« Les campagnes militaires de Philippe II et d’Alexandre le Grand ont bouleversé les
équilibres politiques et militaires du monde grec classique. En développant une pensée
militaire fondée sur la coordination des armes et non sur le primat de l’infanterie,
ils ont donné à la cavalerie une importance tactique qu’elle n’avait pas dans les
armées civiques de la période classique. L’épopée d’Alexandre représente, à cet égard,
une aventure collective de dizaines de milliers d’hommes et de chevaux. Elle initie
une conception de la guerre dans laquelle les chevaux sont des acteurs incontournables,
infléchissant la stratégie, la tactique et la logistique de campagne. Dès lors, la
production, la formation et la remonte des chevaux de guerre constituent des enjeux
primordiaux de la construction des royaumes hellénistiques, car les dynasties des
successeurs d’Alexandre se sont constamment préoccupées d’entretenir de cavaleries
puissantes. Dans cette aventure cavalière, les cités emboitent le pas aux royaumes
hellénistiques avec les ressources dont elles disposent, réformant leurs cavaleries
ou en constituant de nouvelles, souvent dans une perspective fédérale leur permettant
de nourrir de plus grandes ambitions militaires. Cela implique de trouver des chevaux,
mais aussi des hommes capables de les monter et de les entretenir. Le consensus social
établi entre les autorités civiques et les élites cavalières – une « classe d’écuyers
» loin d’être homogène – diffère fortement d’une cité à l’autre en fonction de la
culture équestre locale, c’est-à-dire des usages, pratiques et représentations des
hommes de cheval dans le cadre – politique, économique et social – de la communauté
civique à laquelle ils appartiennent. Les cultures équestres régionales ont donc en
partie déterminé la capacité des cités à développer leurs cavaleries, mais, en retour,
les mutations politiques et militaires de l’époque hellénistique ont considérablement
influencé la culture équestre des élites en en renouvelant les pratiques – du prestige
de l’hippotrophia aux réalités de l’équitation militaire – et en l’associant plus
fortement qu’avant aux destinées politiques de la cité, à ses valeurs et à son système
de représentation. » Présentation de l’éditeur (2018)