autrement délicat que ceux de race commune23 ».
B. — Pharynx ou arrière-bouche
Le pharynx ou arrière-bouche (15) est un vestibule membraneux commun au passage des aliments et de l’air, situé en arrière du voile du palais, qui le sépare de la bouche.
Il a une forme cylindrique et s’étend obliquement de haut en bas et d’avant en arrière, de la base du crâne sur l’appareil laryngien.
« À l’extrémité supérieure du grand axe de la cavité pharyngienne, on remarque : 1° en avant, les deux ouvertures postérieures des cavités nasales ; 2° en arrière et directement en regard des deux précédentes, les deux orifices pharyngiens des trompes d’Eustache (16).
« À l’extrémité inférieure de ce même axe, on trouve : 1° d’abord, au centre, un vaste orifice béant qui fait proéminence dans l’intérieur de la cavité pharyngienne, à la manière d’un robinet dans un tonneau ; c’est l’entrée du larynx (18) ; 2° en arrière et au-dessus, l’ouverture œsophagienne (17)24 »
La membrane muqueuse du pharynx fait suite à la muqueuse buccale.
Quant à sa couche charnue, elle a été examinée précédemment (voy. XIe plan).
Rôle du pharynx dans la digestion et la respiration.
Nous venons de voir, à propos du rôle physiologique de la bouche dans la digestion, que les aliments, après avoir franchi l’isthme du gosier, pénètrent dans le pharynx, qui s’est dilaté pendant la première période de la déglutition. Afin de ne pas nous répéter, nous n’ajouterons qu’un détail aux développements précédents, c’est qu’une p. 327fois parvenues dans l’arrière-bouche, les matières alimentaires ne peuvent pénétrer dans les cavités nasales parce que le bord postérieur du voile palatin, que nous savons très long chez le cheval, se relève alors assez pour venir rencontrer en arrière la paroi supérieure du pharynx et s’opposer au passage des aliments dans les ouvertures gutturales. D’un autre côté, le bol ne tombe pas dans le larynx, par suite du resserrement de la glotte et du renversement mécanique plus ou moins complet de l’épiglotte en arrière et en bas.
Dans la respiration, le pharynx est également maintenu dilaté lors de chaque mouvement inspiratoire. Il s’ensuit une tension moindre de l’air dans la cavité pharyngienne et une diminution de pression qui s’opposent, en même temps que l’abaissement du voile du palais, au retour de l’air par la bouche.
C. — Poches gutturales
Ainsi que nous l’avons vu précédemment, les poches gutturales (14) résultent d’une dilatation de la muqueuse qui tapisse la trompe d’Eustache (voy. Ier plan).
Ce sont deux sacs particuliers aux monodactyles accolés l’un à l’autre dans le plan médian, descendant jusqu’au niveau du larynx, et s’étendant, d’avant en arrière, depuis la partie antérieure du pharynx jusqu’à la face inférieure de l’atlas.
Les poches gutturales, qui communiquent avec l’arrière-bouche et la cavité tympanique, ont des fonctions assez obscures. Cependant, on admet en général qu’elles agissent dans l’audition (voy. 1er plan, Mécanisme de l’audition).
D. — Larynx
Le larynx (18) forme une boîte cartilagineuse légèrement déprimée d’un côté à l’autre, située dans l’espace intra-maxillaire, entre les deux cornes du corps de l’hyoïde (voy. appendice, I, Os de la tête), et percée d’outre en outre pour s’ouvrir, antérieurement, dans le pharynx et se continuer en arrière avec la trachée. Cet organe a pour base une charpente cartilagineuse formée de cinq pièces : les cartilages thyroïde, cricoïde, aryténoïde et l’épiglotte.
Le cartilage thyroïde (fig. 126 du texte, T), le plus étendu de tous, p. 328occupe les parties antérieure et latérales du larynx ; il se compose de deux plaques latérales ou ailes qui se réunissent antérieurement pour former une partie épaisse et rétrécie, le corps du thyroïde.
Fig. 126. Pièces cartilagineuses du larynx désarticulées.
Il s’articule, en avant, avec les cornes du corps de l’hyoïde ; en arrière, avec le cartilage cricoïde.
Le cartilage cricoïde (XII, 22, et fig. 126 du texte, C) a la forme d’un anneau avec un chaton tourné en haut. Compris entre les cornes de l’hyoïde, il supporte latéralement les aryténoïdes et répond : en haut, aux cartilages précédents ; en bas, au premier cerceau de la trachée.
Les cartilages aryténoïdes (XII, 20, et fig. 126 du texte, A, A’), au nombre de deux, sont situés en avant du cricoïde, au-dessus de l’entrée du pharynx. Chacun d’eux affecte la forme d’un bec d’aiguière.
L’épiglotte (XII, 19, et fig. 126 du texte, E) figure assez bien une feuille de laurier ou de sauge circonscrivant, par en bas, l’entrée du larynx, qu’elle bouche hermétiquement lors du passage du bol alimentaire à travers le vestibule du pharynx, par suite de son renversement en arrière et en bas.
Le larynx reçoit un grand nombre de vaisseaux sanguins et de nerfs.
Les nerfs proviennent du pneumogastrique (voy. IIIe partie, chap. I, appendice, II, Nerfs crâniens) ; ce sont les laryngés supérieur et inférieur. Le premier donne à la muqueuse laryngienne sa sensibilité propre. Le second, surtout moteur, se rend dans les muscles.
Comme nous le verrons plus loin, il est indispensable de connaître la situation et le trajet de ces nerfs si l’on veut se rendre un compte exact du rôle de l’appareil laryngien dans la respiration.
Les laryngés supérieurs naissent des pneumogastriques dans la partie supérieure de la région cervicale et gagnent directement les côtés du larynx.
p. 329Les laryngés inférieurs, ou récurrents, ont une origine différente. Le nerf du côté droit se détache du pneumogastrique dès l’entrée de ce dernier dans la cavité thoracique. Celui du côté gauche, au contraire, n’abandonne le pneumogastrique que vers la racine du poumon et remonte ensuite sous la face inférieure de la trachée, après avoir contourné la crosse de l’aorte.
Pour l’étude des nerfs laryngés, le lecteur devra consulter le paragraphe relatif au grand sympathique (voy. IIIe partie, chap. II, § 3, appendice) [•] , où se trouve une vue d’ensemble de ce nerf et du pneumogastrique.
Les muscles du larynx ayant été examinés à propos du XIe plan, nous nous contenterons ici de renvoyer à ce plan.
Quant à la muqueuse laryngienne, elle n’est qu’un prolongement de la muqueuse du pharynx, qui se replie au pourtour de l’ouverture supérieure du larynx pour tapisser la face interne de cette boîte cartilagineuse et se prolonger ensuite dans le tube trachéal. Elle recouvre de nombreuses glandules et possède une extrême sensibilité, grâce à laquelle l’entrée du tube aérien est interdite aux particules alimentaires. Le moindre attouchement met effectivement cette sensibilité en jeu et « détermine une énergique excitation réflexe sur les muscles constricteurs du larynx et de la poitrine, d’où résulte l’occlusion presque complète du tube laryngien et une toux violente qui expulse au dehors les substances dont le contact a déterminé l’irritation de la membrane laryngienne25 . »
Pour la clarté des développements suivants, il nous reste encore à dire un mot de la surface intérieure du larynx. Celle-ci se divise en trois parties : une moyenne appelée glotte ; une supérieure ou sus-glottique ; une inférieure ou sous-glottique.
La glotte représente une fente triangulaire comprise entre les deux cordes vocales, bandelettes élastiques faisant saillie à l’intérieur et de chaque côté du larynx. C’est la partie la plus rétrécie de l’organe.
La portion sus-glottique offre, entre autres particularités, l’entrée du larynx.
La portion sous-glottique se continue avec la trachée.
Rôle du larynx dans la respiration.
Comme partie constituante du conduit qui livre passage à l’air pendant la respiration, le larynx joue un rôle relativement secondaire.
Pendant l’inspiration, la glotte se dilate et l’appareil laryngien tout entier s’abaisse. Lors de l’expiration, au contraire, la glotte se resserre et le larynx éprouve dans sa totalité un léger mouvement d’ascension.
Ces mouvements du larynx, toujours isochrones avec ceux de la bouche, des naseaux et de la glotte, sont d’autant plus marqués que la respiration est plus pénible.
Si la glotte se rétrécit d’une façon continue par suite du gonflement inflammatoire de ses parties molles ou des parties adjacentes, si elle perd la faculté de se dilater par l’effet de la paralysie ou de l’atrophie partielle des muscles laryngiens résultant de la section ou de la compression, soit des nerfs pneumogastriques, soit des laryngés inférieurs, il en résulte une gêne considérable pour le passage de l’air se traduisant par un sifflement particulier connu sous le nom de cornage.
