BNF : https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb128051338
Pluvinel, Antoine de (1552 – 1620)
« Gentilhomme Dauphinois, l’un des plus célèbres écuyers français, 1555-1620. Il montra, dès sa première jeunesse, un goût prononcé pour l’équitation et partit de bonne heure pour l’Italie où il fréquenta les plus célèbres Académies de ce pays et particulièrement, pendant six ans, celle de
Pignatelli
, à Naples
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, regardé comme le premier écuyer de son temps.
Sourdis
, premier écuyer de
Charles IX
, qui était allé acheter des chevaux en Italie, y connut Pluvinel, le ramena en France et le présenta au duc d’Anjou, (depuis Henri III), qui le fit son premier écuyer et l’emmena avec lui en Pologne. Pluvinel fut l’un des trois gentilshommes qui favorisèrent l’évasion de ce prince lorsqu’il revint en France pour prendre possesion du trône. Après la mort de son maître qui l’avait comblé d’honneurs, Pluvinel reconnut l’autorité d’Henri IV; il obtint alors la direction des Grandes Écuries, fut fait gentilhomme de la Chambre et sous-gouverneur du Dauphin.
Vers 1594, Pluvinel, grâce à l’appui de Saint-Antoine et du chancelier de Chiverny, put réaliser son projet de fonder à Paris une Académie pour la jeune noblesse française. Son premier établissement fut au Faubourg Saint-Honoré, auprès de la Grande Écurie du Roi. Ce n’était pas seulement, comme on l’a souvent écrit, un manège. On y enseignait aussi les mathématiques, la littérature, la poésie, la peinture et la musique.
Baltazar Prévost
,
Pont-Aimery
et, plus tard,
Chorier
ont montré quel service Pluvinel avait rendu aux jeunes gentilshommes de son temps en leur épargnant le voyage d’Italie, où ils laissaient souvent la vie, et presque toujours leur fortune et leur santé.
Pont-Aimery
surtout, dans son Académie ou Institution de la Noblesse Françoise, où toutes les vertus requises a un Seigneur de Marque sont déduites...
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couvre Pluvinel d’éloges enthousiastes : « Toute la France est infiniment obligée au Sieur de Pluvinel, lequel par une incroyable charité, s’est dévotieusement offert à la Noblesse... Il nous dérobe l’occasion d’aller en Italie où nous allons achepter avec une despense incroyable, l’ombre de la civilité... Nous pouvons maintenant oublier ce chemin et prendre les erres de l’Académie du Sieur de Pluvinel... à la vérité, il n’instruit pas seulement le Gentil-homme en la profession du maniage des chevaux, mais en la pratique des bonnes mœurs... »
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. Tout le passage est très curieux et Pont-Aimery insiste copieusement et crûment sur certains inconvénients du voyage de Naples.
Pluvinel avait la réputation d’un homme droit, sûr et éclairé. Aussi fut-il chargé de missions importantes à l’étranger et, en partie, de l’éducation du Dauphin qui fut Louis XIII et dont
M. de Souvré
était gouverneur.
Tallemant des Réaux
, cependant, ne le ménage pas : « il n’était pas plus subtil que ses chevaux », dit-il, et il raconte à son sujet deux ou trois plaisantes anecdotes. Mais
Tallemant des Réaux
ne pouvait l’avoir connu, puisqu’il était tout enfant quand Pluvinel est mort, et chacun sait aussi qu’il était mauvaise langue.
Peu de temps avant sa mort, Henri IV avait envoyé Pluvinel en Hollande, chargé d’une mission auprès du Stathouder Maurice. C’est là qu’il se lia avec
Crispin de Pas
, qu’il amena en France pour enseigner le dessin à son Académie, qui dessina et grava les belles planches de son ouvrage et dont le nom est, à ce titre, inséparable du sien
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.
Comme sous-gouverneur du Dauphin, Pluvinel donna à ce prince les premières leçons d’équitation, leçons qu’il continua à son royal élève jusqu’aux premières années de sa majorité. Elles attirèrent à juste titre sur lui la plus grande célébrité, et donnèrent le signal de l’essor de l’équitation en France.