Quoique ce bruit reconnaisse, ainsi que nous venons de le voir, des causes très différentes par leur nature et par leur siège, il est évident aujourd’hui que la plupart des cas de cornages chroniques sont la conséquence d’une atrophie des muscles gauches de l’appareil laryngien26 . Or, cette fréquence de l’atrophie musculaire du larynx à gauche serait due, d’après M. le professeur Goubaux d’Alfort, à ce que le récurrent du côté correspondant, situé plus, superficiellement que le droit dans la portion inférieure du cou, est plus exposé aux compressions par le collier. , vétérinaire militaire, intitulé :
Pour d’autres, au contraire, le récurrent gauche se détachant du pneumogastrique dans la cavité thoracique, doit être très fréquemment comprimé par l’engorgement des ganglions de l’entrée de la poitrine, et il y a lieu, par cela même, d’admettre que, dans la généralité des cas, le cornage est la conséquence d’une affection avec engorgement des ganglions antéthoraciques (pneumonie, gourme, etc.).
Quoi qu’il en soit, l’air, après avoir franchi l’ouverture laryngienne, arrive au tube trachéal, que nous examinerons avec le cou, et se rend au poumon par l’intermédiaire de ce tube.
De la phonation.
La voix est l’ensemble des sons plus ou moins harmonieux que l’air expulsé du poumon fait entendre en traversant le larynx. Celui-ci compose donc essentiellement l’appareil vocal qui, toutefois, exige le concours des autres organes respiratoires pour remplir convenablement son rôle.
Toutes les parties de l’appareil laryngien n’agissent pas, d’ailleurs, dans la phonation ; ce sont les cordes vocales qui jouent le rôle le plus essentiel. Les propriétés dont elles jouissent leur permettent de vibrer sous l’influence de l’air que chassent les poumons et de donner des sons plus ou moins forts et rapides. Il se produit là, en somme, un phénomène comparable à celui qui se passe quand on souffle dans l’anche d’un hautbois : Par suite de son passage dans la fente de la glotte, l’air éprouve une collision ; « il vibre par le fait des vibrations des lèvres de la glotte, et ces vibrations vocales retentissent dans le pavillon naso-buccal27 ».
Fig. 127. — Hennissement du cheval, d’après M. Colin (violon)
La voix présente, chez les mammifères, des modifications infinies, dont les causes tiennent surtout à la conformation du larynx ; c’est ainsi qu’on distingue le cri, le chant et la parole.
Le cri est un son peu ou point modulé, aigu et souvent désagréable, que formulent exclusivement la plupart des animaux. Il offre lui-mêmep. 332 des différences très caractérisées suivant qu’il appartient à telle ou telle espèce. Chez le cheval, il prend le nom de hennissement et « consiste en une succession de sons saccadés, d’abord très aigus, puis graduellement plus graves, mais toujours très purs et d’un éclat remarquable28 », se produisant par une suite d’expirations courtes et comme convulsives (fig. 127 du texte).
Le hennissement du cheval, comme la voix de toutes les espèces animales, est plus accentué chez les sujets de haute stature que chez ceux de petite taille, chez les animaux adultes que chez les jeunes. D’un autre côté, il est plus fréquent chez le cheval entier que chez la jument et le cheval hongre, qui ne hennissent plus, si ce n’est très rarement ; encore, la voix de ces derniers diffère-t-elle assez sensiblement de celle de l’animal non mutilé : elle est plus brève, plus aiguë et moins éclatante.
Comme beaucoup d’autres animaux, le cheval jouit de la propriété de modifier sa voix pour exprimer ses sensations. Buffon lui reconnaît cinq sortes de hennissements : ceux de la joie, du désir (amour, attachement), de la colère, de la crainte et de la douleur.
E. — Axe centrale de l'appareil de l'innervation
« Centre perceptif, qui reçoit les excitations développées à la périphérie des organes et dans l’épaisseur de leur substance, centre excitateur, qui porte le mouvement à tous les autres tissus, siège des facultés instinctives et intellectuelles, préposé ainsi à la plus grandiose finalité physiologique29 », l’appareil de l’innervation comprend une partie centrale logée dans le canal rachidien (axe encéphalo-rachidien constitué par la mœlle épinière et l’encéphale), et une partie périphérique représentée par une double série de cordons blancs, les nerfs, s’échappant latéralement de la tige centrale et se distribuant, dans toutes les parties du corps (voy. Ire partie, Généralités).
Seul visible sur la coupe verticale de la tête et de l’extrémité supérieure du cou, que figure le plan XII, l’axe central de l’appareil nerveux sera spécialement examiné dans ce paragraphe.
p. 333Toutefois, afin d’éviter certaines répétitions inutiles, certains détails superflus quand nous examinerons les différentes régions du corps ou des membres et qu’il nous faudra figurer les nerfs qui se distribuent dans ces régions, nous dirons en même temps un mot de l’ensemble du système nerveux ou plutôt des rapports que chacune de ses divisions ou subdivisions entretient avec le reste de l’appareil.
L’axe central du système nerveux comprend une partie allongée, la mœlle épinière, terminée par un renflement antérieur, l’encéphale.
Il est doublement protégé par un étui osseux, le canal rachidien et la boîte crânienne, et par trois enveloppes, qui le séparent de l’étui précédent.
Nous allons tout d’abord dire un mot de ces parties enveloppantes et protectrices.
a. — Parties enveloppantes et protectrices
1. Étui osseux.
1° Canal rachidien (P). — Étui protecteur de la mœlle épinière, ce canal communique en avant avec la cavité crânienne et résulte de la réunion des trous vertébraux, ouvertures dont chaque vertèbre se trouve percée d’avant en arrière. Très large au niveau de l’atlas (C. C), il se rétrécit subitement dans l’axis (D. D), pour se dilater vers la base du cou et le commencement de la région du dos, diminuer de nouveau dans la partie moyenne de cette dernière région, s’agrandir encore au niveau de l’articulation de la tige rachidienne avec le membre postérieur, et enfin disparaître vers la quatrième ou cinquième vertèbre coccygienne.
2° Cavité crânienne (O). — Destinée à loger l’encéphale, cette cavité constitue une boîte irrégulièrement ovoïde dont les parois sont formées par le frontal, le pariétal, l’occipital, l’ethmoïde et les temporaux (voy. appendice, 1, Os de la tête). En haut et en arrière, sur la ligne médiane, elle présente la protubérance occipitale interne (A) qui, avec ses deux crêtes latérales, concourt à diviser la cavité en deux compartiments : l’un, postérieur, contenant le cervelet (2) ; l’autre, antérieur, plus grand, renfermant les hémisphères cérébraux (1) .
Inférieurement, elle est en grande partie constituée par la face supérieurep. 334 de l’apophyse basilaire, comme le figure très bien la planche VII (B).
L’extrémité postérieure de la cavité crânienne présente le trou occipital, qui la fait communiquer avec le canal rachidien.
Enfin, l’extrémité antérieure offre, dans le plan médian, l’apophyse crista-galli (N) de l’ethmoïde.
2. Enveloppes membraneuses.
Désignées d’une façon générale par le nom de méninges et distinguées en méninge externe, méninge moyenne et méninge interne, ces membranes sont plus connues sous les noms de dure-mère, d’arachnoïde, et de pie-mère.
1° Dure-mère. — De nature fibreuse, cette membrane est immédiatement en rapport avec l’étui osseux encéphalo-rachidien.
2° Arachnoïde. — L’arachnoïde représente une séreuse formée de deux feuillets : l’un, externe, se déploie à la face interne de la dure mère ; l’autre, interne, s’étend par l’intermédiaire de la pie-mère sur l’axe encéphalo-rachidien, dont le sépare encore le liquide ou fluide céphalo-rachidien.
3° Pie-mère. — Membrane cellulo-vasculaire, la pie-mère se trouve placée entre l’arachnoïde et l’axe cérébro-spinal, dont elle est l’enveloppe immédiate.
b. — Mœlle épinière
La mœlle épinière (XII, 10’, et fig. 128 du texte), mise à nu dans sa partie antérieure seulement par la section verticale de la tête fit de l’extrémité supérieure de l’encolure, que représente le plan XII, est la portion de l’axe central du système nerveux occupant le canal rachidien.
Quoique sa description ne trouve pas logiquement sa place dans ce chapitre, nous avons cru devoir l’y faire rentrer, tant par suite de la disposition particulière de la planche VII, que pour bien montrer les rapports intimes qui existent entre la mœlle épinière et l’encéphale, et ne pas scinder, enfin, la description des deux parties d’un même tout : l’axe encéphalo-rachidien.
p. 335Conformation extérieure. — La mœlle fait suite au bulbe (voy. Encéphale) et se termine en pointe dans le canal sacré, où on la voit se diviser en une infinité de cordons nerveux dont l’ensemble est connu sous le nom de queue de cheval.
Fig. 128. — Vue générale de la mœlle épinière.
Son poids est de 300 grammes environ chez l’animal de taille moyenne.
Elle a la forme générale d’un cylindre légèrement déprimé de dessus en dessous et présente, de distance en distance, des renflements correspondant aux dilatations du canal rachidien.
Sur la ligne médiane régnent, dans toute la longueur de l’organe, deux sillons profonds et très étroits : l’un supérieur, l’autre inférieur, dans lesquels s’enfonce la pie-mère. Il s’ensuit que l’axe médullaire est divisé en deux moitiés latérales, dont chacune donne naissance à la double ligne d’origine des racines supérieures et inférieures des nerfs rachidiens, racines qui, viennent se rassembler en faisceaux en regard des trous de conjugaison du rachis (fig. 128 du texte), ainsi que nous l’avons vu dans nos généralités, en parlant de l’appareil de l’innervation dans son ensemble.
Il est à remarquer, d’un autre côté, que la mœlle épinière ne remplissant jamais tout le canal rachidien, celui-ci peut se plier dans tous les sens et exécuter des mouvements très étendus sans la comprimer ou la tirailler.
Conformation intérieure. — La mœlle épinière se trouve constituée par une colonne de substance blanche renfermant une autre colonne de substance grise dont l’axe est occupé par un canal central.
Une coupe verticale de l’axe médullaire p. 336(fig. 129 du texte) montre encore les deux sillons30 que nous avons décrits à propos de la conformation extérieure de l’organe. Elle fait voir, enfin, que, par suite de la disposition de la substance grise en forme d’H majuscule, la matière blanche se divise, dans chaque moitié latérale de l’axe spinal, en trois cordons secondaires : l’un, supérieur, donnant naissance aux racines sensitives des nerfs rachidiens ; un autre, inférieur, duquel émergent les racines motrices ; le troisième, latéral, mal séparé de l’inférieur, avec lequel il se confond superficiellement.
Fig. 129. — Coupe verticale de la mœlle épinière du cheval grossie deux fois (région lombaire).
Structure. — Deux substances entrent, comme nous le savons, dans la structure de la mœlle : l’une, blanche, extérieure ; l’autre, grise, intérieure.
Propriétés de la mœlle épinière.
La mœlle épinière est à la fois sensible et excitable ; mais toutes ses parties ne jouissent pas des mêmes propriétés : les cordons supérieurs sont sensibles ; les inférieurs sont excitables ou excitomoteurs. Quant à l’axe gris, il est insensible aux stimulations ordinaires, et inexcitable, comme l’est la substance grise dans les diverses parties de l’encéphale ; c’est par lui que s’effectue la transmission des p. 337impressions sensitives. Si l’on irrite les cordons supérieurs de la mœlle dénudée sur l’animal vivant, celui-ci éprouve immédiatement une violente douleur se traduisant par des gémissements et des cris accompagnés de fortes secousses musculaires dues à l’action réflexe, comme nous le verrons dans un instant. Au contraire, les piqûres de stylet faites à leur surface, la compression de leur substance à l’aide de pinces très fines, provoquent exclusivement des contractions plus ou moins violentes dans les membres postérieurs.
La mœlle jouit, en outre, de propriétés conductrices très importantes : elle transmet de l’encéphale aux muscles les ordres de la volonté, et porte à l’encéphale les diverses impressions sensitives reçues dans toutes les parties du corps. « Les expériences les plus simples le montrent très clairement, dit M. Colin : Si l’on coupe la mœlle épinière en travers, sur un point quelconque de son étendue, comme l’a fait M. Flourens, et qu’on vienne ensuite à irriter les parties en arrière de la section, l’animal n’en éprouve aucune douleur, parce que les impressions ne peuvent plus, par suite de la solution de continuité, se propager aux centres sensitifs ; mais ces parties sont encore susceptibles de se contracter, puisque le principe de leurs mouvements non volontaires vient directement de la mœlle épinière, comme nous le verrons plus loin. Si, au contraire, on porte l’irritation sur les parties en avant de la section et liées au tronçon antérieur, il y a douleur et convulsions, comme si l’organe était intact31 »
Il est à remarquer, d’un autre côté : 1° que les impressions sensitives sont transmises de la périphérie à l’encéphale par l’intermédiaire de l’axe gris de la mœlle, et que les incitations motrices le sont de l’encéphale à la périphérie par les cordons inférieurs et latéraux, et par la substance grise ; 2° que l’action de la mœlle, sans être entièrement directe, l’est au moins en grande partie et en faible partie croisée ; c’est ainsi qu’une hémisection de la mœlle, dans la région cervicale, détermine, en général, la paralysie complète du côté de la lésion et un certain affaiblissement du côté opposé.
L’axe gris de la mœlle n’agit pas seulement comme conducteur ; il possède encore une propriété très curieuse à étudier : celle connue sous la dénomination d’action réflexe. Cette action consiste p. 338dans une impression produite sur un nerf sensitif (voie centripète) et transmise à la mœlle qui, la réfléchissant sur un nerf moteur (voie centrifuge), détermine des mouvements très variés.
Ainsi, la substance grise de la mœlle suffit pour transformer la sensibilité en mouvement, et, le plus souvent, elle le fait toute seule, sans qu’il y ait intervention de la fonction cérébrale. Elle joue donc un rôle de centre très important.
Parmi les nombreux exemples de mouvements réflexes que cite M. Colin, nous choisirons ceux-ci : la rétraction d’un ou de deux membres, à la suite du pincement de la peau d’un des membres sur un animal décapité, mammifère ou reptile ; les mouvements ondulatoires du corps des serpents privés de la tête ; les secousses convulsives des muscles abdominaux et autres, lors des efforts de vomissement ; la contraction de la vessie ou du rectum sous l’influence de la distension exagérée de ces réservoirs par l’urine ou les matières stercorales, etc.
D’ailleurs, tous les organes, d’après M. Mathias Duval, présentent à étudier dans leur fonctionnement une série de réflexes où l’on voit la mœlle agir, « non comme un auxiliaire du cerveau, mais comme un centre qui, dans certains cas, peut se suffire parfaitement à lui-même32 . »
La locomotion, par exemple, est un simple phénomène réflexe. La plupart du temps, en effet, les animaux marchent sans le savoir ; le cerveau n’intervient qu’à certains moments, pour régler la marche. Le mouvement respiratoire dépend également de la mœlle ; c’est elle qui préside à son rythme régulier.
Les phénomènes de sécrétion, enfin, sont d’autres réflexes qui se font encore plus que les précédents à notre insu, etc., etc.
Les actes nerveux réflexes s’exécutent par l’intermédiaire des nerfs du système cérébro-rachidieu ou des branches du grand sympathique. Ils sont, dans tous les cas, involontaires.
« Pour que l’action réflexe se produise, dit d’autre part M. Colin, il faut que la mœlle puisse réagir. Les réactions sont d’autant plus prononcées qu’elle est mieux isolée de l’encéphale. Tous les expérimentateurs ont effectivement remarqué que les phénomènes réflexes présentaient leur maximum d’intensité après la décapitation ou la section de la mœlle33 . »
p. 339Il existe des centres réflexes spéciaux de la mœlle, c’est-à-dire « des localisations fonctionnelles médullaires formant comme le premier échelon de la série des localisations plus élevées qu’on a établies dans les organes de la base de l’encéphale34 . » Aussi, est-ce toujours tel ou tel muscle, tel ou tel groupe de muscles qui entre en action, selon que telle ou telle partie de la peau a été excitée, si, toutefois, le phénomène réflexe est resté circonscrit et ne s’est pas irradié de manière à produire des contractions générales.
c. — Encéphale
L’encéphale est le renflement antérieur de l’axe central du système nerveux logé dans la boîte crânienne.
Il représente une masse ovalaire allongée d’avant en arrière et légèrement déprimée de dessus en dessous.
Contrairement à ce que nous avons vu pour la mœlle, cet organe remplit à peu près entièrement la cavité qui le contient. Il s’ensuit qu’il ne peut se mouvoir que difficilement dans sa cavité de réception.
Le poids moyen de l’encéphale du cheval est de 650 grammes.
Il se divise en trois parties : le cerveau, le cervelet et l’isthme de l’encéphale, que nous allons étudier successivement.
1° Cerveau. — Situé en avant de l’encéphale, dont il constitue la partie la plus importante, le cerveau (XII, 1, et fig. 130 du texte) est divisé en deux lobes, dits hémisphères cérébraux, allongés d’avant en arrière, déprimés de dessus en dessous, et profondément divisés en haut, en avant et en arrière, par une scissure médiane, ou scissure interlobaire.
La masse du cerveau doit être examinée extérieurement et intérieurement.
Conformation extérieure. — Chaque hémisphère cérébral représente un segment d’ovoïde symétrique avec celui du côté opposé, dans lequel on peut considérer quatre faces et deux extrémités.
Les faces supérieure et externe sont convexes et répondent au plafond et aux parois latérales de la cavité crânienne. L’inférieure repose sur le plancher de cette même cavité. L’interne, plane, répond à l’autre p. 340hémisphère par l’intermédiaire de la faulx du cerveau, lame verticale émanant de la dure-mère encéphalique.
L’extrémité postérieure répond au cervelet. L’extrémité antérieure se loge dans l’excavation formée par le frontal et le sphénoïde de chaque côté de l’apophyse crista-galli.
Si l’on recherche les particularités anatomiques qui se dessinent à la surface extérieure de chaque hémisphère, on trouve : 1° sur les faces supérieure et latérales, un grand nombre de saillies dites circonvolutions cérébrales (XII, 3), contournées de mille manières différentes et séparées par des sillons plus ou moins profonds auxquels on a donné le nom d’anfractuosités (XII, 1) ; 2° sur la face inférieure, une éminence allongée, le lobule mastoïde ou sphénoïdal (fig. 131 du texte, 10) ; un sillon transverse appelé scissure de Sylvius (fig. 131 du texte, 12) ; enfin, un lobule détaché constituant le lobule olfactif ou ethmoïdal (fig. 131 du texte, 13).