Pluvinel avait pris, sur l’ordre de Louis XIII lui-même, des notes sur « les principales règles de la méthode qu’il tenoit pour réduire les chevaux à la perfaicte obeyssance de l’homme... mais ce n’estoit encore que les premiers traicts de son imagination, lesquels il n’avoit point reveus... ». Il confia son manuscrit à son élève et ami
René Menou de Charnizay
; « il me pria, dit celui-ci, de le luy vouloir garder sans le faire voir à personne qu’il n’y eust mis l’ordre qu’il esperoit pour le rendre digne d’estre offert à votre Majesté... ». Mais, sur ces entrefaites, Pluvinel mourut et Crispin de Pas, qui avait déjà terminé la moitié des planches et qui semble aussi avoir été à ce moment un peu à court d’argent, voulant profiter sans retard du fruit de son travail, acheva celles qui restaient à faire, et, pour faire paraître l’ouvrage auquel elles étaient destinées, il s’adressa, à l’insu de Menou, à un certain Peyrol «serviteur domestique»
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de Pluvinel, qui lui fournit une copie tronquée, inexacte et incomplète du manuscrit de son maître. De Pas publia aussitôt le tout à ses frais sous le titre de
Maneige Royal
.
Menou, en prenant connaissance du livre « si éloigné, dit-il, du sens et de la suffisance de celuy duquel je chéris la mémoire... » fut indigné, et « ne voulant pas souffrir d’avantage vostre Majesté estre abusée... » composa, d’après les notes complètes de Pluvinel et ses propres souvenirs, un nouvel ouvrage, rendant bien la pensée de son maître et ami, et reproduisant fidèlement les leçons qu’il avait données au Roi, auxquelles il semble bien qu’il avait lui-même souvent assisté. Il donna à cet ouvrage le titre de
Instruction du Roy en l’Exercice de monter à cheval
et utilisa les mêmes planches de Crispin de Pas, avec quelques suppressions qui seront détaillées plus loin.Il a donc été publié sous le nom de Pluvinel, deux traités d’équitation :
le Maneige royal
, avec un texte incomplet et sans valeur au point de vue équestre, mais avec les planches de Crispin de Pas complètes et en premier tirage, et
l’Instruction du Roy
, dont le texte reproduit exactement la pensée et la méthode de ce grand écuyer, mais dans lequel les épreuves des planches sont sensiblement inférieures. Les amateurs de belles gravures doivent donc rechercher le premier ouvrage, et les vrais cavaliers le second
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. Antoine de Pluvinel ne laissa que des filles. Jean de Pluvinel, son frère aîné, maître d’hôtel du Roi, n’eut aussi qu’une fille. Elle épousa
Gabriel de La Baume
, conseiller à la Cour des Comptes, qui fut la tige d’une branche de sa maison qui prit le nom de
La Baume Pluvinel
et qui existe encore
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.
[...]Pour apprécier l’œuvre et la méthode de Pluvinel, ce n’est pas le
Manège Royal
qu’il faut étudier, puisqu’il ne contient, qu’un texte tronqué et altéré, mais bien
l’Instruction du Roy
. Toutefois, il est difficile, pour ce dernier ouvrage, de distinguer la part qui revient à Pluvinel de celle qui revient à Menou. On ne saurait oublier que Menou était l’élève et l’ami de Pluvinel et qu’il avait pour son maître une profonde vénération. Il est donc certain qu’il a fidèlement reproduit sa pensée et ses préceptes en publiant l
’Instruction du Roy
. Il y a, d’ailleurs, dans
La Pratique du Cavalier
de
Menou
et dans
l’Instruction du Roy
des passages entiers identiques. On peut dire que le fond de l’ouvrage appartient à Pluvinel et que l’arrangement, l’exposition et le classement des détails, la mise au net enfin, appartiennent à Menou.