Fig. 130. — Vue générale de l’encéphale (face supérieure).
p. 341Conformation intérieure. — En écartant l’un de l’autre les deux hémisphères cérébraux dans leur partie supérieure, on découvre, p. 342au fond de la scissure interlobaire, la grande commissure désignée sous le nom de corps calleux (XII, 4, et fig. 132 du texte, 1).
Fig. 131. — Vue générale de l’encéphale (face inférieure).
« Si l’on enlève ensuite, avec l’instrument tranchant et au moyen d’une coupe horizontale, toute la portion des hémisphères qui recouvre cette commissure ; si, de plus, on excise celle-ci dans une certaine étendue à droite et à gauche de la ligne médiane, on pénètre dans deux cavités symétriquement disposées au centre de chaque hémisphère. Ces cavités portent le nom de ventricules latéraux ou cérébraux. « Elles sont séparées, dans le plan médian, par une mince cloison, le septum lucidum, attachée au corps calleux par son bord supérieur, implantée par son bord inférieur sur le trigone cérébral (fig. 132 du texte, 3.3), sorte d’arcade impaire et médiane sous laquelle existe le trou de Monro, c’est-à-dire l’orifice chargé d’établir une communication entre les deux ventricules.
Fig. 132. — Partie antérieure des ventricules latéraux, ouverte par l’ablation du plafond (chez le chien).
« Sur le plancher de ces cavités s’observent deux grosses éminences, les corps striés (fig. 132 du texte, 7.7), et l’hippocampe ou corne d’Ammon (fig. 132 du texte, 4), avec un cordon vasculaire, d’apparence grenue, formant le plexus choroïde cérébral (fig. 132 du texte, 6), dépendance de la toile choroïdienne35 », laquelle n’est autre chose qu’une expansion vasculaire émanant elle-même de la pie-mère.
p. 343Structure. — Deux substances : l’une grise, extérieure, l’autre blanche, intérieure, entrent dans la structure du cerveau.
Il est à remarquer que ces deux substances affectent là une disposition contraire à celle qu’on observe dans la mœlle épinière, où la substance grise occupe la profondeur de l’organe.
2° Isthme de l’encéphale. — L’isthme, ou mœlle allongée (XII, 6, 7, 8, 9, 10 et fig. 130, 131, 133 et 134 du texte), comprend des parties blanches et grises qui supportent le cervelet et établissent l’union de celui-ci et de la mœlle épinière avec le cerveau. Ces parties sont, d’après MM. Chauveau et Arloing : 1° le bulbe rachidien ; 2° la protubérance annulaire ; 3° les pédoncules cérébraux ; 4° les pédoncules cérébelleux ; 5° la valvule de Vieussens ; 6°. les tubercules quadrijumeaux ; 7° les couches optiques ; 8° les glandes pinéale et pituitaire.
Conformation extérieure. — L’isthme de l’encéphale peut être divisé en quatre faces et deux extrémités.
La face inférieure (fig. 131 du texte) est convexe et repose sur la gouttière basilaire. Elle se trouve croisée, à peu près dans sa partie moyenne, par un épais faisceau de fibres arciformes constituant la protubérance annulaire, le pont de Varole ou le mésocéphale (fig. 131 du texte, 5), qui présente l’origine apparente des nerfs de la cinquième paire encéphalique ou nerfs trijumeaux.
Tout ce qui se trouve en arrière de ce faisceau appartient au bulbe rachidien (XII, 10, et fig. 131 du texte, 1, 2, 3, 4), gros pédoncule de couleur blanche, aplati de dessus en dessous et plus large en avant qu’en arrière, sur lequel prennent naissance les sixième, septième, huitième, neuvième, dixième, onzième et douzième paires nerveuses eucéphaliques.
Ce qui existe en avant du mésocéphale forme les pédoncules cérébraux (XII, 9, et fig. 131 du texte, 6.6), fournissant les nerfs de la troisième paire.
On peut encore considérer comme faisant partie de la face inférieure de l’isthme la glande pituitaire (XII, 7, et fig. 131 du texte, 7), petit tubercule discoïde situé à l’extrémité antérieure de la scissure qui sépare les deux pédoncules cérébraux.
La face supérieure (fig. 133 du texte), sur laquelle reposent le cervelet et l’extrémité postérieure des lobes cérébraux, présente, d’arrière en avant : 1° la face supérieure du bulbe rachidien, creusée p. 344d’une excavation qui constitue le plancher du quatrième ventricule et se termine, en arrière, par un angle taillé en forme de bec de plume, le calamus scriptorius (fig. 133 du texte, 5) ; 2° les pédoncules du cervelet ou pédoncules cérébelleux (fig. 133 du texte, 2, 3, 4), gros et courts funicules latéraux attachant le cervelet sur la face supérieure de l’isthme et comprenant chacun trois faisceaux : un antérieur, un postérieur, un moyen ; 3° la valvule de Vieussens, mince lamelle blanche qui réunit l’un à l’autre les deux pédoncules cérébelleux antérieurs ; 4° les tubercules quadrijumeaux ou bigéminés (fig. 133 du texte, 7. 7, 8. 8), qui forment, en arrière des pédoncules cérébraux, quatre éminences arrondies accolées deux à deux, et divisées en postérieures ou éminences testes, et antérieures, ou éminences nates ; 5° les couches optiques p. 345(XII, 6, et fig. 133 du texte, 9. 9), qui représentent l’une et l’autre une surface de couleur grise située en avant des tubercules quadrijumeaux, au-dessus de la partie antérieure des pédoncules cérébraux.
Fig. 133. — Vue supérieure de l’isthme encéphalique
On trouve encore, sur la face supérieure de l’isthme encéphalique, une espèce de petit tubercule ou de ganglion appendiculaire, de couleur rouge-brun, en forme de pomme de pin, auquel on a donné le nom de glande pinéale ouconarium (XII, 5, et fig. 134 du texte, 10).
Fig. 134. — Coupe médiane et verticale de l’encéphale.
Les faces latérales ne présentent rien de particulier à signaler.
L’extrémité postérieure se confond insensiblement avec la mœlle épinière.
L’extrémité antérieure se prolonge dans la partie des hémisphères du cerveau connue sous le nom de corps striés.
Conformation intérieure. — L’isthme de l’encéphale est creusé, au niveau des couches optiques, d’une cavité centrale dite ventricule moyen, allongée dans le sens antéro-postérieur et aplatie d’un côté à l’autre (fig. 134 du texte, 13).
p. 346Cette cavité communique avec les ventricules latéraux par l’ouverture commune antérieure (fig. 134 du texte, 14), ou trou de Monro et se prolonge en arrière, sous les tubercules quadrijumeaux, par un conduit nommé aqueduc de Sylvius (fig. 134 du texte, 6), qui aboutit, sous la valvule de Vieussens (fig. 134 du texte, 7), dans le ventricule postérieur ou cérébelleux (fig. 134 du texte, 5), autre cavité comprise entre le cervelet et la face supérieure du bulbe rachidien, qui lui sert de plancher.
Structure. — L’isthme de l’encéphale n’étant qu’un prolongement de la mœlle épinière se rapproche beaucoup de celle-ci par sa structure, surtout dans la partie postérieure de l’organe, « les caractères communs d’organisation s’effaçant au fur et à mesure qu’on se rapproche de l’extrémité antérieure »36 .
La substance grise, beaucoup moins abondante que la substance blanche, se trouve reléguée profondément dans la profondeur de l’organe, de même que dans la mœlle.
Une particularité très importante à signaler, c’est la disposition spéciale des cordons de la mœlle à son extrémité antérieure : Les cordons latéraux inférieurs se massent en petits faisceaux distincts, qui pénètrent dans la substance grise et vont bientôt la traverser entièrement de dehors en dedans et d’arrière en avant, pour s’entrecroiser, ceux de droite avec ceux de gauche, au niveau du collet du bulbe.
Quant aux cordons supérieurs, ils ne commencent à s’entre-croiser que lorsque l’entre-croisement des précédents est terminé.
3° Cervelet. — Le cervelet est situé à la partie postérieure de l’encéphale, au-dessus de l’isthme, sur lequel il se trouve fixé à l’aide de deux pédoncules latéraux ; il occupe le compartiment postérieur de la cavité crânienne (XII, 2, et fig. 130 et 131 du texte).
Conformation extérieure. — Cet organe constitue une masse presque régulièrement sphéroïdale parcourue à sa surface par de nombreux sillons.
Entre sa face inférieure et le bulbe rachidien se trouve une petite masse grenue et rougeâtre, formée de houppes vasculaires, dite plexus choroïde cérébelleux.
Conformation intérieure. — Par sa face inférieure et la face interne p. 347de ses pédoncules, le cervelet concourt à former la cavité que nous connaissons déjà sous le nom de ventricule postérieur ou cérébelleux.
Structure. — Comme toutes les autres parties de l’axe central du système nerveux, le cervelet est composé d’une substance grise, extérieure, et d’une substance blanche, intérieure, affectant une belle disposition arborisée, que les anciens anatomistes ont désignée sous le nom d’arbre de vie (fig. 134 du texte, 4).
Propriétés de l’encéphale.
1° Propriétés du cerveau. — Bien que doué de propriétés extrêmement importantes, le cerveau est insensible à la douleur physique et inexcitable. « Il m’est arrivé souvent, dit M. Colin, de mettre à découvert le cerveau du cheval dans une assez grande étendue, puis d’appliquer sur les circonvolutions un pinceau d’acide azotique, d’y enfoncer ensuite à plusieurs reprises une aiguille, un stylet ou un autre instrument tranchant, dans diverses directions et à diverses profondeurs, et enfin d’enlever des couches de substance cérébrale, sans que l’animal parût en éprouver la moindre douleur, sans qu’il fît le moindre effort pour se soustraire à ces actions mécaniques37 . »
Nous allons passer successivement en revue chacune de ses parties.
Hémisphères cérébraux. — Le rôle des hémisphères cérébraux est complexe ; s’ils sont insensibles aux lésions physiques et incapables de provoquer, sous l’influence de ces lésions, la moindre action motrice, ils perçoivent les impressions produites sur les sens, les convertissent en sensation et donnent conséquemment à l’animal conscience de lui-même et du monde extérieur ; ils exercent, de plus, une influence incitatrice sur les mouvements et sont le siège des manifestations de l’instinct et de l’intelligence.
Les phénomènes de perception se divisent en ceux qui nous donnent des renseignements précis sur les objets extérieurs : ce sont les sensations spéciales (vision, audition, etc.), et ceux nommés sensations générales : la douleur est le type de cette seconde espèce de sensations.
Les sensations générales, dont nous nous occuperons exclusivement ici, peuvent être vagues, comme le malaise général que fait éprouver p. 348un commencement d’asphyxie, ou localisées, comme celle d’une brûlure sur un point de noire tégument.
Dans ce dernier cas, il est à remarquer que la sensation est toujours excentrique, quel que soit le point où le nerf est atteint ; même quand le centre nerveux est directement atteint, c’est à l’extrémité périphérique du nerf sensitif en rapport avec le centre que nous localisons la sensation.
« Ces considérations, dit M. Mathias Duval, nous donnent la clef du mécanisme par lequel se produisent les hallucinations, dont la cause réside dans l’encéphale et qui donnent lieu à des sensations que le malade rapporte à la périphérie38 . »
Enfin, les sensations présentent encore ce fait particulier qu’elles peuvent être comme emmagasinées dans les organes cérébraux ; les impressions s’y fixent, pour reparaître plus tard : ainsi se produisent les phénomènes désignés sous le nom de mémoire.
« Tous ces phénomènes (perception avec mémoire, idées, volonté) sont aujourd’hui parfaitement localisés dans la couche grise corticale des circonvolutions cérébrales ; cette partie des hémisphères cérébraux est, en un mot, le siège des facultés intellectuelles et instinctives39 . »
Les propriétés du cerveau ont, d’ailleurs, été mises hors de doute par l’expérimentation directe sur des animaux vivants.
Ainsi, lorsqu’on enlève les hémisphères cérébraux sur un mammifère ou un oiseau, sans léser les autres parties de l’encéphale, « l’animal continue à vivre pendant quelque temps dans une sorte de torpeur. Sa sensibilité générale émoussée et ses mouvements affaiblis. Il semble avoir perdu l’usage de ses sens, la spontanéité, l’intelligence, la volonté... Dès qu’un cheval a le cerveau enlevé, il est à peine affecté par de profondes piqûres ou de grandes incisions à la peau ; le bruit que l’on fait autour de lui ne paraît pas l’émouvoir ; la lumière la plus vive ne fait pas varier l’ouverture de la pupille ; le doigt porté brusquement vers l’œil ne détermine pas de mouvements des paupières ; l’ammoniaque mise à l’entrée des naseaux n’occasionne ni ébrouement ni rien qui indique une action sur la pituitaire ; des substances amères placées sur la langue ne provoquent, ni dans cet organe ni p. 349dans les mâchoires, le moindre mouvement qui puisse porter à penser que ces substances ont impressionné les papilles gustatives ; en un mot, toutes les sensations semblent anéanties40 ... »
Les hémisphères cérébraux sont encore le point de départ des volitions qui commandent les mouvements ; c’est ainsi que le cheval perd l’équilibre et tombe dès que ces organes sont enlevés ; alors, dit M. Colin, l’affaissement musculaire est extrême, l’animal reste étendu sur le côté, avec les membres dans l’extension, le cou et la tête immobiles, la langue pendante hors de la bouche, les lèvres flasques, les paupières baissées, les naseaux à peine dilatés, et cet état, qu’aucune convulsion ne vient troubler, persiste jusqu’au moment de la mort.
Toutefois, si l’on se borne à la destruction partielle d’un seul hémisphère, l’animal peut quelquefois rester debout pendant un certain temps ; à ce propos, M. Colin rapporte l’expérience suivante : un âne, auquel il avait enlevé la couche superficielle du lobe cérébral droit, se tint debout pendant une heure, tout en penchant un peu à gauche. Abandonné à lui-même, il restait immobile ; mais, dès qu’on venait à l’exciter par des piqûres ou des coups sur les oreilles, il se mettait à marcher très vite. Par moments même, il tournait du côté opposé à la lésion. En se heurtant contre les murs, il tombait ; mais on parvenait sans trop de peine à le faire relever. Puis, insensiblement, la prostration fit des progrès, et bientôt il ne fut plus possible de le faire marcher sans le soutenir.
Il y a lieu de faire remarquer que l’action des hémisphères cérébraux sur les mouvements est croisée. C’est l’hémisphère droit qui stimule les muscles de la moitié gauche du corps, et vice versa (par suite de l’entre-croisement des cordons blancs de l’isthme). D’un autre côté, il est bon de dire que les lésions des hémisphères produisent plus difficilement la paralysie sur les animaux que sur l’homme. Il y a quelques mois, nous avons eu l’occasion de faire l’autopsie d’un cheval chez lequel, par suite d’un coup de pied dans la région du front, un abcès s’était développé à la face interne de l’os pariétal, entre celui-ci et la dure-mère, en avant de la face supérieure de l’hémisphère gauche. Du volume d’une grosse noix, cet abcès avait tellement comprimé la substance cérébrale que celle-ci, débarrassée de ses enveloppes, conservait p. 350l’empreinte exacte de la lésion. Or, durant les quinze jours qui se sont écoulés entre l’accident et la mort, l’animal n’a jamais manifesté les moindres symptômes d’hémiplégie, la plus petite tendance au tournoiement.
Enfin, la fonction essentielle et la plus élevée des hémisphères est celle qui a trait aux opérations instinctives et intellectuelles. « Après l’ablation de ces hémisphères, dit M. Colin, l’animal peut vivre encore longtemps, se mouvoir automatiquement, respirer, digérer ; mais il perd, avec ses sensations, la mémoire, le jugement, la volonté et les instincts les plus vivaces de son espèce ; il devient tout à fait stupide ; son existence se passe dans la torpeur, dans le sommeil... Il n’a pas même l’idée de prendre la nourriture qui lui est offerte, et se laisserait mourir de faim sur un tas d’aliments si une main étrangère ne les lui mettait dans la bouche...41 ».
On a remarqué que les facultés intellectuelles sont d’autant plus développées que les circonvolutions cérébrales sont plus nombreuses, plus profondes ; c’est ainsi que, chez les animaux à cerveaux lisses, tels que les rongeurs et les ovipares, l’intelligence est bien inférieure à celle des animaux à circonvolutions cérébrales bien marquées, comme l’homme, les singes anthropomorphes, la plupart des carnassiers, etc. On admet aussi que la masse de l’encéphale, et spécialement le cerveau, diminue en général de volume à mesure que l’intelligence s’affaiblit. Toutefois, cette diminution de volume ne suit pas exactement la dégradation des facultés intellectuelles, comme il est facile de s’en rendre compte en comparant entre eux les animaux les mieux connus sous le rapport de leurs facultés. Le cheval, par exemple, si on le classait d’après le poids proportionnel de son cerveau, viendrait après le plus obtus de tous les solipèdes, le plus stupide de tous les ruminants, et serait à peu près sur le même rang que le bœuf et la vache. Cet exemple prouve surabondamment que le volume de l’encéphale ne peut faire apprécier exactement le degré d’intelligence de chaque espèce.
Quoique toutes leurs parties n’aient pas exactement les mêmes fonctions ni les mêmes propriétés, comme nous le verrons dans un instant, c’est par leur ensemble et en masse que les hémisphères cérébrauxp. 351 paraissent agir ; en outre, de leurs deux substances, c’est la grise qui est la plus active, qui prend la plus grande part aux actions cérébrales.
Corps striés. — Les corps striés sont les centres des mouvements des membres. La lésion du corps strié droit s’accompagne d’une paralysie du côté gauche, et vice versa.
Les autres parties du cerveau jouissent de propriétés peu importantes.