1° Position.Le cavalier de Pluvinel est raide, ses reins sont creusés, la jambe dans le prolongement de la cuisse est beaucoup trop en avant; il est encore trop assis sur l’enfourchure, beaucoup moins cependant, quoiqu’on en ait dit, que celui de
Newcastle
qui écrivait que les fesses n’étaient pas faites pour s’asseoir dessus. Pour s’en convaincre, il suffit de lire le long passage de
l’Instruction du Roy
où Pluvinel montre comme modèle au Roi le Grand Écuyer à Cheval en lui détaillant sa Position, et de regarder la planche de l’homme nu
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qui la reproduit fidèlement.
2° Moyens de conduite et de dressage.
La Broue
n’avait pu se défaire entièrement des procédés violents et barbares des maîtres italiens. Il en est tout autrement de Pluvinel — quoiqu’il fût aussi leur élève — et c’est à lui qu’on doit, dans le dressage, une sage et prudente progression et une douceur qu’il recommande à chaque instant. Il voit — et il est le premier — que quand le cheval se défend ou résiste, ce n’est pas parce qu’il est « lasche — malicieux — obstiné mais parce qu’il ne comprend pas ce qu’on lui demande. De là l’abandon des « chatiements » sauvages de
Grison
et autres.
Les mors sont débarrassés des accessoires ingénieux et cruels des
Rusé
, des
Grison
, des
Fiaschi
et surtout de l’auteur des
Frenorum Exempla
, que
La Broue
n’avait pas su entièrement répudier. Leurs branches sont encore d’une terrible longueur, mais il faut remarquer que tous leurs canons sont brisés, ce qui en atténue beaucoup la puissance. Aussi les chevaux de Pluvinel marchent-ils avec aisance et droit devant eux, et non pas contournés comme ceux de
Newcastle
.
Pluvinel dit lui-même : « Si je n’eusse reconnu mes regles plus certaines & beaucoup plus brièves que toutes les autres que j’aurois apprises, je n’aurois pas quitté la plus grande partie de celles du Seigneur I. B. Pignatel, Gentilhome Napolitain, le plus excellent homme de cheval qui ait iamais esté de notre siècle... »
Voilà ce qui explique, dit
Mussot
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, « les différences... entre les méthodes de dressage de La Broue et de Pluvinel : le premier, trop plein de respect pour les règles de leur maître commun, les a importées de toutes pièces d’Italie... tandis que le dernier, ayant réfléchi sur ces règles et leur ayant fait subir l’examen de la raison, les a appliquées d’après des principes plus humains et plus naturels... ».
On sait que Pluvinel usait largement, pour le débourrage et le dressage du cheval, du pilier seul ou des deux piliers, et on lui a même attribué l’invention de ces appareils; à tort, semble-t-il, car
La Noue
, qui écrivait un peu avant lui, s’en sert également. Tout a été dit pour et contre les piliers — dont
Baucher
était l’adversaire — et, actuellement, on ne s’en sert guère que pour le dressage des sauteurs.
Certes, l’ouvrage de
Pluvinel
a bien vieilli, mais on y trouve encore de quoi s’instruire et de quoi réfléchir. En tout cas, sa Méthode, bien plus que celle de La Broue, qui obtint cependant de son temps plus de célébrité que Pluvinel, a servi de point de départ à la création d’une École française, bien perfectionnée et bien modifiée au cours des ans, mais qui couvre Pluvinel d’une gloire ineffaçable et qui lui mérite la reconnaissance de tous ceux qui pratiquent ou qui étudient l’art passionnant de l’Équitation.
Pour une biographie détaillée de Pluvinel, avec la généalogie de sa descendance, voyez
H. de Terrebasse
. La bibliographie de Pluvinel n’est pas aisée à faire et, malgré de bien longues recherches, je ne saurais garantir que celle-ci est exempte de toute erreur. Il est en effet difficile de trouver un exemplaire tel qu’il est sorti des presses de l’imprimeur. Dans certains, il manque des planches; dans d’autres on en a ajouté qui, primitivement, ne s’y trouvaient pas, ou bien ils ont été complétés par des planches d’autres éditions. J’en ai même rencontré dans lesquels les titres et le texte appartiennent à des éditions différentes. Quelquefois enfin, le millésime a été gratté et modifié d’une manière difficile à reconnaître.»
Mennessier de La Lance (1915-1921)