Localisations dans les hémisphères cérébraux. — « Les recherches expérimentales et les observations cliniques, dit M. Mathias Duval, tendent aujourd’hui à établir, dans la substance blanche et dans la substance grise corticale des hémisphères, des localisations spéciales de conducteurs sensitifs ou moteurs (volontaires) pour la première substance, de centres moteurs ou de facultés intellectuelles pour la seconde42 . »
Fig. 135. — Schéma probable des centres moteurs volontaires chez l’homme.
C’est ainsi que Broca place le siège du langage articulé dans la moitié ou le tiers postérieur de la troisième circonvolution frontale gauche (fig. 135 du texte, 1).
D’autre part, il paraît démontré que les parties antérieures des p. 352hémisphères sont les seules dont l’excitation électrique produise des mouvements du corps. Hitzig localise même le centre des mouvements du membre inférieur en haut de la circonvolution pariétale descendante (fig. 135 du texte, 3) ; le centre des mouvements du membre supérieur, en avant de cette dernière circonvolution (fig. 135 du texte, 2) le centre des mouvements de la tête et du cou, à la partie postérieure de la première circonvolution frontale ascendante (fig. 135 du texte, 3), etc., etc.
2° Propriétés de l’isthme. — L’isthme encéphalique jouit de la propriété d’être à la fois excitable et sensible ; mais cette propriété est plus ou moins marquée suivant les parties qu’on examine.
Dans tous les cas, la plupart des organes dont l’assemblage constitue l’isthme jouent le rôle de centres coordonnateurs des mouvements ; tels le bulbe, la protubérance, les pédoncules cérébraux.
La protubérance annulaire, sensible et excitable, a une action en partie directe et en partie croisée. Elle paraît être le siège, par ses parties grises, des grandes expressions émotionnelles : rire, pleurs, cris de douleur, etc.
Les tubercules bigéminés agissent surtout sur la vision. Leur lésion d’un côté supprime le jeu de l’iris et abolit la vue dans l’œil opposé.
Les couches optiques sont insensibles et non excitables. Elles ne possèdent aucune influence sur la vision, comme on l’a cru longtemps.
Les pédoncules cérébraux et cérébelleux sont sensibles et excitables. La stimulation unilatérale des premiers provoque des mouvements de rotation, de manège, etc., du côté opposé ; celle des seconds produit également des mouvements, mais qui varient selon le pédoncule atteint et le point de celui-ci où a porté la lésion.
Quant au bulbe rachidien, il lie la partie céphalique avec la partie spinale du système nerveux et constitue un foyer multiple où les amas de substance grise donnent l’activité aux nerfs les plus importants à la vie, à ceux qui entretiennent le mécanisme respiratoire, règlent l’action du cœur, etc. C’est à lui qu’aboutissent les impressions sensitives, et c’est par son intermédiaire que les opérations de l’encéphale sont liées à celles de la mœlle épinière : il ne peut être lésé sans que les fonctions des autres parties du système soient troublées ; il ne peut être détruit sans que l’action de ces dernières vienne à s’annihiler plus ou moins complètement.
p. 353« C’est toujours d’un point unique du bulbe, dit M. Flourens, qui a quelques lignes à peine, que la respiration, l’exercice de l’action nerveuse, l’unité de cette action, la vie entière de l’animal, en un mot, dépendent43 . » Or, ce point, ce , nœud vital, correspond au sommet du calamus scriptorius, à l’extrémité du quatrième ventricule, un peu au-dessus, par conséquent, de l’origine de la huitième paire. C’est exactement l’endroit qu’il faut blesser avec la pointe d’un stylet, d’un scalpel, etc., pour tuer instantanément l’animal. Si l’on louche le bulbe en avant de ce point, les mouvements respiratoires cessent dans la tête seule ; si on le blesse en arrière, ces mouvements sont supprimés seulement dans le tronc. On se rend compte de ce fait en sectionnant la mœlle, soit entre l’occipital et l’atlas, soit entre la première et la deuxième vertèbre cervicale ; car, dans les deux cas, le tronc seul est immédiatement privé de vie ; les mouvements des ailes du nez, les bâillements, les contractions des muscles de la tête, etc., persistent encore pendant quelques minutes, comme on le constate souvent chez les suppliciés.
La lésion de certaines parties du bulbe produit aussi des modifications bien déterminées dans un grand nombre de sécrétions ; c’est ainsi, par exemple, que la piqûre au niveau des origines du pneumogastrique produit un diabète temporaire.
Il est à noter, enfin, que c’est par suite de la disposition des cordons blancs de l’isthme, qui se sont tous entre-croisés au-dessus du tiers inférieur du bulbe, les uns successivement dans la mœlle, les autres au niveau et un peu au-dessus du collet du bulbe, que toutes les lésions encéphaliques unilatérales frappent le mouvement et la sensibilité dans le côté opposé du corps (Voy. Structure de l’isthme).
3° Propriétés du cervelet. — « Le cervelet, dit M. Colin, est à peu près dépourvu de sensibilité à sa surface ; mais il est sensible et excitable dans ses parties profondes. Sa destruction rend la marche, le vol et les autres mouvements progressifs irréguliers, difficiles, leur enlève la coordination, l’harmonie. La lésion de ses pédoncules moyens donne lieu à un mouvement de rotation du corps sur lui-même, à la déviation des yeux.
« Toutes ces mutilations, de même que les états morbides qui consistentp. 354 dans le ramollissement, la destruction, l’atrophie de la substance, laissent persister les facultés intellectuelles et instinctives, la sensibilité générale ; d’où il suit que le cervelet est un organe dont les fonctions sont essentiellement distinctes de celles du cerveau. Si toutes ses attributions ne sont pas connues, au moins on ne peut guère nier celle qui est relative à la coordination des mouvements44 . »
Magendie ayant remarqué, au cours de ses expériences, que les animaux privés de leur cervelet avaient une tendance marquée à reculer, place dans cet organe le siège d’une force qui porte l’animal à se mouvoir en avant. Gall localise dans le cervelet l’amour physique et l’instinct de reproduction ; mais cette opinion est aujourd’hui regardée comme étant sans fondement. M. Flourens a vu, en effet, un coq chercher à cocher les poules après la destruction du cervelet. On a même observé l’érotomanie chez une femme dont la substance grise du cervelet était atrophiée, et l’on a cité une jeune fille sans cervelet qui se livrait à la masturbation.
Facultés instinctives et intellectuelles.
Outre le rôle physiologique que nous venons de passer en revue, le système nerveux embrasse encore des opérations d’un ordre très élevé, desquelles résultent l’instinct et l’intelligence.
Nous allons tout d’abord dire un mot de la grande distinction qu’il y a lieu d’établir entre les deux ordres de facultés.
1° De l’instinct et de l’intelligence en général. — On entend par instinct le résultat d’une force irréfléchie, d’une impulsion innée, secrète, irrésistible.
L’intelligence, au contraire, est cette faculté si éminemment développée dans notre espèce, à laquelle doivent être rapportés tous les actes combinés et réfléchis que nous accomplissons.
Nos animaux domestiques possèdent-ils à un degré quelconque l’une et l’autre de ces facultés, ou sont-ils de simples automates dépourvus d’instinct, d’intelligence, de mémoire, etc., comme ont cherché à le prouver un certains nombre de naturalistes et de philosophes ?
Pour nous, le doute n’est plus permis à cet égard : « Ce sont des p. 355êtres possédant des instincts toujours sûrs et généralement plus parfaits que ceux de l’espèce humaine, une intelligence obtuse à la vérité, mais qui se perfectionne dans les degrés supérieurs de l’échelle ; des êtres susceptibles, enfin, d’un certain discernement dans leurs actions, et capables d’éprouver plusieurs sentiments, plusieurs passions plus ou moins analogues aux sentiments et aux passions que nous éprouvons nous-mêmes45 . »
Parlant des hallucinations qui se font observer chez les animaux, comme chez l’homme, par suite d’une cause morbide ou d’une modification de l’action cérébrale (rage, éthérisation), M. H. Bouley démontre qu’il y a une parfaite similitude entre l’homme et les animaux au point de vue du fonctionnement de leurs cerveaux. « Dans l’un et dans les autres, dit-il, l’idée ou l’image, produite par l’impression des objets, peut donner lieu à une sensation identique à celle que l’objet lui-même a déterminée, et faire croire à sa réalité actuelle, quoique le cerveau n’en perçoive que le fantôme 46 . » ,
Nous allons, d’ailleurs, essayer d’esquisser à grands traits les phénomènes qui se rapportent à l’instinct et à l’intelligence chez nos différentes espèces animales en général, et chez le cheval en particulier.
2° Instinct. — L’instinct, que Buffon n’avait pas compris, et que tant d’auteurs ont considéré comme un mot vide de sens, est une faculté innée, dit M. Colin, commune à tous les animaux, même aux plus imparfaits.
Il n’est nullement en rapport, d’après M. Félix Hément, avec le rang qu’occupent ceux-ci dans la hiérarchie animale et avec le degré d’intelligence qu’ils possèdent : « Les instincts les plus curieux, les plus étranges et les plus développés ne se rencontrent pas chez les mammifères, mais chez les articulés, dont l’organisation est de beaucoup inférieure et la taille plus petite47 . » ,
Parmi les instincts donnés aux animaux, les uns sont destinés à la conservation de l’espèce, les autres à la conservation de l’individu ; d’où leur division en instincts de la reproduction et en instincts de la conservation.
Tous les animaux sont doués de l’instinct de la conservation, mais à des degrés différents. « Chez le cheval, dit Vallon, il est peu prononcé,p. 356 et cela devait être, puisque cet animal trouve partout une nourriture abondante, qu’il prend sans exécuter de grands déplacements ou sans livrer de combats à l’état de domesticité, l’instinct de la conservation est plus faible qu’à l’état sauvage, parce que l’homme a habitué le cheval à trouver toujours dans les prairies ou au râtelier les aliments qui lui sont nécessaires, et un abri contre les intempéries des saisons48 . »
Cet instinct, nous le répétons, est surtout marqué chez les animaux sauvages. Tous savent choisir la nourriture qui leur convient et repousser celle qui pourrait leur nuire ; tous, usant de leurs armes les plus sûres, savent se préserver des attaques et déjouer les ruses de leurs ennemis ; c’est ainsi que les chevaux sauvages se réunissent en troupes commandées par un étalon et forment un cercle au centre duquel ils placent les faibles et les femelles, quand ils se trouvent attaqués par des carnassiers.
De leur côté, les plus petits animaux emploient des moyens extrêmement curieux : tels le terrier du lapin, les habitations souterraines de la taupe, les constructions du castor, les nids des oiseaux, etc.. etc.
Parmi les instincts de conservation, il y a encore lieu de signaler l’instinct migrateur de certains animaux, l’instinct des carnassiers pour surprendre leur proie, etc.
L’instinct de la reproduction porte les animaux à se reproduire, à soigner et à nourrir leurs petits. Il n’apparaît qu’à l’époque de la puberté et cesse au déclin de la vie.
Les chevaux peuvent se reproduire à toutes les époques de l’année ; mais c’est au printemps qu’ils en éprouvent le plus souvent le désir.
En somme, l’instinct est « fatal, nécessaire, inné, parfait, invariable, propre à une espèce, en harmonie avec l’organisation de l’animal, inapplicable à d’autres fins, intransmissible49 ».
3° Intelligence. — Si l’instinct est le mobile ou le principe de la plupart des actions des animaux, ceux-ci n’en possèdent pas moins une autre faculté, l’intelligence, qui « vient se surajouter aux instincts et étendre par là le cercle des facultés psychologiques de la brute50 ».
« Les animaux, dit Flourens, reçoivent par leurs sens des impressionsp. 357 semblables à celles que nous recevons par les nôtres ; ils conservent comme nous la trace de ces impressions ; ces impressions conservées forment, pour eux comme pour nous, des associations nombreuses et variées ; ils les combinent, ils en tirent des rapports, ils en déduisent des jugements, ils ont donc de l’intelligence51 . » ,
Mais, d’après M. Félix Hément, l’intelligence est pour ainsi dire sans initiative ; elle ne paraît capable d’activité que sous notre impulsion.
De tous les animaux auxquels on peut accorder une certaine dose d’intelligence, le chien doit certainement être placé en première ligne ; nul n’ignore, en effet, combien sa mémoire et sa fidélité sont grandes ; nul n’ignore avec quelle facilité il nous comprend, avec quelle sincérité il nous aime, avec quel empressement, enfin, il nous défend !
Le cheval est encore bien partagé sous le rapport de l’intelligence ; cependant, il est évident que chez lui cette faculté est beaucoup moins développée que chez le chien.
Selon M. Hément, « le cheval possède des sens très développés plutôt que de l’intelligence : son odorat, son ouïe et sa vue sont d’une sensibilité très vive. Il est, toutefois, susceptible d’éducation et capable d’attachement, de reconnaissance et de rancune, ce qui est un signe d’intelligence52 . »
Quoi qu’il en soit, le cheval est un des animaux domestiques les plus intelligents. Son cerveau est capable, comme le nôtre, de conserver des idées qui, à un moment donné, deviennent le mobile de ses actions. Aussi, est-il doué d’une mémoire excellente et garde-t-il parfaitement le souvenir des choses et des lieux : celui que son maître maltraite d’habitude dresse les oreilles et s’agite toutes les fois que quelqu’un entre dans l’écurie, parce qu’il se souvient des coups qu’il a reçus, et qu’il craint d’en recevoir encore.
M. H. Bouley, alors qu’il était professeur à Alfort, a vu un cheval qui avait subi une opération à l’École reconnaître de loin, au bout d’une année, l’endroit où il avait souffert, et refuser absolument d’en approcher.
Nous avons observé nous-même un exemple de mémoire qui mérite d’être rapporté.
C’était pendant l’hiver de 1870-1871, quelque temps après l’occupation par les Prussiens de la petite ville que nous habitions dans l’Oise. p. 358Nous revenions de Beauvais, où nous nous étions rendu le matin même pour essayer d’obtenir quelques renseignements sur ce qui se passait à Paris et dans la province.
Arrêté par la garde nationale d’un village que nous traversions, sous un prétexte quelconque enfanté par l’affollement qui régnait partout alors, nous dûmes perdre là une heure, pendant laquelle la nuit nous surprit.
Le froid était excessif, l’obscurité profonde, et le sol couvert de neige. Pour comble de malheur, nous ne connaissions la route que pour l’avoir parcourue à l’aller, et le cheval que nous montions n’était lui-même jamais venu dans le pays.
Or, à 30 kilomètres environ du lieu où nous nous rendions, en pleine campagne, notre route bifurquait presque à angle droit : l’une des bifurcations se dirigeait en ligne droite vers la ville où nous allions ; l’autre suivait une direction tout à fait opposée.
Comme l’obscurité ne permettait pas de lire sur le poteau indicateur qui se trouvait là, nous n’hésitâmes pas à nous engager sur la première route, tandis que notre cheval opinait pour la seconde ; il opinait même si fort que nous dûmes nous batailler ensemble pendant plus d’un quart d’heure pour le ramener dans le.... bon chemin.
Chose bizarre, son idée fixe était de tourner le dos à l’écurie. Sur la route que nous parcourions maintenant, il se sentait mal à l’aise ; sans cesse il jetait un coup d’œil de regret en arrière, et son trot se ralentissait, se ralentissait...
Enfin nous rencontrons un village où nous obtenons tous les renseignements nécessaires à notre orientation.
Hélas ! le cheval avait eu plus de mémoire que le cavalier ; l’homme avait mis l’animal dans le mauvais chemin !
Le cheval dont parle Dubois (d’Amiens), dans l’éloge de Broussais53 , offre encore un exemple de mémoire plus remarquable : le père du célèbre médecin allait chaque jour voir ses malades dans la matinée ; le soir, en rentrant, il confiait sa monture à son fils, qui devait porter aux clients les médicaments prescrits ; chemin faisant, l’animal, dont la mémoire était fidèle, s’arrêtait devant chaque maison où son maître avait fait des visites. ,
p. 359D’ailleurs, « tous les cavaliers ayant fait campagne, dit Vallon, savent que certains chevaux, après avoir quitté leur campement, y reviennent, reconnaissent même leur place dans l’escadron auquel ils appartiennent54 . »
Dans les régiments, nous avons souvent vu des chevaux qui, ayant subi une opération chirurgicale, reconnaissaient de loin les vétérinaires, se cabraient, ruaient à leur approche, et cherchaient à fuir.
Parmi les mille autres exemples de l’intelligence du cheval qu’il nous serait facile de relater, signalons encore le suivant, que nous trouvons dans un vieux numéro du Farmer’s Magazine, revue agricole très estimée en Angleterre, et qui montre bien que « dans le cerveau des bêtes, des idées s’associent absolument comme dans celui de l’homme et donnent lieu à des volitions très réfléchies55 ». M. Allen (?) avait élevé deux petits chevaux qu’il n’avait jamais séparés ; à l’écurie, au vert, à la voiture, ils avaient toujours été côte à côte, de sorte qu’il en était résulté le plus vif attachement de ces deux animaux l’un pour l’autre. Or, l’un d’eux étant un jour tombé à l’eau, son compagnon, en l’absence de tout secours, vint non seulement avertir M. Allen, par ses hennissements expressifs, qu’un fait inaccoutumé se passait, mais il le conduisit directement à l’endroit où l’accident avait eu lieu, et sa joie ne connut plus de bornes lorsqu’il vit le noyé hors de danger sur la terre ferme.
Chez le cheval comme chez l’homme, l’intelligence présente des différences individuelles très grandes ; c’est ainsi que cette faculté existe à son plus haut degré chez les chevaux arabes et barbes.
L’intelligence varie également suivant l’âge : « Les animaux jeunes, comme le remarque Dugès, l’ont plus sûre que les vieux. Cette particularité, commune à l’homme et à la brute, doit être prise en grande considération au point de vue de l’éducation des animaux ; elle nous indique qu’il faut les prendre dès le jeune âge si l’on veut leur donner de bonnes habitudes, les pliera certains services et les façonner rapidement aux exercices qu’on peut en espérer56 . »
L’intelligence est, d’ailleurs, une faculté éminemment perfectible, que l’on peut augmenter par la domesticité et le dressage.
4° Du caractère et des passions. — Comme l’instinct, le p. 360caractère est particulier à chaque espèce animale et approprié à ses besoins, à son genre de vie.
Il n’a rien d’arbitraire ni d’incertain, et, dans aucun cas, dit M. Colin, on ne peut y voir le résultat, au moins chez les animaux sauvages, de l’exercice des facultés intellectuelles.
Les lois qui le régissent sont, en somme, celles auxquelles se trouvent soumis les divers instincts. Toutefois, bien qu’inhérent à la nature de chaque espèce, il peut se modifier et se développer dans de certaines limites sous l’influence d’un grand nombre de causes, et particulièrement de l’éducation.
Les passions sont nombreuses chez les animaux ; mais on ne s’entend pas encore bien sur les liaisons qu’elles peuvent avoir avec les opérations instinctives et intellectuelles. Toutefois, d’après M. Colin, il paraît plus vraisemblable de les considérer comme des manifestations de l’instinct ; pour lui, elles sont irréfléchies, irrésistibles, et les animaux n’ont ni l’idée, ni la volonté, ni le pouvoir d’y résister.
Nous regrettons d’être un peu en contradiction sur ce point avec l’éminent physiologiste d’Alfort ; mais nous doutons que toutes les passions animales soient irréfléchies. Quelques-unes, telles que la haine, la jalousie, par exemple, nous paraissent absolument réfléchies et, à ce titre, devoir être rangées dans le domaine des facultés intellectuelles.
Le fait du charretier acculé et écrasé dans une carrière par sa voiture, attelée d’un cheval qu’il avait jadis brutalisé, mais qu’il conduisait pour la première fois depuis trois ans, fait qui nous a été rapporté par un témoin absolument digne de foi et que nous donnons, à ce titre, comme authentique, légitimera un peu d’ailleurs notre manière de voir ; car on admettra difficilement que, dans ce cas particulier, la haine du cheval ait été tout à la fois irrésistible et irréfléchie.
Les passions qui dominent chez les solipèdes sont : la peur, l’affection, la colère, la haine, la jalousie, la méchanceté, la sociabilité, l’attachement, le chagrin, la joie, l’irritabilité, l’émulation, etc.
Quant à la fierté, au dédain, à l’orgueil, à la magnanimité, nous croyons que ces sentiments n’ont jamais existé que dans l’imagination de ceux qui les ont décrits.
Le cheval manifeste ses passions par des hennissements, par une attitude, une expression de la physionomie, des mouvements particuliers, etc. Mais, si vrais, si caractéristiques que soient ces signes, pour p. 361bien les saisir et les interpréter, il faut non seulement connaître le cheval à fond, mais encore posséder un grand talent d’observation. Moyennant cette double qualité, on peut arriver à distinguer un hennissement de la peur, de la haine, de la colère, etc.
La méchanceté est certainement l’une des passions les plus dangereuses du cheval. Heureusement qu’elle est rare et qu’on ne l’observe d’ordinaire que chez les animaux qui ont subi de mauvais traitements ou dont le mode d’élevage a été défectueux ; car, d’une manière générale, le cheval naît doux et obéissant.
Parmi les chevaux qui ont fait preuve d’une méchanceté exceptionnelle, on cite surtout Chillaby, pur sang anglais que sa férocité avait fait surnommer mad arabian (mad, enragé, furieux) et qui allait jusqu’à mettre en pièces l’image d’un homme qu’on plaçait à dessein devant lui.
Nous ne reviendrons pas ici sur la physionomie du cheval méchant, que nous avons étudiée dans un chapitre spécial de la IIe partie (Voy. Des chevaux vicieux).
L’émulation est très fréquente chez le cheval, particulièrement chez celui de sang. On a vu maintes fois des chevaux de course se rapprocher d’un bond désespéré du concurrent qui les distançait et le saisir par la mâchoire pour le retenir en arrière.
Le chagrin se manifeste aussi très fréquemment chez les chevaux qui ont vécu longtemps ensemble et qu’on sépare brusquement, chez la jument nourrice à laquelle on enlève tout à coup son poulain, etc. Les animaux hennissent alors plaintivement, perdent tout appétit et maigrissent jusqu’au moment de l’oubli.
Quant à la sociabilité, elle est péremptoirement démontrée par ce fait bien connu que le cheval qui vit toujours auprès de l’homme est bien plus doux, plus docile que celui élevé en box.
Enfin, la colère, la peur, l’affection, la joie, la jalousie, la haine (Voy. l’exemple ci-dessus), sont des passions non moins communes du cheval, dont sont journellement témoins ceux qui approchent cet animal.
5° Moyens d’apprécier l’intelligence. — Quoiqu’il soit bien difficile, en l’état actuel de la science, de saisir les opérations du système nerveux desquelles résultent l’intelligence et les instincts, on a essayé d’apprécier, de mesurer ces dernières facultés chez les divers individus d’une même espèce et chez la plupart des animaux supérieurs.
Comme on admet que l’encéphale est le siège de l’intelligence, on p. 362a tout naturellement supposé que son développement et sa complication pourraient donner la mesure de l’intelligence de chaque animal.
Partant de ce point, divers observateurs ont proposé des moyens susceptibles de juger du volume et de la perfection du cerveau chez un individu ou une espèce donnés. C’est ainsi que Camper a cru trouver ce moyen dans l’angle facial ; Daubenton, dans la position du trou occipital ; Cuvier, dans le rapport des aires du crâne et de la face ; enfin, Gall et les phrénologistes, dans la saillie plus ou moins prononcée de telle ou telle partie du crâne.
Mais, dit M. Colin, le cerveau se composant de plusieurs parties dont quelques-unes seulement, les hémisphères cérébraux, sont le siège de l’intelligence, « le volume de l’encéphale, pris en masse, ne peut donner qu’une base incertaine, et celui du cerveau isolé ne peut nous fournir un élément d’appréciation rigoureuse57 ».
D’un autre côté, d’après le même physiologiste, rien ne prouve que le développement du cerveau coïncide avec une activité proportionnelle.
Quoi qu’il en soit, la méthode de Camper58 est trop connue pour que nous n’en disions pas un mot ici.
Angle facial. — On appelle ainsi un angle formé par deux lignes, dont l’une part du centre de l’hiatus auditif externe et arrive au niveau du plancher des fosses nasales, et dont l’autre, tangente à la partie p. 363la plus saillante du front, vient rejoindre la première au-dessus de la racine des dents incisives. C’est du moins ainsi que l’a établi Camper.
Fig. 136. — Angle facial du cheval.
Mais, afin de rendre la détermination de l’angle facial plus facile, M. Colin recommande de placer son sommet dans un point invariable, qui est l’extrémité inférieure des intermaxillaires, à la sortie des dents incisives (fig. 136 du texte).
L’angle facial du cheval obtenu par la méthode de Camper ainsi modifiée est de 14° chez l’animal adulte et de 20° chez le poulain de quelques jours.
Il est à remarquer que le cheval, qui est incontestablement le plus intelligent des animaux domestiques après le chien et le chat, ne vient que le dernier de tous pour l’ouverture de l’angle facial. Cela seul prouve que cet angle ne peut donner la mesure relative de l’intelligence des animaux comparés les uns aux autres.
1 | Traité de physiologie comparée des animaux domestiques, 2e édition, p. 610. , |
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7 | À l’aide d’un faisceau volumineux qui se détache du corps supérieur, et dont Bourgelat a fait un muscle distinct, le stylo-maxillaire. |
8 | Chez l’homme, la cavité orbitaire est entièrement limitée par des parois osseuses ; aussi, ne voit-on pas, chez lui, de gaine fibreuse oculaire. |
9 | Traité de l’extérieur du cheval, 4e édition. Paris, 1870, p. 223. , |
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13 | Cours de physiologie, 4e édition. Paris, 1879, p. 613. , |
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17 | Aussi accuse-t-elle, comme celle des côtes et des flancs, toute irrégularité de la respiration (voy. IIIe partie, chap. II, § 2, Rythme de la respiration). |
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19 | Os styloïde de quelques auteurs. |
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21 | Nous ne reviendrons pas ici sur l’insalivation, qui a été étudiée précédemment (voy. 1er plan, Appareil salivaire). |
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26 | Voy. l’excellent travail de Étude sur le cornage chronique, Paris, 1803. , vétérinaire militaire, intitulé : |
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30 | Il est à remarquer que ces sillons restent séparés par deux minces rubans de matière nerveuse : l’un, inférieur, formé de substance blanche (commissure blanche) ; l’autre, supérieur, constitué par de la substance grise (commissure grise). |
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43 | Recherches expérimentales sur les propriétés et les fonctions du système nerveux, p. 203. , |
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46 | Leçon de pathologie comparée (La nature vivante de la contagion), Paris, 1884, p. 37. , |
47 | De l’Instinct et de l’Intelligence. Paris, 1883. , |
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51 | De l’Instinct et de l’Intelligence, 1883, p. 49. , |
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53 | Éloge de Broussais (Mémoires de l’Académie de médecine, Paris, 1849, t. XIV, p. 1). , |
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58 | Dissertation physique sur les différences réelles que présentent les traits du visage, etc., par . Utrecht, 1791, pp. 34 et suivantes. |